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DISCOURS PRÉLIMINAIRE

ET PLAN

DU DICTIONNAIRE DES INSECTES.

PAR M. MAUDUYT.

iVi. Guéneau de Moncl-ieillard, avantageu- i'emeiu connu du public par plufieurs travaux en différens genres, avoir été chargé de ré- diger le dictionnaire des infc-dtes pour la nouve''e Encyclopédie : une maladie longue l'empêcha d'exécuter l'ouvrage qu'il avoir entrepris ; elle ne lui laiila que la liberté de ramalFer des matériaux dont il auroit fait un excellent ufage, mais elle ne lui permit pas de les mettre en œuvre. A la mort de ce favant , M. Panckoucke me propofa de

me charger du travail que M. Guéneau n'a-

° ^ ' r

von pu même commencer : je lentis en

même -rems l'étetiJue de cette entreprife , êc que la difficulté de l'exccurer à lafatif- faétioii du public, étoit augmentée par les efpérances qu'il avoir jugement conçues au nom du favant qui lui avoit été annoncé comme devant en être l'auteur. En me char- geant cependant de cette même encreprife , tours pénible qu'elle eft , j'entreprends un tra vail qui de tout tems a eu pour moi beaucoup d'attraits, & je me propofe de donner à la rédac- tion de l'ouvrage qui m'eft confié tout le foin qu'il mérite & dont je fuis capable. Avant de tracer le plan fur lequel je conte l'exécuter, qu'il me fo't permis de payer à la mémoire do M. de iMontbeillard le tribut que je dois à ce favant à double titre ,cùrnme exécutant un travail dont il avoit été chargé ce comme ayr.nt eu l'avantage de le connoître en parti- culier. M, deMontbeillard n'a pi-.biié qu'un petit nombre d'ouvrages, mais ils ont fuffi pour lai mériter l'eftime du public & le titre H'ijîoirc Naturelle ,Infc^es. Tûmc J.

d'excellent écrivain. Son travail le plus étendu elt la continuation de l'hiftoire des oifeaux commencée par M, le comte de Bi ffon ; perfonne n'ignore que les premiers travaux de M. de Montbedlard j en ce genre , ayant paru fans que l'on fût informé qu'ils n'appar- teno'ent pas à iM. de Buffon^ le public ne s'appcrçut pas qu'ils n'étoient pas du même auteur. Cette anecdote généralernent con- nue fuffit pour qu'on apprécie le mérite de l'ouvrage. Les autres travaux de M. de Mont- beillard font deux difcours, l'un fur l'inocu- lation de la petite vérole, l'autre fur la peine de mort, inférés dans les mémoires de l'acadé- mie de Dijon j année 1 7 (5(î j différens articles de l'ancienne Encyclopédie ^ eu particulier le mot étendue; deuxdifcours faifant partie de la colledion académique , & le difcours pré- liminaire où l'on trouve réunies la profon- deur, la clarté des idées, l'élégaïKe & la cor- reiftiou dans la diction.

On voir par cet énoncé que le génie de M. de Montbeillard fe prêtoit à la médita- tion de fujets fort différens , & par la manière dont il en a parlé, qu'il avoit les talens nécelfaires pour les traiter chacun dans leur genre. Cependant M, de Montbeillard paObit facilement de l'étude des fciences à celle des arts \ il les connoiffoit , il en fencoit le mérite, & il a enrichi la poëfie de plufieurs pièces , confacrées à l'amitié , aux talens , au mérite. Il n'a manqué à ces pièces que d'être publiées. Mais elles ne fe trou- vent qu'entre les mains des amis de l'auteur ^

parce que c'eft pour eux feuls & pour lui qu'il les avoir compofées. Cerre facilite qu'avoir M. de Montbeillard de traiter d'un fujet férieux ou agréable, étoit l'eftet d'un elprit en mème-tems profond & enclin à l'enjoue- ment. Ce double avantage rendoit la con- verfation de M. de Montbeillard trèsinté- relTante. Il y bri'loit fans y dominer; il en faifoit les délices; il y parloir avec favoir .S: éléoance des fujets les plus graves , toujours d'une manière propre à plaire j & jamais avec aridité. Il y traitoit avec beaucoup de finelfe les fujets fufceptibles d'agrément ; il inf- truifoic donc ôc plaifoit en même-teir.s.Ce témoignage eft: celui que j'ai entendu fes amis lui rendre généralement ; mais ils font fur-tout l'éloge de fes vertus , de fa dmicure dans le commerce de la vie en général , de fon exactitude à fcs devoirs dans fa fa mille, de fa fureté ëc de fon aménité envers fes amis.

Parmi lesmatériaux ramadés par ce favant, qui m'ont été confiés à fa mort,' je n'ai rrouvé d'article achevé & qui lui appartînt , que le mot infecîe. Il fera placé dans le cours du diikionnaire fuivant l'ordre alpha- bétique. J'ai cru devoir le conferver , parce que je n'y ai rien remarqué à y ajouter ni à en retrancher, qu'il contient tout ce que le développement de ce mot comporte j &: que l'emploi en eft un hommage à la mémoire du favant de qui le public attendoit l'ouvrage entier.

Lorfqu'on perdit M. de Montbeillard , on croyoit trouver dans Tes papiers le diélion- naire des infeéles fort avancé; il fe paili un tems alfez long avant qu'on pût les exa- miner , & l'on n'y trouva que des matériaux donc celui qui les avoit ramailés auroit feul pu faire ufage. Le didionnaire étoit donc à faire en entier, il eft de nature à être né- celTairement fort étendu , plnfieurs années s'étoienc écoulées fans qu'on y eût travaillé , Si le tems preffoit d'après les époques & le terme pour la confcdion de l'Encyclopédie annoncées au public. Ces confidcrations

DISCOURS

m'engagèrent à chercher un coopérareurj j'en parlai à M. Olivier, doiteur en Méde- cine, chargé par M. Bertier, intendant de Paris, de faire, relativement à l'Hiftoire Naturelle, la defcription de la généralité de celte capitale. M. Olivier c'toit connu pour s'erre appliqué depuis long-tems à l'Hiftoire Naturelle , & particulièrement à la recherche des inie£les dont il nvoit ralfemblé une col- lecbion; Je lui propofai de m'aider dans le travail dont j'étois chargé ; il l'accepta, & je p.'irlai de lui en qualité de mon coopérateur , à M. Pançkoucke, qui donna fon agrément aux arrangemens que nous pourrions faire enfemble. Dès ce moment nous nous occu- pâmes, M. Olivier & nu 'i^ du plan de l'ouvrage donc la rédaélion nous écoit confiée, Se du parcage des travaux néceflaires pour l'exécu- ter. Nous convînmes que je ferons chargé des difcours généraux dans lefquels je trai- tetois.

1°. De la forme, de l'organifation des in- feéles, de leurs métamorphofes , des ali[nens donr ils fe nourrillent , de leur accouplemenr, de leur rrprodudion , des préciutions qu'ils prennent pour leur foftérité , de leur dévelop- pement & leur accroifiement , de leur ma- nière d'être, des caufes qui favorilem leur multiplication ^ ou qui y nuiient, delà diirée de leur vie.

1°. Des lieux on les trouve, de ceux ils multiplient davantage , les eTpèces font plus fortes & plus gtandes , e .1 cm- paraifon des infedes des ifférens chm.us.

3". Du rang des infeétes dans la férié des êtres, de l'emploi que la nature paroîc en faire, des torts qu'ils nous caulent dans la reprodudionj l'accroiirement & la confer- vation des végétaux , dans l'exiftence & la bonne conftitution des animaux qui nous font utiles, dans le maintien de leurs par- ties ou de leurs produdions qui fervent à nos ufages ; des avantages qi;e nous en reti- rons en économie , en médecine , dans les arts.

4". De la manière de faire une collcdion d'inf;6les, des inftrumens qui fervent à la faire , de l'attention , en la formant , de

P R É L I M I N A I

ramafTer & de diftinguer le^ mâles & les fe- melles j d'obferver les lieiix , la faifon ils ont écé trouvés , les fubdances dont ils ii nourriireiit , foit qu'ils n'aient de goût que pour une forte d'aiimeiu, foit qu'ils en aient pour plufieurs ; de la nccedîcé de dé- crire quelques efpèces peu de tems après les avoir trouvées , à caufe des changemens qu'ils fubilTent en peu de tems -, du foin de faire connoître les dégâts qu'ils caufent , les avan- tages qu'ils procurent; de la manière de faire palfer la colleclion dans le lieu de fa deftination , & de l'y conferver.

5 ''. Enfin j de donner la notice des ouvra- ges du plus grand nombre des auteurs qui ont écrit fur les infeéles, & oe rendre cette notice aulll complète qu'il me feroit pof- fible.

On voit par ce qui vient d'être dit que le dic- tionnaire commencer» par cinq difcours géné- raux; il y aura encore dans le corps de l'ouvrage quelques articles que j'aurai fournis. Ces articles feront indiqués par la première lettre de mon nom. M. Olivier s'ell réfervé d'ex pofer la méthode d'après laquelle il rangera les infedes, tout ce qui eft relatif à la no- menclature , à la fynonimie, à la partie def- criptive, & à l'hilloire des genres & des efpèces. Il développera lui-même fon plan dans un difcours à la fuite de ceux donc je viens de parler.

PREMIER DISCOURS.

De la forme & de l'organsfation des infccles , de leurs metamorphofes , des alimtns dont ils fe nourrijfent , de leur accouplement , de leur produclion , des précautions qu'ils prennent pour leur pojlérité , de leur déve- loppement 6" de leur accroijfcment , de leur manière d'être, des caufcs qui favorifent leur muhiplicaùon , ou qui y nuifent ^ de la durée de leur vie.

