CjùS^ PRC 0 ^ 50 ] DISCOURS A D ' R E S S É fAR M. LE MARQUIS DE LA FAYETTE, AUX OFFICIERS DE LA GARDE NATIONALE, AffcmhUs clic\ lui. ( 3 ) fl'/fi&'A.V discours Adrejfé par M. le Marquis DE LA Fayette^ aux Officiers de la Garde Nationale , affemhlcs cheq lui. Nou S fommes perdus , fi le fervice con- tinue de fe faire aVec une auffi grande inexadbitude. Nous fommes les feaîs Sol- dats de la révolution ; nous devons feuis défendre de toute atteinte la Famille royale ; noué devons feuis établir la liberté des Repréfentans de la Nation ; nous fommes les feuis Gardiens du Tréfor public : la France , l’Europe entière ont les yeux fixés fur les Parifiens. Un mouvement dans Paris , une atteinte portée par notre né- gligence à ces corps facrés , peuvent nous déshonorer à jamais , & nous combler de la haine des Provinces , qui peuvent en un inftant tourner leurs armes contre nous. Je A 2 ( 4 ) vous demande donc, Meilleurs, au nom de la Patrie , que vos Troupes citoyennes fe lient plus folemnellement que jamais à moi , par le ferment de facririer jufqu’à leurs intérêts perfonnels à un fervice exaék & affidu , fl néceiTaire dans les circonf- tances aduelles. Je VOUS le demande à genoux , encore quatre mois que je fixe pour FétablifTe-? ment folide de la Conftitution. < Propofez a vos Bataillons ce nouveau ferment , que je vous prié de ne leur faire prononcer qu’avec la plus grande réflexion. S il n efl: pas poffible que la totalité s’y en- gage, faites en forte de former par ba- taillon une Compagnie de Grenadiers & une de Chaflèurs : mais que çe petit nombre de Soldats de la Conflitution jure, en fe /formant , de facrifier tout pendant quatre mois, d’être fur pied tous les jours, à toutes les heures , fi le bien public l’exige. Je préférerois un petit nombre d’hommes üont , à tous les inflians , je pourrois m’en« (5 ) vironner , à un grand nombre qu’il me feroît impoffible de ralTembler. Je vous obferve néanmoins , Meflîenrs que je ne prefcris rien. Je laifTe tout à vo- tre prudence ^ & je vous prie de me faire connoître , fous trois ou quatre jours , le ré- fultat de vos délibérations refpeélives , afin que d’après elles jepuiffe prendre un parti. Les Parifiens font las de quatre mois de fervice ! Qu’ils me permettent de leur re- tracer les maux qu’ont éprouvés les Amé- ricains 5 pour affurer leur liberté. Iis ont quitté fept ans leurs foyers , leurs femmes , leurs enfans , privés d’afyle^, manquant de vêtemens , de pain. Ils ont éprouvé tou- tes les rigueurs des faifons. Moi - même ^ qui avois l’honneur d’être leur Général 5 j’ai été plufieurs mois fans un écu , vivant d’une feule ration de Soldat 5 & je jure fur mon honneur , que pendant fept ans de misère ^ je n’ai pas reçu une plainte réelle d’un Américain Et vous, Meffieurs ,*qui , en pofant le moufquet , rentrez dans vos foyers , qui , parmi vos amis , vos connoifTances , jouif- fez de tous les agrémens de la fociété , de toutes les aifances de la vie , vous vous plaindriez de fept mois facrifiés pour être libres à jamais ! • *••••• RéfléchilTez , je vous prie , fur ces ob- fervations , & fur notre pofition réellement alarmante par l’inexaélitude dans le fervice dont j’accufe avec peine nombre de Soldats citoyens. . A • • • • Ma tête ne tient à rien ; mais )e }ure de protéger la Conftitution Françaife , à laquelle nous travaillons , & je tiendrai plus à mon ferment qu’à ma vie. . . • • N. B. Le Bataillon de Saint - Roch a fait ferment de fe foumettre aux ordres de fon Général , & de ne mettre bas les armes , que lorfqu’il l’aura alfuré que la Conftitution eft établie. Voici la Lettre quil a écrite à M, de la Fayette à cefujet. ( 7 ) Mon Général, L E Bataillon de Saint-Roch , pénétré des principes que vous nous avez infpirés par Torgane de notre Commandant , a ar- rêté , à la pluralité 5 qu’il n’y auroit dans fon Corps , aucune diftinâion de Grenadiers' ni de Chaffeurs , s’en rapportant à cet égard à la majorité des vœux de chaque Bataillon. Tous les Soldats citoyens du Bataillon de Saint-Roch euflènt déliré fe rendre au vœu de leur Général. Le feul obftacle qui les a empêché d’y déférer , eft que chacun fe difputoit le droit de l’éleélion. Les fati- gues ^ les facrifices qui peuvent coûter à l’intérêt ou aux fentimens de la nature , ne les ont point arrêtés ; & , fous les de-^ hors d’un fimple Fufilier, tous ont des âmes de Grenadiers & de Chaffeurs. Eh ! qui poiirroit héfiter de marcher ^ lorfqu’ii s’agit de la Patrie , & de fuivre les traces du Héros défenfeur de la liberté cela a été < 8 ) îe cri général. Ils répètent donc foîemnelle- ment îe ferment qu’ils ont fait , & jurent qu’en tout temps & en tous lieux leur Gé- néral pourra difpofer entièrement de leur perfonne , foit pour la garde d’un Monar- que , fi cher à la Nation , foit pour affurer , par fa vigilance & fes forces , la Uoerté des délibérations de l’Affemblée Nationale , foit enfin pour le retour de l’ordre & le maintien de la paix , qui ne peut naître que de l’exécution de fes Décrets. Paris, Ze 30 Novembre 1789* A P A R I S y Chez Grégoire, Libraire , rue du Coq près le Louvre.