Les infedes ne font aux yeux de la plu- part Jes liommes que des êtres vils , remar- quables feulement par leur multiplicité , leur

importunité, le

R E.

déc'.HU

1^;

qu on en conçoit

fans un motif déterminé , & par conféquen par habitude & pat préjugé. Ce font au contraire pour quelques-uns, qui en fonc une étude particulière, des êtres merveilleux qu'on ne peut trop obferver& trop aJmirer, parce que, fous un volume beaucoup plus petit que celui des autres animaux, ils jouif- fent d'une exiftence aulTi complète , des mê- mes facultés ; qu'ils ne donnent pas moins lîv' fouvent plus d'uidic:-s de fagacicé ou d'inf- t i 11(51 ; comme ii l'exiftence, les facultés, la fagacité ou l'inftinél dépendoient du volume, qu'ils fulfent en rai(o!i des malles, que la nature fût plus étonnante pour nous, par conféquent plus admirable à nos yeux , en vivifiant un atome de matière qu'un cololfe! D'autres ne recherchent les infe<ffesqu'à caufe de la fingularité de leur forme ou pour le brillant de leurs couleurs , ils les amallen: & les confervent comme des pièces rares , & ils fonc pour eux l'objet d'une curiofité fi;é- rile; mais le plus grand nombre de ceux qui s'en occupent , tend à réunir la plus grande quantité poflible d'efpèces d'infeéleSj tx: àla ranger dans un ordre que quelques-uns ima- ginent être celui que la nature a fuivi dans la proJudion de ces animaux : plus unecol- leétion , difpofée fuivant l'ordre adopté , ell: nombreufe en efpèces^ f'.us on en fait cas, & c'eft fans doute avec tondement; mais le defir d'augmenter fa colledion , d'en alon- ger le catalogue , invite fouvent à faire une trop grande attention , à donner trop de valeur à des différences très légères j à des nuances peu marquées qu'on diftingue entre des individus d'ailleurs femblables en tout ; à regarder les individus en qui on obferve ces différences comme des efpèces, à les inf- crire comme telles fur le catalogue à la fuite des infedes donc ils ne diffèrent que par ces traits légers , fuperficiels, qu'on regarde com- me eirenciels & d"iltin6lifs , au- lieu de placer ces mctnes individus comme variétés , à côté des efpèces auxquelles ils fe rapportent. On jouit après ce travail peu pémble , du dou- ble plaifif- d'avoir augmenté fa collégien ^t d'avoir ajouté un article au catalogue ici ai)

iv DISC

infedes en gênerai. Cecte fatisfaflion , qu'on n'achète p?.s cher, qu'on tft à porcée de re- nouveller fouvent, pour peu qu'on foit aâif, nompe beaucoup de gens de bonne toi : ils penfent étendre les connoiirances humaines en ajoutaju au catalogue qu'on en a dreirc , un être ifolé , différent de ceux avec lefquels il a les rapports les plus intimes par quel- ques traits légers, quelques nuances indéci- ses , à pL;ine fenf)bles : ils ne font pas at- tention que des différences aufli peu impor- tantes ne changent rien à la coniritution iSc par conféquent à l'identité des efpèces; qu'a- vant d'avoir égard à ces traits fi peu profonds, etiets ordinaues de tant de caufes étran- gères, 6i non de la conf^itution du méca- jiifme intime , il faudroit être alïïiré qu'ils n'ont pas été occafionnés par des circonllan- ces dépendantes delà température de la fai- fon, de la nourriture, du lieu de l'exillence, ^'c. ; & que jufqu'à ce qu'on foit allure qu'il Jie faut pas rapporter à ces caufes fi probables, li fréquentes, les traies fuperficiels qui difT~é- rentient certains individus d'autres infcdes *n qui on remarque les mêmes parties conlti- tuantes , effentielles, confiantes & indépen- dantes des circonflances , il ne faut regarder les individus qui offrent ces diftinftions que comme des variétés & non des efpèces; les mêmes perfonnes ne paroiHTent pas non plus alfez perfuadées que ce n'eft pas la longueur de la lilte fur laquelle nos connoiffances &r nos pofléfîions font infcrites, qui nous rend plus favans ou plus riches \ mais que nous ne femmes l'un (^- l'autre qu'autant que le catalogue eft corre(5t & qu'il énonce des ob- jets réels. Qu'eflce en effet que des connoif- fances fi6tices & des polleffions chimériques ? Mais ne critiquons perfonre ; fi ce qui nous paroît le plus raifonnable, & que nous pro- pofons comme tel , l'efl en effet , il fera adopté & fuivij ce fera le produit du tems. Sans imiter donc ni le commun des hommes qui foulent les infeftes aux pieds j ni ceux qui, par quelque motif que ce foit , leur accor- dent une admiration, une valeur qu'ils ne méritent pas, tâchons de reconnoître ce qu'ils font en eux mêmes j quels font Igur extérieur,

OURS

leur conlliturion &: leur organifatîon ; com- parons-les fous ces rapports aux autres ani- maux; rcconnoiflons en quoi ils en difièrenc & ce qui les dilfingue rcellemenc entt'eux.

I."

De l'extérieur & de la forme des înftcles.

Les infeéles font en général plus petits que les autres animaux que nous apperce- vons aifémenr. Car je n'entends pas parler, foit des inftdes , foit des animaux d'autres genres que nous ne découvrons qu'à l'aide du microfcope , que cet inflrument nous oflre par-tout ik. dans toutes les fubf^ances ; loic que fes rapports foient toujours fidèles , foie qu'ils nous induifent en erreur.

Il y a cependant quelques infefles pius gtands que certains oifeaux & certains poif- fons j fans parler des versj tels font ces grands fcarabèi j ces groffes araignées , qu'on nous apporte des contrées méridionales de 1 Amé- rique ; \z fcarabœus acléon , \tprionus gigan- tœtts , Xaranaa avicularia , font d'un volume cinq, fix fois, peut-être d'avantage, audeflus de celui de certains oifeaux, mouches & de Vablette ; mais ce font des exceptions rares. Il n'en eft pas moins vrai qu'en général les infedes font plus petits que les autres ani- maux , & qu'ils en diffèrent par ce premier trait.

Un caradère qui les en éloigne davart- tage, c'eft leur fotme; elle ne relfemble & ne peut être au premier afpedt comparée à celle d'aucun animal ; ils patoifTent confor- més fur un modèle particulier. C'eft cette différence générale dans tout leur extérieur, avec les autres animaux, qui fait que l'homme qui n'a jamais étudié l'hiftoire des infedes _, reconnoît fans hcfiter , pour tels, tous ceux qui s'ofî'rent à fa vue , tandis que le natu- ralifte eft fort embarraffé à déterminer ce qui convient à un animal , pour qu'on doive le placer parmi les infedes ; ce qui vient de ce que le premier juge d'après l'enfemble & tout l'extérieur , tandis que le fécond ne s'attache qu'aux feuls traits qu'il nomme

PRELIMINAIRE.

des carailTcres. L'ignorant paroîc donc ici aii- dellus du lavant ', mais l'un n'ajoutera jamais rien d fa première faculté , celle de recon- noîcre pour un infede tout individu qui en ell: un en effet ; il n'ira pas plus loin ; il ne diftinguera pas les infeiîtes entr'eux , & il les confondra tous faute d'obfervet les traits, les formes qui les différencient. Ici le fécond ren- tre dans tous fes droits. Il juge en général, comme l'ignorant d après le rapport des Ans, &■ en particulier, d'après des traits diftinc- tifs que l'examen & la reflexion lui font re- marquer : il reconnoît les infectes au premier afpedt à leur forme fi différente en apparence tle celle des autres animaux ; mais il ne fe borne pas à ce premier jugement ; il examine cette forme qui paroît h particulière ^ il la compare à celle des autres animaux , îk il trouve qu'elle s'en rapproche; il la compare enfuite entre les divers infedles , & il trouve qu'elle établit déjà des différences en^.r'eux ; après avoir examiné la forme dans fon en- femble , il confidcre féparément celle des différentes parties , 6c il apperçoit alors des traits multipliés , des caraâères diftindifs , nombreux entre les différentes efpèces qui les lui font diftinguer.

Nous venons de dire que la forme des jnfecles fe rapproche (J-, celle des autres ani maux 5 c'eft ce qu'il faut prouver en l'exami- nant & par la voie de la comparaifon.

Quelle que foit la fotme des animaux , on divife leur corps en trois parties , qui font la tète, le tronc ou corps proprement dit , &: les extrémités : on fubdivife chacune de ces parties , & le tronc fpécialement en deux grandes cavités qui font la poitrine ou cho- Ttix , &c le ventre ou abdomen.

Le corps des infedes eft également divifé en trois parties , qui font de même la tète , le corps , proprement dit, & les extrémités; chacune de ces pattiesen contient également d'autres qui exigent des fubdivKions , &: le corps fe fubdivife de même en deux caviés qui répondent à la poitrine & au ventre. Mais on n'emploie pas le mot de poittine pour les infedles, on fe fert de celui de thorax ^ ou <ie corceUt j Si Ton défigue la féconde ca-

vité ou par le nom de ventre , ou par celui ^ahdonicn. La divihon naturelle du corps des infedes 6c la première que préfente (on anaiyfe , eft donc la même que celle du corps des autres animaux. Il y a dans les parties qui viennent d'être nommées des rapport i entre le? infedes & les autres animaux ; il y a aulVi des différences j (Se comme elles font plus frap- pantes au premier afpecl que les rapports, elles font caufes que les infeétes paroilfent à la première vue formés fur un modèle difte- rent de celui des antres animaux , quoique le même ait fervi pour les uns & les autres. L'examen de ces rapports & de ces différen- ces confirmera ce que je viens d'avancer.

La tête proprement dite, ou cette bocte folide qui renferme le crâne, depuis celle de l'homme jufqu'à la tête des infedes , eft de forme plus ou moins régulièrement arron- die ; mais certaines parties qui y tiennent, q-j'on eft accoutumé à compter au nombre de celles dont elle eft compofée , en altèrent & en changent la forme plus ou moins. Ainfi , les mâchoires font paroître la tête des qua- drupède* alongée en avant , 6c celle de l'hom- me, au contraire, applatie ou déprimée de de- vant en arrière , 5c c. ; de nv me les mâchoires très- greffes & très faillames dans certains infedes , remplacées dans d'autres par une trompe , font paroître leur tête peu arron- die j mais (\ on la dépouille des parties qui nzw font qu'acceffoires , on trouve qu'elle l'eft en effet plus ou moins régulièrement dans les différens infedes , comme dans les autres animaux,

La tête des infedies a donc une forme ar- rondie comme celle de tous les autres ani- niaux I^.. Parité,

Des parties qui y font annexées en altèrent &• en changent la forme au pre- mier'afped II«. P a R i,t i,

Elle eft , dans tous les animaux & dans les infec- tes, formée à l'extérieur de pièces folides , larges , jointes par engrainurè, &

r] DISC

en dedans elle forme av.s

cavité HI'=. P A R I T ï.

Celte cavité efl deftiiiée à contenir le ceiveaiij & le contient dans les infedes comme dans les air res ani- maux W. Parité.

Mais la tête dans les autres animaux ell d'un volume affez eonfidérahle en proportion du refte du cosp$,elle tft fupportée par le cou qui l'y réunit & la met en évidence j dans les infedes elle eft exceffivement petite, même en proportion du refte du corps au- quel elle eft ou immédiatement jointe , ou àriiuéiieur diquel elle eft même enfoncée, cachée en partie, faifant à peine faillie au dehors; la pofKion de la tête des autres ani- maux en rend les mouvemens prompts, fa- ciles, étendus ; celle de la tête des infeéles les rend difficiles , lents 6c bornés.

Ce font donc le peu de volume de la tête des infedtes en proportion du refte du corps j fa jon£l;on immédiate avec le tronc, la len- teur, le peu d étendue & de variété de fes mouvemens, conditions purement acciden- telles, qui, au premier afpeél, la font pa- roître très-différente de celle des autres ani- maux , empêchent même qu'on ne la remar- qua quelquefois, malgré les rapports elfen- thlsrde forme , de Jl raclure , d'ufage avec la tête des auties animaux.

Le cou , intermédiaire entre la tête & la poitrine, fert à les réunir; c'eft une partie ïelTerrée, moins large que celles dont il forme la jonction. Un filet ou étranglement tient lieu de cou dans les infectes; ainli la tête & la poitrine font dans les animaux & dans les infeéhi^s unies par une partie inter- médiaire; la poitrine eft jointe , dans les animaux & les infeétes, avec le ventre ou abdomen; les extrémités fupérieures dans l'homme, les extrémités antérieures dans les quadrupèdes J ou Tes parties qui y répondent, coinme les aîles dans les oifeaux , les nageoi- res latérales dans les poilTons , font, ou ar- ticulées avec la poitrine , ou au moins ad- hérentes à cette partie; les ailes des infedtes,

OURS

qui répondent à celles des oifeaux , & aux extrémités antérieures des animaux, font at- tachées à leur corcelet.

Il y a donc parité entre la poitrine des ani 1 aux & le corcelet des infeâ;e> dans leur fituation entre la tête, & le ventre, leur connexion avec la tête & les parties atta- chées à la poitrine ; mais ces rapports , quoi- qu'edentielsau fond du mécanifme , font foi- bles,& fur-toutàlinfpeétion feule^encompa- raifon des différences qui vont nous occuper.

La poitrine des animaux eft ample; le cor- celet des infeétes a peu de capacité ; l'une eft arrondie fur les côtés , déprimée en deflus & faillante en delTous; l'autie eft ou entière- ment cylindrique ou approche beaucoup de l'être ; la poitrine eft continue avec le ven- tre ; la jonction de ces deux cavités n'eft pas fenfible à l'œil , ni marquée à l'extérieur ; le corcelet des infectes eft toujours féparé du ventre par une articulation diftinéte ; ils ne tiennent l'un à l'autre que par un filet ou pédicule , fenfible à la vue dans rous les infedtes, très-étroit & fort long dans plu- fieurs; enfin, ce qui conftitue une différence encore plus remarquable , c'eft qu'outre les aîles qui répondent aux extrémités fupérieures ou antérieurs, toutes les pattes font attachées au corceler.

Il y a donc des différences très -grandes & très-frappantes à l'afpeft entre la poitrine & le corcelet, dans leur capacité, leur for- me , leur union avec le ventre , le nombre des parties qui y font attachées.

Ces difTé:ences, fenlibles à la vue, con- tribuent à faire paroîrre les infedes dune forme particulière. Mais les points effentiels, la poiîtion entre la têie &' le ventre , la forme même cylindrique, dont la poitrine fe rap- proche plus ou moins & s'éloigne bien plus à l'extérieur qu'au dedans ; «Se ce qui eft plus important , mais ce qui n'eft pas fenfible à la vue , les fondions de la poitrine & du corcelet fe correfpondent. Je n'infifterai pas davantage fur les prcmieis de ces articles, mais feulement fur les féconds. C'eft dans la cavité de la poitrine que font renfermés le cœur & les poumons, ces organes fi elleutiels

TRELIMINJIRE.

à rentretîen àe ia vie &: qui en font les pre- miers moteurs 5 le cœur &c les poumons ne font pas ifolés dans Ls infedtes comme dans le« autres animaux , & coiicencrés dans la feule cavité de la poitrine ; ces mêmes or- ganes , ou ceux qui les repréfentent , qui ont la même Itrudbure , les mêmes ul^iges , s'é- tendent dans les ini'eéies d'une extrémité du corps à l'autre, & pénétrent dans toutes les parties : cependant c'eit dans la cavité du corcelet que ies trachées, qui font les poumons des infedes, ("ont plus nombreufes, plus am- ples , d'une texture plus forte ; c'eft fur fes côtés que font placées les plus grandes flig- mates , qui iont les bouches par lefquelles les infedes refpirent ; c'eft dans la cavité du rorcèlet que le long artère qui fait les fonc- tions de cœur a plus d'ampleur , de conlif- tance , des battemcps plus forts. Il réfulte de l'organifation qui vient d'être expofée , que les plaies de ia poitrine font d'un dan- ger excellif pour le commun des animaux , qu'elles leur caufenc une morr inftantanée quand elles font conlidérables &: plus ou moins prompte à propi rtion de leur inten- fité j que pour les infedes , pour qui les pliies Iont en général ù peu dangereufes , celles du corcelet le (ont plus que celles des autres parties; que h elles font conlidérables, elles ne les tuent pas, c^^mme les autres ani- maux , à l'inftant , ma:s lu peu de temps , au lieu que les plaies faues aux autres parties intérelfent très- peu leur vie (Se ne les en pri- vent pa:. Ccft ce que favent très bien ceux qui font des coliedions d'iiifedes , & qui , pour empêcher qu'ils ne fe gâtent en cher- chant à s'échapper , s'efforcent de leur don- ner une mort prompte en les blelfant j ils les percent au corcelet , ou ils le compri- ment , bien aflurés qu'ils ne parviendroient pas également à leur but en attaquant toute autre partie.

Il y a donc rapport même dans les ufages , entre la poitrine dans les grands animaux , & le corcelet dans les infecl:es , comme il y en a dans leur fituation , leur forme &c leur connexion avec les parties qui y font atta- chées.

ViJ

La cavité du ventre eft la plus ample dans les infedes comme dans les autres ani- maux ; il eft la portion du corps la plus volumineufe ; il eft plus fouple &: moins fortifié , ou il entre dans fa llrudure moins de parties folides, & celles qui en iont partie ont moins de denlué ; enfin, il contient ies viicères qui fervent à la di^eftion , les orga- nes de la géncratijn dans les femelles , une partie de ceux qui concourent à la même fondion dans les mâles; il eft fitué au-def- fous de la poitrme , ik il termine le tronc en finilîant pat un prolongemejic qui forme la q^-eue, ou un réirécilîenient qui l'indique, qui en eft un commenccmeiu ; au - deliuus eft une ouvetiuie , limple dans les mâles , double dans les femellei , qui donne ilfue aux excréments & entrée a la partie du mâle.

Les infedes reflemblent aux autres ani- maux par plulieurs- des traits qui viennenc d'être détaillés : il y a donc de grands rap- poits, des lapporis nombreu;< &<. elïentiels entre le ventre ou abdomen dans les difte- reus animaux & les infedes ; mais il y a des différences dans la forme , frappantes à la vue , qui en impofent , qui rendent les rapports nuls à l'alped , «Se qui contribuent en grande partie à la fingularué de la figure des miedés.

Nous lavons déjà que le ventre eft con- tinu avec la poitrine dans les animaux ; que ces deux cavités ne font pas diftindes à l'œil; elles le font d'une manière frappantes dans tous les infedes , &; dans un grand nombre le ventre ne tient à la poitrine que par un filet très -long ^: très délié, -Le ventre eft arrondi en général dans les diffcrens animaux, &c il l'eft fur- tout en defl'us , & en avant ou en delfous ; il eft au contraire ap; lati en deffus & en dtlfous dans la plupart des in- fedes ,-& circulaire feulement furies côtés. Dans ceux en qui il n'a pas cette forme , qui eft la plus ordinaire _, il ne fe rapproche pas , il s'éloigne au contraire davantage de celle du ventre des autres animaux ^ aiijfi dans certains infedes, comme \cs guêpes , il di pyrifoimei dans d'autres, comme les atrai-

VilJ

gnées il eft globulaire , ^c. En voilà fuffî- fammeiu pour que des différences aufll gran- des, aulîi fVappances dans ia portion du corps la plus ample , faileiu paroîcre les infectes d'une forme pardculière.

Ce font donc la petitefTe de la tête , fa fituation, fon peu de mobilité, le petit vo- lume du cotcelec , fa conne\'ion , avec des parties qui , dans les autres animaux ne tien- nent pas à la poitrine ; fa manière d'être jointe avec le ventre \ la connexion de celui- ci avec le corcelet , & , ou fa déprcllion en dellus & en delfous , ou fa forme particu licre fuivant les genres , qui font au premier afped juger le corps des infeâes d'une forme différente de celui des autres animaux , quoi- qu'il ait au fond la même ; mais le premier coup-d'œil trompe. Et ceux qui s'y bornent, comme c'elt le plus grand nombre , recon- noiir.;nt les inCecles à la première vue , parce qu'elle leur offre les différences, & que les rapports ne faurcient être apperçus qu'en les cherchant & par la comparaifon des parties.

Ce n'efl: pas feulemert l'afped du corps des infedes qui les fait reconnoître au pre- mier coup d'cril , mais ce premier trait dif- tindif eft fortifié par des différences que l'œil failit entre les infedes & les autres animaux dans les parties annexées aux différentes por- tions du corps. Nous allons fuivre l'examen de ces parties. Les unes fe trouvent (S^ fe relî'en'.bleiu dans tous les animaux ; les au- tres on: feulement des rapports plus ou moins direds & une reffemblance plus ou moins grande : il y en a qu. fe trouvent que dans certains animaux.

Je fuivrai' ce même ordre dans l'examen de ces parties , en fuivanc aulli la divifion du corps en tête , poitrine Hc ventre.

Les yeux & la bouche font partie de la tète , ilv fe trouvent dans tous les animaux ; cette propofuion eft rigoureufemenc exade pour la bouche, car quoi qu'elle ait une forme fouvent différente , tous las animaux ont un organe par lequel ils prennent de la nourriture, èc par cjuféquent ils ont une bouche , il faut pouicant excepter quelques phaltmes qui ne pîçunçju ws d'aUiiieiis, (5c qui à la ^lacç d^

DISCOURS

la bouche n'ont qu'une déprefàon. Maïs oa n'elt pas affurc que tous les animaux voient &c quelques - uns femblent n''ivon- point d'yeux. Comme le nombre en eft petit, je n'ai pas craint de généralifer la propofition.

Les yeux àts infedcs n'ont de rapport avec ceux des autres animaux que d'être ifitués à la partie antérieure de la tête; ils ine font ni mobiles , ni diftinds par leur j éclat du refte de la tête, avec lequel ils |fe confondent pr l'uniformité de couleur, excepté dans un petit nombre. Us font dénués de cils & de paupières j ils ne font point fitués dans une cavité , mais ils font au con- traire faillants. C'eft tout ce qu'on en peut appercevoir à la vue fimple , & ce qui nous fuffit en cet endroit ; ce qui fuffit aulîî pour qu'on trouve au premier coup - d'oeil une. grande différence entre les infedes & les autres animaux ; car les yeux font un des traits les plus frappants.

La bouche , grande , apparente dans les quadrupèdes, dans lesiePtiles, les poiffons \ remplacée dans les oifeaux par le bec qui n'eft pas à proportion d'un moindre volume , qui ne frappe pas moir.s à la vue que /a bûuche propremeJit due, eft ou petite & .i peine apparente dans les infedes , ou ne leffemble point à celle des autres animaux; elle n'a de commun avec cette partie que d'être fituée en devant & au bas de la tête; encore dans quelques infedes fe trouve-t-elle en delfous. Dans les coléoptères ou fcarahès elle s'éloigne moins de la forme ordinaire, elle s'en rapproche même en ce qu'elle eft entourée de lèvres , en ce qu'elle ren- ferme des mâchoires ou dents & une lan- gue. Mais les lèvres au lieu d'être charnues Se conrinues , font écailleufes & composées de plufieurs feuillets ; les mâchoires ne font pas verticales, mais horifontales , & leur mou- vement eft latéral au 1 ieu d'être perpendiculaire; elles ne confiftent pas dans \^ réunion de plulîeurs os raffemblés fur un feul,maisce font de chaque côté une longue dent , ap- platie au lieu d'être arrondie , échanctée &• aimée de crochets. La langue n'eft ni char- nue , ni mobile, ni dccachée du palais , c'eft

«ne

PRÉLIMINAIRE.

une membrane fèche , velue , adhérente. Dans les aiures inlefles !a bouche efl; rem- placée par une trompe courte, groire , char- nue , dans les uns j longue , déliée , mem- braneufe dans les autres ; femblable dans quelques-uns au bec des oifeaux ; & entîn la bouche manque dans quelques infeâes, non dans tous leurs états , mais dans le der- nier, qui eil celui de leur perFedlion , &■ à fa place on apperçoit leuiemenc une légère depreflîon.

En vain chercheroir- on fur la cète des infectes quelque partie qui ait du rapport avec celle^ qui fervent dans les autres ani- maux à la perception des fons. Il ne me refte donc qu'à parler de quelques parties qui fe trouvent fur la tète de différents an maux & fur ce^f des inledtes. Les plus remar- quables font les cornes & le bois de certains quadrupèdes j quelques infeélies portent fur le fommec de la tête une appendice ou épi- ne , qui par fa forme , par fa confiftaiice même , fe rapproche des cornes des quadru- pèdes , & en particulier de celle du rhino- céros ; d'autres ont à côté de la tête des par- ties ratsifiées qui reiremblent au bois du cerf; mais ordmairement les appendices qui ont cette re'Temblance tiennent par leur bafe au corcelet ii non à la rête , à laquelle on a coutume cependant de les rapporter quand on ii'exmiine leschofes quefuperficiellement; je ne parle point des protubérances, des afpé- rités , des excroiffances de différente forme que l'on voit fur certains inlet^es, & dont on rapporte le plus fouvent l'origine à la tête , quoique ces parties dépendent du cor- celet ; elles n'ont point de rapport avec les parties qu'on voit fur la tête des autres ani- maux, & elles ne peuvent que contrib ler à donner aux inlettes une forme bizarre CV fiii- gulière j mais les appendices qui reiFemblent ou aux cornes ou au bois des quadrupèdes , loin de rappeller les idées de ces grands ani- maux , obfervés dans d'aullî petits que le font les infedtes, font une des caufes qui les font diftinguer.

Nous venons d'obfervet ou des parties , ou des appendices qui fe trouvent lut la tête

Hijloire Naturelle i Infectes, lome L

qu lis ont leuis , oc qui ne m.inq.ie .1 au au moins dans leur dernier état ou ccl perfgélioii. Ce font les anc:iines ; c'eft le

des diftéreiis animaux & fur celle des in- feéles > mais il exifte fur la leur une partie qu'ils ont feuls , &c qui ne Ininc-i'ie .1 aucun , lui de e nom qu'on donne à deux filets mobiles, plus ou moins longs, plus ou moins gros ou déliés, fitués un de chaque côté de la tête, &i en deiius.

Ces filets ont une forme différente dans divers infedes. Je n'entrerai pas ici ans tous les détails dont ce fujet eft fufceptible j je me contenterai d'obferver que les antennes reiFemblent tantôt à un long hl fimple , tan- tôt à un fil compofé de nœuds dan^ toute fa louj^-.ieur ; que les unes font droites, les autres coudées ; qu'il y en a de chargées dans toute leur longueur fur les côtés , de dentelures ou longs poils, & que celles-là reliemblent à un peigne ou une plume; que les unes fe termment en pointe , les autres par un renflement , qu'on tijmme mafjl ; mais quelle que foit la forme des antennes, comme on ne voie fur la tite des autres animaux aucune pattie qui y reffemble, e'.les ne contribuent pas peu à faire remarquer les inledtes & à rendre leur forme particulière.

Plufieurs infeéles ont autour de la bou- che des appendices conformées comme les antennes : on les nomme par cette raifon ancennules ; on voit ajtour de la bouche de certains poillons des appendices à- peu -près femblables, mais les autres animaux n'en ont pas; au refte, les antennules font trop peu apparentes, elles manquent à trop d'inledes pour qu'on puiffe les compter au nombre des parties qu'on remarque & qui frappent au iîmple afpeét.

Les différences fenfibl ;s à la vue , entre les yeux des infeéles & ceux des autres ani- maux , la petiteffe de leur bouche, C,\ terme dans un très- grand nombre, la différence des lèvres dans ceux qui en onr, les antennes fur-tout , ces parties que les infeétes ont feuls & qui ne manquent à aucun , les appen- dices femblables aux cornes ou au bois des quadrupèdes , font donc autant de caufes dépeudainss des parties annexées à la tête,

DISCOURS

qai concourent à la bizarrerie apparente de forme dans les infeâ:es. Palfons aux parties dépendantes du corcelet & fendbles à la vue iiiiiple; ce (ont les aîles &: les pattes.

Les ailes font attachées une ou deux de cha- que côté du corcelet , près de fa furface fupé- rieure , & y tiennent par une bafe formée àc la réunion des différentes parties prin- cipales dont elles font compoféesj cette pofi- tion&: cette adhérence fontlesmêmtsque dans les oifeaux ; dans ces derniers animaux en qui les aîles répondent aux bras de Thomme & jiux extrémités antérieures des quadrupèdes j les aîlïs font compofées de trois portions , une près du corp:, qui eft la plus f> iifidé- rable, & par laquelle elles y font attachées, à laquelle les deux a.,tres aboutilTent & qui répond au bras , une moyenne qui répoi^.d n l'avant-bras , & une troitième plus petite que les deux autres, qui tient la place de ia main ; il eft aifé de remarquer dans les infedes qui phent leurs aîles j trois divifîons exprimées par les plis, elles répondent à cel- les de> aîles des oifeaux ^ ces mêmes divi- lîons fe remarquent auflî fur les nervures qui font le foutieii des aîles dans tous les infedes , & dans ceux qui les plient com- me dans ceux qui les portent toujours éten- dues. Mais ces rapports que découvre l'œil attentif, échappent au fimple afped, d'après lequel nous devons juger des aîles en ce moment : celles des oifeaux font couvertes «le plumes, qui en font une partie fi confi- tîérable qu'elles en paroifTent toutes compo- fées ; elles font proportionnées au volume du corps; elles ont toutes une forme à peu près fem'blable , iS: qui approche d'un triangle plus ou moins régulier ; enfin tous les oifeaux portent leurs aîles à découvert.

Les aîles d:s infeéles ne font qu'une f;m- plemembrane nue dms le plus grand nom- bre , couverte dans certains d'écaïUes ou de poulljère,fi l'on veut de plumes; mais de plumes ou d'écaillés, qui au fimple alped, n'ont aucune relTemblance avec de vraies plumes ou de vraies écailles, ôc n'en rap- pellent en rien l'idée ; les ailes ont une forme

irrégulière , rantôt triangulaire , comme iet aîles des oifeaux \ tanrôt étroite de devant en arrière & large fur les côtés ; tantôt elles ont des dimenfions diredement oppofées à celles-ci : elles font fouvent, échancrées ôc feftonnées fur leurs bords; mais de quelqu.e forme qu'elles foient^ elles n'ont pas de pio- portion avec le volume du corps ; en effet dans certains infedes dont le corps eft petit , comme les papillons, les aîles ont une éten- due qui patoîc démefurée; dans les abeilles, au contraire, lesbour «onSjdont le corps à un volume affez conlidérable , les aîles font courtes ôc furtout éttoites; enfin les coléop- tères ne portent pas ordinairement leurs aîles à découvert & feulement quand ils volent , ils les plient & les cachent dans les autres temps fous deux étuis membraneux , qu'on nomme élytres j qui font articulés avec le corcelet au-de(lus de l'origine des aîles & qui couvrent tour le dellus du ventre.

La ftrudure , la forme, le volume des aîles en raifon de celui du corps , les clytres font donc autant de rraits diftinélifs , très- frappans dans les infedes : ajout^Mis encore que les oifeaux n'ont que deux aîles , qu» beaucoup d'infeéles en ont quatre, & que fous chacune des aîles de ceux qui n'en ont que deux, qu'ils portent à nudjil y a un filet terminé par un bouton ; on nomme ce filet le balancier.

Les piîds diffèrent dans les infeéles pour le nombre & la pofition ; cependant on peut dire qu'en général , parce que c'eft la loi commune pour le nombre infiniment plus j grand , qu'ils font au nombre de fix , & j attachés trois de chaque côté, au-deffjus du : corcelet ; dans ceux en qui le nombre en eft j plus grand, ils font fixés le long du corps, j iur les côtes & fuivant prefque toute fon étndue. Ainfi le nombre &: la pofiiion des pieds , ou au milieu du corps , ou le long de toute fon étendue fournilleut déjà une différence bien remarquable entre les autres animaux & le'; infodes : ils paruilient rem- pans , & ils touchent prefque en effet le plan fur lequel ils marchent , quoique I leurs pieds foient fort longs , & le foient à

PRELIMINAIRE.

^]

proportion plus que ceux des autres ani- j maux; ce qui vient de ce qu'ils plient & cour- bent les unes fur les autres les porti>'ns don: ils font compofés : ajoutons que les pieds desinfeèles font grêles , qu'ils paroiirent d'une grolfeur égale dans toute leur longueur , & qu'ils font articulés latéralement avec le corps, au lieu d'être diri-^és en avant comme dans les autres au in?.uxj enfin au lieu d'une bafe, large & applatie par la furFace qui touche le fol , ils font terminés par un ou deux crochets déliés, aigus, ariués^ toutes ces différences font notables , faciles à fliifir à la vue& propres à Lire diftinguer les infedes ; mais malgré 1 ur nombre , malgré le carac- tère llngulier qu'elles impriment aux animaux en qui on les remarque, en ne s'en tenant pas à l'apparence , en examinant de près les pieds des infedles on trouve qu'ils ne dif- fèrent an fond de ceux des auties animaux que par leur nombre , la poruion , la lon- gueur des pièces dont ils font compofés , & la manière dont les pièces (ont relevées & couchées le long les unes des autres; que le nombre de ces pièces, leur difpofition ref- pe(Stive, leurs différences eiur'elles , leur ar- ticulation les unes avec les autres , leur ufage font les mêmes que dans les autres animaux- en effet les extrémités ou les pieds des ani- maux font compofés de crois portions , la cuifTe qui eft la plusgrolle,& qui s'articule avec le corps ; la jambe qui efl la plus lon- gue & qui eft pljcée au milieu; le pied, proprement dit , qui comprend le tarfe èv les doigts : le même nombre , la même difpo- fition, les mêmes proportions entre les pièces ont lieu pour les pieds des infeclss -, leur cuilTe eft plus groffe , plus courte , applatie, & déprimée fur les côtés comme dans les autres animaux; leur jambe eft la pièce du pied la plus longue , elle eft arrondie : leur pied , proprement du , eft divifé & les pièces lon- gues , giêles dont il eft formé répondent par leur divihon , leur longueur , leur forme aux doigts de la plupart des autres animaux \ maisce qui .ft plus encore à remarquer , entre l'extrémité de la jambe des infectes & les crochets qui terminent leur pied , font pla-

cées des pièces articulées , mobiles les unes fur les autres, Hexibles d'arrière en avant & fur les côtés ; elles répondent au tarfe ; & ce rapport a paru fi exaét à un des naturaliftes qui a le mieux obfervé les in- feétes , à M. Geoffroy , qu'il a donné à la réunion de ces pièces le nom de tarfe ; e^;- prellion qu'on n'avoir pas avant lui app'i- quéeaux inledlesjqu'il a compté le nombre des pièces & en a fait un des caradères prin- cipaux. Ainlî les pieds des infedes , qui au premier afped paroiffent fi différents de ceux des autres animaux j qui, à cet égard font (i propres à les faire reconnoître , ont au foni la même conformation , & ce qu'on n'avoic pas lieu de founçonner , ils fe rapprochent plus par la cont-ormation du tarfe des extré- mités de l'homme , de fa main & de fou pied , que les extrémités de tous les autres animaux ; ce rapprochement (?i ce rapport bien impoitans nous expliqren: . comme nous le développrrons plus au long ailleurs, pourquoi les infedes ont plus d'adreffe , exé- cutent plus de travaux & des travaux plus difficiles que les autres aniniaux.

Il y a peu de parties extérieures annexées au vsntre, & par conféquent nous avons peu de remarques à faire à cet égard ; il fufiira d'obferver que dans certains infedes il eft terminé ou par un filet plus ou moins long, comme dans les ichneumons , ou par un pro- longement applati , dr.it uu courbe , en kir- me d'épée ou de coutelas , comme dans les fauterelles. Les femelles feules ont un pareil ptolongerr.ent; c'eft un inftrument trai, chant & perforatif qui leur fert à ouvrir les fubf- taiices propres, à recevoir leurs œufs & à les y dépiifer : ce prolongement contribue ci'mme les autres traits à faue diftinguer Us ii:fcdes, dans lefquels on le remarque. 11 eft donc aifé de les reconnoître , comme nous venons le voir par un examen détaillé , par la forme & l'enfemble de leur corps entier ; par la configuration des parties ou membres qui y font annexées; & comme il ne faut qu'un coup d'ceil pour fiuir tous ces trait: diftinc- tifs , la (Impie infpedion futfit pout qu'on diftmgue & qu'on teconuoille les infedes en b ij

XiJ

DISCOURS

gé. éral ; mais ces traits ciradérifiiques & Jeur enfemble font encore fortifiés à la limple vue par un trait plus frappant que tous !e=; autres. Tous les animaux , excepté ceux qui nous occupent en ce moment, ont le corps couvert ou de poils , ou de plumes oiid"ccailles,au-deirousdefqae's eft une peau foiiple , molle, doiu ils lailfent appercevoir la fouplelFe & les ondulations; les inleéles n'ont pour tégument ou pour peau, qu'une membrane sèche , coriacée , fans fouplelle , nue ou couverte de poils rares , qu'on apper- çoit à peine & qui ne la cachent pas à la vue. Ce dernier trait ajoute à tous les au- tres, augmente la facilité oc la sûreté à diftin- guer& à reconnoître les infedesau feulafpedt; il eft même un des traits les plus frappans': il pourroit faire confondre les infeûes a. ec les cruflaccs , qui font des iiifedtes | our les iavans , & qui n'en font pas pour le com- mun des hommes ; mais il y a tant de dif- férences, des différences fi frappantes même à l'extcrieLu- , entre les uns &c les autres j qu'un ignorant ne s'y méprend pasj !k que pour héfiter ou être embarraflc à prononcer, il faut avoir étudié & être inftruit ; car le favant eft celui qui fe décide , qui pro- nonce toujours ;e dernier.

Je crois avoir fuffifamment démontré que la forme des infeétes , obfervée attentive- ment & comparée à celle des autres animaux eft au fond la même ; mais que des diffé- rences frappantes au premier coup - d'ail , font la caufe qui fait en général diftinguer & reconnoître fans héfiter les infedles , par le commun des hommes à la feule infpec- jion.

Si nous récapitulons les différences effen- tielles qui nous ont occupés , nous rrouve- rons que ce font l.i petitelfe de la tête , fa pofiiion enfoncée, fon peu de mouvement, le manque de cou , le peu de volume du «orcelet , fa forme cylindrique, fa manière d'être joint par un lilet avec le ventre ; l'ap- planlfement de celui ci en delfus^ en delfous; par rpport aux parties annexées aux trois jl^rir.cipales port ons du corps; l'opacité, l'im- cic'biiité des yeux , le manque de paupiètes ,

la petirelTe ou la forme de la bouche, l'np- plaridement & la polition horizontale des rnachoires , les antennes , les appendices , appartenans à la tête ou au corceler qui OfîC du rapport par la forme avec les cornes, ou le bois de certains animaux -, le nombre , l.t fltuation des pieds \ leur articulation tranf- veifale avec le corps; leur direclionplus fur le côté qu'en avanr; enforte que le mouve- ment progreflif direét , ou la marche a lieu par la tangente entre deux puillances oppo- fées; la longueur , la ténuité des pièces doiic les pattes font formées; !a flexion de ces pièces; leur inclinaifon les unes fur les autres ; les crochets qui terminent le pied ;la forme ar- quée de ces crochets; l'amplitude des ailes; leur difproportion avec le refte du corps ; leur forme , knir fubilance membraneufe ; enfin, la féchereffe , l'aridité & la nudité du ceft ou tégument , qui couvre tout le corps «Se les membres des infedes.

§. H.

De l'orgamfdtïon des Infectes.

Nous venons de voir que les infe£tes, avec les apparences, à la fîmple infpsélion, d'une forme très- différente de celle des autres ani- maux , quand on les examine avec attntion, préfentent au fond dans tout ce qui eft ef- fentiel, & ce qui conflitue la bafe du mé- chanifme une configuration qui ne leur eft pas particulière; même divifion du corps en trois portions , mêmes parties , conformées de même , annexées à ces trois portions j les infedles ne font donc pas, quant à la forme j les fuites d'un plan effentieilement différent du plan tracé pour les autres ani- maux.

Si de l'extérieur nous palfons s rintcrieur, nous trouverons entre les infedes & les au- tres animaux des diff'érences au dedans, plus impof.uites encore que celles que nous avons obfervées audehors ; mais fi nous procédons de même par la voie de la camparaifon , !a feule par laquelle nous puiftlons décou- vrir la vérité & parvenir à porter un juge-

P R É L I Âî I N A 1 R E.

nient certniii , nous recuiinourons que cle même, que la configuration ou la forme ex- téiieure, l'organiratioii des infefles ne di/îère pas eireiuieHemeiu de celle des autres ani- maux , qu'elle eft le produit d'un mcms pinn. Pour procéder avec ordre & clarté, s'il m'elt podîbie, dans le travail aiïez pénible qu'exige l'article que j'entreprends , je diviferai l'exif- tence des animaux en trois tems ; X'exijlence ncluellc ou du niomentj Ve.xijlence yro longée ou confervéc de momens en momens jufqu'à un terme qui eft la mort. Ces deux pre- miers genres d'exiftence ne font relatifs qu'aux individus. J'appelle le troifième genre d'exif- tence , Vexif.cice perpétuée , ou éienduf dans l'avenir j il eft relatif à l'individu & à l'ef- pèce. Je diftinguerai quelles font les fonc- tions dont chacun de ces trois genres d'exif tence eft le rcfult.it , (Se je comparerai dans les differens animaux les organes qui fervent à ces fondions.

Si l'on rcflcchit (ur l'exiftence ou la durée de la vie , on trouve qu'elle ne comprend que trois époques , être formé & naître , exifler & fe reproduire : la formation , la naif- fance & la reproduélion ont des rapports fi grands & fi intimes , que ces trois objets peuveiU être compris daiis le même article j l'exiftence individuelle fe rapporte ou au moment adluel , ou aux inft.ins lubfcquens & prochair.s; l'exiftence dans l'avenir ou la reprodudion n'établit pas la perpétuité de l'individu j mais de l'efpèce , & elle dépend cependant de lui ; elle fait partie de fon exiftence ; elle en eft une des époques; elle eft relative à l'individu Se à fa poftcrité. La durée de la vie ou l'exiftence n'embraffe donc que trois époques, naître, exifter, fe repro ' duire Je commencerai par traiter de l'exif- tence aduelle, parce qn'il me femble qu'on doit traiter dans le même article de la fur mation , de la naiiFance & de la reproduc- tion , & qu'il faut exifter avant de fe repro- duire j & encore parce que l'exiftence ac- tuelle fuppofe une organifation complète , achevée , parfaite , dont les autres époques de la vie font le produit.

Les fondions dont l'exiftence r.dueiie eft le

XI ij

réfultat , font VirrltalUite j Vacllcn du cerveau, la circulation & la rcjpiration. Les organes immédiats de ces quatre fonctions font les fihrcs ou la fibre en général , le cerveau ^ le cœur & les poumons ; chacuns de ces organes o;n des dépendances qui concourent fecon- dairement à leur adion , &' dont il fera parlé en traitant de celle de chaque organe en particulier. Si je n'avois à écrire que pour dts leûeurs qui fe font appliqués à l'étude de l'économie animale , je n'aurois qu'à oblerver les différences remarquables dans l?s infedes ; mais devant avoir égard à ceux i qui l'ccoiiomie animale eft inconnue , je fu!s forcé , pour qu'ils me comprennent de tracer d'abord un précis de 1 organifation àss animaux en général , de comparer enfuite celle des infedes à ce précis , pouc indiquer les différences j cette néceftité à laquelle me contraint la nature de l'ouvrage , me fervira cj'excule auprès de ceux pour qui j'aurai dit des chofes inutiles , Se que j'eulîe fuppofées , fans en parler, fi je n'avois xravaillé que pour eux.

De la fibre & de l'irrïtabillté.

Quelles que foient les partiesdes animaux , quelle qu'en foit la fttudure , la denfité ou la mollelfe, on les réduit toutes en lesdivifanr, ou par le moyen d'un inftrument , ou par la macération, foit dans l'eau , foit dans un fluide convenable à une partie élémentaire qu'on nomme jÇ3rf. C'eft un fil long & délié dans lequel on confidcre fon étendue en longueur beaucoup plus que fon étendue en largeur; pîufieurs fibres réunies & jointes fuivant leur longueur les unes aux autres , ou par un laftis d'une texture lui - iTjême fibreux , & qu'on liomme tififia cellulaire, ou par une lubftance glatineufe , à laquelle on donne y dans quelques cas , comme en parlant des os, le nom de_/ài: , forment les membranes ; la réunion de celles ci les vailfeaux, & les vaifTeaux cuTipofent les différentes parties. Elles font molles & fouples fi la réunion des fibres j des membranes & celle des vaif- feaux eft lâche & peu ferrée j les parties font dures & roides dans le cas oppofé , & à pro-

DISCOURS

portion que !es fibres, les membranes, les vailjeaiix font plus rnprochcs , joiius plus iiKimemeiu par un tiiru cellulaire plus coure, plus ferré j plus denfe , ou par un fuc plus confiftain, plus agglurinatit".

Il n'eft point de parties du corps des infec- tes qu'on ne puilfe , par un procédé conve- nable , réduire en fibres élémentaires com- me toutes les parties des autres animaux; leur corps a donc pour bafe , pour partie couftituante . le même élément. Cette pre- niière notion étant indiquée, palions à l'irri- tabilité.

C'eft une propriété commune à tous les corps orgauilés d'être compofés de fibres auxquelles on peut réduire routes leurs par- ties, (Se de la réunion defquelles leur en(em- ble eft formé ; cette propriété appartient aux végétaux comme aux animaux ; mais la fibre végétale eft inerte, c'eft -à- dire , qu'elle ne feiit pas, qu'elle ne réagit point, ne tait pas d'etl'ort , & n'entre pas eii mou- vement à l'occafion du contaét d'une fubftance étrangcte; la fibre animale au contraire ne f^uuoir, au moins étant vivante , être touchée fans feiitir j fans réagir , faire effort & entrer en mouvement; fi elle eft libre, ellefe retire fur elle-même & fe racourcit; fi elle eft retenue par fes extrémités , elle entre en ofcillation. C'eft cette proptiété que j'appelle irnrah'iliic\ & l'irritabilité me paroît être le caradcre propre & diftindif de la fibre ani- male , par conféquenc des animaux dont la fibre eft l'élément. Non-feulement les inletles ne donnent pas moins d'indices d'irritabilité dans tout leur enfemble que les autres ani- maux, mais leiîrs parties, leurs fibres , fépa- técs du refte du corps, confetvent pluslong- tems la propriété de fe racourcir , d'entrer eu mouvement, ou l'irritabilité; elle eft donc en eux, comme dans les autres animanxj le principe ptimitit de toute action, le pre- mier agent & la bafe de l'exiftence , 6c la leur paroît en cela plus folide, plus durable} ce n'eft pas l'efFec d'une propriété particu- liête à leur fibre, mais celui du concours de plufieurs caafes dont nous pailerons bien-

Après avoir expofé ce qu'on doit entendre par \a. fibre &: l'i/nrj/'i/.re , Je pdfe à l'adion de l'irritabilité fur la fibre, & à la réaction ou mouvement de la fibre , pour en di duire le mécanifine & l'explication des fonélious.

Du cerveau & des parties qui en tirent leur origine.

Le cerveau eft un vifcère mou , vafculaire, pulpeux , compoié de deux lubilances j l'une grile , l'autre blanche , qu'on nomme , la première, fubfiance corticale, ou fubfiance ç.rife, parce qu'elle eft à l'extérieur , & que la leconde dénomination exprime fa couleur. La féconde fubftance eft appellée midullaire\ le cerveau eftdivifé à fa furtace, &, jufqu'en- viron le tiers de fa profondeur, en deux feg- mens auxquels on donne le nom de lobes , réuni à fa bafe en une feule malfe , placé dans la cavité du ctâne qui le loutient, l'entoure , le défend du choc iSc de la pref- fion des corps extérieurs qui peuvent heurter la tête ou la comprimer.

Dans la cavité du ciàne des infeétes^eft placé un vifcère fi femblable au cerveau par toutes les circonftances énoncées, que les anatomiftes n'ont pas héfité à lui en donner le nom. Quant aux deux hémifphères, ou à la croûte d'une (tibftance membraneufe , qui couvrent la tête des infectes, on ne peut leur refufer le nom de crâne.

Au deiroiis deslobes du cerveau, en arrière, eft fitué un vifcère analogue au cerveau par fa flruéture, également divifé en deux lobes, mais qui a plus de coufiftance , & dont les deux fubftanccs , la grifeôi la médullaire , font difpoféesdans un ordreoppofé à celui qu'elles tiennent dans le cerveau. On donne à ce vifcère le nom de cervelet ; il n'a pas encore été obfervé dans les infeétes ; mais ce vifcère, de même nature que le cerveau, a aufti les mêmes ufages, quoiqu'il exerce Ion aélioii fur des parties qui ne (ont pas les mêmes: cette dirtérence n'en eft donc qu'apparen- te , & ne change rien au tond du méca- nifme , fi !e cerveau & fes dépendances, dont nous allons parler , fuppléeiu dans les

PRÉLIMINAIRE.

înfedes, comme il eft très-probable au cer- velet , ôc fuftifeiit aux fondions des deux vifcères : d'ailleurs, le cerveau paraît, dans les p/ands animaux j deftiné tant aux Fondtiuns mécaniques particulicrtîment , qu'à celles dont les facultés font le réfultat , telles que la réminifcence , la combinaifon, la compa- raifon des fenfatioiis, un jugement Se une action déterminés par leur imprellion. Mais les facultés font moins nombreufes, elles font plus bornées dans les infeéles ; ils n'a- voient donc pas befoin , pour l'exercice de de leurs fondions, de deux vifcères diftmils ; le même peut fuffire aux mouvemens mé- caniques , à la perception des fenfations de au ré(ulcat borné de ceite perception. C'eft peut-t-cre par la raifon du peu de facultés des infectes que leur cerveau eft , même à propor- tion, plus petit que celui des autresanimaux. Nous allons voir que ce vifcère s'étend dans les iiifedes dans toute la longueur de leur corps ; que de dittance en diftance il paroît fe re- iiouveller &: fe multiplier : cV-ftune nouvelle raifon p^ur qu'il n'ait pas befoin d'un volume aulli ample dans un point déterminé, d'être aidé par un fécond vifcère , &: pour qu'il futfife feul aux différentes fondions.

Les parties dépendantes du cerveau j ou qui en tirent leur origine, & qui concourent à fon adion j font i*'. la moelle alongée ; c'eft un prolongement de la fubilance mé- dullaire , qui palfe & qui fort de la tcce, a la bafe du crâne en arrière, par une ouver- ture qu'on nomme trou occipatal ; z^ . la moclU épinitre qui occupe toute la cavité de la colonne vertébrale , depuis l'occiput ou le derrière de la tète , à fa bafe , jufqu'à l'extré- mité de Cette même colonne j & qui eft elle-même un prolongciment de la moelle alongce _, & par conftquent de la lubftance du ceri.eau, ^^ . les nerfs qui tirent leur origine ou du cerveau & du cervelet, ,6i nai,>cnt par des tious de !a bafe du crâne , ou qui palfcnt de la moelle épin:ère, &; qui fortent de la colonne vertébrale entre cha- cune des pièces, ou des os Jont cette colonne eft compof.e. Les nerfs font blancs, pul- peux j on n'a pas encore bien déterminé fi ils

font pleins ou creux ; ils font beaucoup plus pulpeux à leur naillaiice , & ils deviennent plus folides à mefure qu'ils i'alongeptj ils font adhcreiites les uns aux autres à leur ori- gine, ils y forment un cordon ou faifceau tormé de cordonv plus petits qui fe touchent, & que lie un tilfu cellulaire affez lâche ; ils naillent toujours , pat paire, du cerveau ou de la moelle ép'nière, c'elVà-dire, qu'il fore toujours de chaque côté, ou du cerveau , ou de la colonne vertébrale , un nctf pareil , dont l'un fuit d dircdion à droiie , l'autre à g.iuche : Ls nerfs fe propagent du point de leur origine à toures les parties du corps. Se viennent fe terminer à la furface & .i celle des différentes parties donr ils pénètrent le tiffu : comme ils iont nombreux , rrés-dif- féminés, ils forment eux-mêmes une portion confidérable des différentes parties j ils ne (e diftribuent pasen jettant des rameaux qui naif- ieiu d'un tronc commun, maisen feleparant les uns des autres , en forte que le faifceau qu'un nerf fermoir fou origine , devient plus petit à mefure qu'il s'en éloigne, & finit par un filet délié à peine perceptible; c'eft ce filet qui s'étend jufqu'à lextrémitédes diftérentes par- ties, & qui à la furface de la peau s'épa- nouit feus répidetme en forme de houpe plufieursde ces ncifs ou filets , détachés d'un même tronc, fe rencontrent en difïérens en- droits, fe croifenr , s'entrelacent dans leur rtajet , & forment des efpèces de nœuds qu'on nomme ganglions; pluheurs nerfs , fé- parés de différentes paires ou de différens. troncs , fe rencontrent & fe joignent fouvent à des diftances très-éloignées de leur origine \ !a jondion de ces nerfs établit ce qu'on ap- pelle A; 75-' m/' i3r/;/î,c"eft-à-dire,comm uni cation entre les troncs qui ont donné nailfanceaux filets ou nerfs qui fe font rencontrés, tou- chés Se joints, & cnrre les parties auxquelles les auttes nerfs, émanés de ces mêmes troncs, fe diftribuent; il en réfulte que les impref- fions qui ont lieu fur une des parties qui reçoit des nerfs du tronc qui a correfpon- dance avec un autre de la manière qui vient d'être dir, participent de l'impreffion exercée fur la partie qui lui correfpoiid par la corn-

XV5

DISCOURS

niiiiiicatiandes nerfs , quoique cette impref- fion ait fou vent lien fur une partie très- éloignée, ne foie point immédiate & pure- ment fecondaire ; c'efc 'par cette communica tion qu'l y a fympathie ou correfpondance entre les organes de !a génération & csux de II voix dans les mâles ^ entre la matrice & les mamelles i l'eftomac , la matrice , les reins , & entre l'eftomac & un grand nom- bre d'autres organes, parce que ce vilcère a beaucoup de communications ou de corref- pondances j)ar le moyen des nerh.

De l'aâidn du cervedu Gr de celle des parties auxquelles il donne naijjanee.

Si l'on comprime le cerveau , l'irritabi lire , le mouvement, les fenfations, l'aélion vitale , font diminués dans toute l'habitude du corps , tant que la prellîon a lieu ; ces foiiclions fe rétablillent quand la preOîon celFe i l'effet de la compreiTion eft princi- palement marqué fur les parties de la tête, parce que les aerfs qui s'y dillnbuent tirent leur origine du cerveau ; la faculté de for- mer des fons, l'ouie & la vue, demeurent fufpendus , & l'alloupiirement , le fommeit fuccèdentàlapreflion. Se ontlieu tant qu'elle dure i cependant les mouvemens purement méchaniques , tels que ceux des battemens ducceur, de la circulation, de la refpiration, continuent -, fi Ton blelTe le cerveau, au lieu de le comprimer , toutes les fonâions, en général , font troublées dans toute Fliabitude du corps , & ne fe rétab'iUc'nt que quand la nature a réparé le défordre occa'.ionné dans ce vifcère •, cependant une partie de fa malle peut être enlevée ou détruite par une caufe quelconque, fans que ce foie une caufe de mort; maiî elle a heu auflî-tôc qu'on blelîe grièvement j le cervelet, la moelle alongée ou la moelle épinière, même féparément.

Si l'on comprime la moelle épinière ou les neifs, foie à leur origine, foie dans le cours de leur trajet , la fenfation , le mou- vement , l'aélion vitale , font diminués & demeurent fufpendus dans les parties fituées au dglfous de la preifion , ou qui ret^oivent

des nerfs qui prennent nailîance au-deflous ; ces mêmes fondions font détruites , fi, au lieu de comprimer les nerfs , on les coupe.

Tirons des faits qui viennent d'être rap- portés , les conféquences qu'ils préfentent ; puifque la prellîon du cerveau,, celle ducer- veler, de la moelle épinière , des nerfs ^ in- térelfencrirritabilité, les fenlations, le mou- vement , l'adion vit.ile , que ces fondions font dmiinuées tant que la predion a lieu , ("s: qu'elles fe rerabliifent quand elle celFe ; [luifqiie la léfion grave de ces parties détruic les fondions , Ik caufe la mort, ces tondions émanent donc de ces mêmes parties ; leur principe & pat conféquent celui de la vie, y réfide , en émane ik. fe propage à toute l'habirude di corps auquel elles le commu- niquent ; cependant la prellion ou les léfions du cerveau , afFedent toutes les parties, & principalement celle de la tête , parce que les autres agens qui concourent aux mêmes fondions, (ont une émanation du cerveau, oc qu'il ne peut être atfeilé fans que les agens qui en émanent ne s'en relïentent ; mais le trouble eft p!us grand dans les parties de la tête, pir la raifon, déjà rapportée , parce que les nerfs quife dillribuent à ces parties, naiilent du cerveau j& , au contraire, une grande partie de ce vifcère peut être détruite fans que les mouvemens méchaniques & la vie celfent , parce que les mouvemens mécha- niques dépendent plus de l'inBuxde lamaëlle épinière que de celui du cerveau.

Puifque par la prellion ou la léfion du cerveau, les fenfations ne font que fufpen- dues ou troublées dans ieur exercice , & que les mouvemens mécaniques de la circulation, de la refpiration continuent , le cerveau contribue donc moins à ces mouvemens qu'aux fenlations ; & puilqu'au contraire la léfion de la moelle alongée , ou de la moelle épi- nière , arrête ftibitement les mouvemens méchaniques, & caufe la morc,c'efl; donc de ces parties qu'émane plus immédiatement le principe de ces mouvemens , 6s: par confé- quent celui de la vie.

Si on comprime ou li l'on coupe les nerfs dans un point de leur trajet , l'exercice

des

PRELIMINAIRE,

XVIJ

tîes fonctions efl rufpenda , ou elles font détruites dans les parties fituces aa-delfous de la ureiîîou ou de la fedion : c'eft donc par reiureaiife des nerfs que le printipe des fouiflions elt comniuniqué des fourcts donc il émane aux différentes parties ; il ne rélîde pas dans les nerfs , ils n'en font que les con- duclsurs _, puifque les mêmes efters, ou les mêmes dcfordres , auroient eu lieu fi le prin- cipe des fondions avoir été troublé ou arrêté dans Tes fources , quoique les nerfs fullént demeurés intads.

Il fuit de tout ce qui vient d'être die j 1°. que le principe de l'irritabilité , des itn- fations , du mouvement &: de la vie , émane du cerveau , du cervelet , de la moc'lle alon- gée, &c de la moelle épinière \, -x° . que ce principe eft tranfmis par le moyen S\ l'en- tremife des nerfs aux différences parties du corps, &: dans toute fon habitude ou éten- due; 3°. que l'adion du cerveau eft générale, parcequeles autcesagensen émanent ; 4''.que le principe de l'irritabilité, celai des mou- vemens mécaniques, tels que la contraction du cœur , la circulation , la refpiration , émane principalement du cerve'ec , &; de la moelle épinière ^ que le cerveau ne concourt qu'accidentellement a l'action de ce principe , tandis que c'eft de lui au contraire qu'émane immédiatement celui des fenfations.

Mais quel eft ce pri'icipe de l'irritabilité, du mouvement , des fenfations , de la vie , dont nous venons de reconnoître les fources? Je ne crois pas que perfonne puilfe répondre à cette queftion d'une manière fatisfaifante , & autrement que par des Iiypothèfes. Les uns ont dit que c'eft un fluide fubtil , féparé du iang par les agens que nous avons nommés; ils lui ont donné les noms de fiuide vital, d'ejprus animaux. Mais ce fluide n'a jamais été vu , il n'a jamais été recueilli , il n'a jamais frapé aucun de nos fens , & fon exiftence n'a jamais été prouvée que par fon aptitude à expliquer les elTets donc on le fup- pofe le principe , jamais phyfiquement , je veux dire en le rendant fenfible à nos fens; fon exiften-re n'eft donc qu'hypothétique , & par conféquent elle n'eft pas prouvée. D'autres

Hijîoire Naturelle InfdUs , Tome I,

ont cru reconnoître le principe que nous cherchons dans la matière de la lumière , celle du feu , de l'éledricité , &c. , attirée apparemment & tranfmife par le cerveau , &CC. Je n'entrerai point dans le détail de ces différens fyftèmes qu'on peut rendre plus ou moins vraifemblables, mais cja'oii ne fauroic démontrer j & qui ne peuvent par conféquent réfoudre la queftiou. Il nous fufKc qu'un prin- cipe émane du cerveau , de la moelle cpi- nière, &'c., qu'il foie tranfmis par les nerh, qu'il communique la vie aux parties qui le reçoivent ; iSc j'appelle ce principe irn:dlilite\ fans favoir ce qui le produit , ce donc il dé- pend, ce qui en eft la caufe , comment il agit : ainfi on admet en Phylique VaCli action comme principe , fans en connoîtrc ni la, caufe, ni favoir par quel moyen elle agit fur la matière.

Examen du cerveau ^ des parties qui en dé^ pendent , & qui concourent à fon action : comparaijbn des infectes avec les autres animaux.

Le cerveau , ifolé dans les animaux , ren- fermé dans le crâne, dont la cavité le borne <^' le circonfcrit, fe propage cependant ea quetque forte de cette cavité à l'extrémité du corps par le prolongement de fa fubftance; elle fort du crâne par le trou occipital , on la nomme moelle alongée , &c du trou occi- pital, e'Ie s'étend jufqu'au bas du facrum j on lui donne dans ce trajet le nom de moelle épinière. Mais le cerveau contient deux fubf- tances , la corticale & la médullaire; & le prolongement dont nous parlons , n'eft formé que de la dernière; on ne peut donc dire que le cerveau fe propage compIetrement& dans Çon entier du crâne à l'extrémité du corps ; mais dans les infeéles on n'apperçoit pas de différence entre le cerveau renfermé dans le crâne & l'expanfion qu'il forme juf- qu'à l'extrémité du corps ; dans ces animaux le cerveau s'étend de la tête à la queue fans qu'on obferve de différence dans fa fubftance, il forme de diftance en diftance , & félonie nombre des anneaux donc le corps de l'infeds

G

XVll)

DISCOURS

eft compofé, des efpèces de nœuds ou de | oanalions, cous fembhibles, unis & diftinds par des écringlemens : ces nœuds ont été regar- dés par Malpighi , Swammerdam & les plus habiles anatomilles , comme autant de cer- veaux , leur enfemble comme une fuite , une férié de vilcère.

Dans les autres animaux , l'expanfion ou prolongement du cerveau, la moelle épi- iiière s'étend à travers la cavité de la colonne vertébrale audelfus des vifcères, & plus du côté de la furface fupérieure que de la fur- face inférieure du corps : la férié des cer- veaux , ou le prolongement du cerveau , fuit une dire£tion oppofce dans les infedesj à la lortie du crâne le cerveau fe dirige en en bas , fe plonge fous les vifcères, & s'étend jiifqu'à l'extrémité du corps fur le milieu du tégument qui en couvre la furface inférieure.

il ne faut pas cbercher dans les infeftes la moelle alongée &c la moelle épinière : puif- que ces deux fubftances font une expai}fion du cerveau, & que ce vifcère s'étend dans fon complète fon entier de la tête à la queue, }a moelle alongée &i la moelle épinière font implicitement comprifes dans fon expanfion, & ont la même extenllon que lui ; quant à h diredion^ on ne volt pas ce qu'elle pour rolt changer au mécanilme. Il y a donc jufqu'ici une conformité réelle au fond entre les infeéies & les autres animaux, quoiqu'il y a;t en apparence une très grande diffé- rence.

Il eft difficile de découvrir & de iuivre les nerfs dans tous les animaux: leur ténuité send la chofe beaucoup plus difficile dans les infeftes fi petits , en comparaifon des autres animaux; aulîi leurs nerfs ont-ils jufqu'd pu-fcnc été peu reconnus, fuivis& décrits^ il faut excepter les nerfs qui naiilent du cer- veau contenu dans le crânej \h font en gé- néral , & dans les infedes comme dans les autres animaux , moins diiîtcilesà découvrir ; ils ic ditltibuenc aux parties de la tcte , iS,: Isî plus apparens, par leur volume, font les nerfs optiques qiti fc dillribuent aux yeux; ctsneifs tbnt dans les iiittdtes les feuls que

fournilfe le cerveau proprement dit, ou fa portion contenue dans le crâne: ce font du moins les feuls qu'on ait reconnus jufqy'à préfent \ mais leur volume , la facilité de les reconnoître, leur diflribution & leurs li- mites à des organes faifant partie de la tête , toutes ces circonlfances font auaiu de rap- ports avec les autres animaux.

On ne fatiroic déterminer, d'après l'inf- pedion dont^ le témoignage feul ne permet pas de douter, le noiwbre des nerfs qui naif- fent des nœuds qui forment le long du corps une fuite de cerveaux : on ne peut de même rien alfurer lur la m.nicre donc ils fc propa- gent ^ on reconnoît des filets qui, par leur llrudure , leur origine, leur expanfion, pa- roilîenc être des uerfs, mais on ntn n'eft pas certain , parce qu'on ne peut comparer allez ces hlets dans toutes les circonltances avec les nerfs des grands animaux : ce- pendant la flruéture pareille du cerveau ^ fon extenfion , ou immédiate S< par lui-mê- me , ou médiate & par le prolongement d'une partie de fa fubftance du crâne à l'extrémité du corps, la nailfance des nerfs du cerveau dans les infectes & dans les autres animaux , & dans les derniers du prolongement d'une de fes fublfances , ne permettent guères de douterqu'il ne nailTe des nerfs de la férié des cerveaux le long du corps des infedes ; la conformité dans l'exécution des fondions fortifie cette vraifernblance , & l'analogie la prouve en quelque forte, force de l'udmet- tre comme: un principe de l'organifr.tion des infedes jufqu'à ce qu'on ait démontré le contraire d'après Tinlpeition.

Nous conclurons donc qu'il y a confor- mité entre les infeéles & les autres animaux par rapport au cetveau , aux parties qui en dépendent (Se qui concourent à fes tondions : mais les différences que nous avons remar- quées, nous fournilienc deux confcqucnces qui en font une fuite.

i". La fubffance corticale ne fe prolonge pas dans les grands animaux hors du cer- veau ; Ci vifcère, augnienté de cette lubf- cance toute réunie dans le crâne, a beaucoup plus de volunne à proportion dans les autres

PRÉLIMINAIRE

animaux que dans les infettes: ceux-ci ont moins de facultés que les autres animaux ; les nerh qui Ibrcenc du crâne ne fe dillri buent qu'à la tcce , qui paroît être le Jjège des fiicultés : il n'émane du cerveau propre- ment die dans les infectes, que deux jierfi qui fe diftribiient aux yeux j &c la vue , comme nous nous en affurerons par la fuite, eft le fens dominant des infedes : la viiioji eft la première , la plus étendue de leurs fa- cultés; la fuite ou férié des cerveaux qui répond dans les infettes à la moelle épi- iiière dans les grands anitnaux a , en pro- portion du cerveau proprement die des in- iedes , beaucoup plus de volume que la moelle épinière n'en a en proportion du cerveau; c'eft de la moelle épinière dans les grands animaux, &: très probablement delà férié des cerveaux dans les infeéles j que nailTent les nerfs qui fervent aux mouvemens purement mécaniques : ces différentes confidé- rations ne préfentent- elles pas autant d'induc- tions qui portent à penfer quec'clldu cerveau , & fpécialement de la lubftance corticale, qu'émare ce qu'il y a de mécanique dans les facultés, dont le principe qui ell au-delà nous ell inconnu.

2°. On ne peut intercepter &: détruire, fans caufer à l'indanc la mort , la commu- nication entre le cerveau STla moelle épi- nière , par la lélion grave de celle- ci ou fa feélion ; n'ell-ce pas une preuve qu'elle reçoit une émanation du cerveau , que la fubftance corticale, dont elle eft privée, contribue à cette émanation, & que fon influx ell né- celTaire pour les mouvemens purement mé- caniques?

3". Dans les infeiles une fuire de cer- veaux complets , diftindts, indépendans les uns des autres , s'écend tout le long du corps i de vient qu'on peut couper tranfverfale- ment les infeétes , les divifer en autant de portions qu'il enrre d'anneaux & de cerveaux dans la compolition de leur corps , fans que les parties féparées perdent l'exercice des mouvemens mécaniques , & celles en qui réfidentdes fens particuliers , comme lavue_, l'exercice même de ces fens , parce que

chaque portion contient trn cerveau complet, &: que c'eft du cerveau qu'émane le principe du mouvenieiic & des 'l-nfations. Mais le cerveau ne peut ctre léfé à un point grave dans les autres animaux , ou fa communica- tion avec la moelle épinière interceptée, fans que la mort n'en foir une fuite , parce que le cerveau eft ifolé dans les grands ani- maux , qu'ils n'en n'ont qu'un, &: que la moelle épinière n'en ell qu'une dépendance incomplète incapable de le fuppléer.

De la circulation féconde desfonclions quifcr- venc à l'cxiflcnce acluelk.

Le corps des animaux eft comnofé de fo- lides & de fluides : les folides le font de vailfeaux , ou du moins ils en contiennent rous de plus ou moins amples , plus ou moins apparens, qui font la plus grande partie de leur totalité; ils fervent à conte- nir les fluides, & à leur donner paffage; ceux-ci font, comme les foliJeSj de diffé- rente nature ; réunis &: confondus enfemble , ils forment le fluide le plus abondant, celui qui eft généralement répandu dans toute l'Jia- bitude du corps , .Se qui eft la fource de io\\% les autres fluides : ils en font féparésen paf- fant à travers des couloirs deftinés à eut ufage. On appelle fang le fluide qui réfulte de la réunion de tous lesaures, &: qui ea eft la fource , qui les rallemble ; il cu'culc fans celle du centre du corps à la circon- lérence^ & de celle ci au centre à travers des vailfeaux qui s'étendent dans toute l'habitude du corps : on les nomme vaijfeauxfannums; les autres fluides, féparés du fang par des couloirs qu'il traverfe , coulent dans des vaif - féaux particuliers. Ce -mouvement continuel du fang du centre à la circonférence, & de celle-ci au centre, eft ce qu'on appelle la circulation. Le fang , en palfant à tr.-.vers les différentes parties, y porre la nourriture, les entretient , fournit à leurs b;forns refpec- tifs par le moyen des vailfeaux , comme l'in- flux du cerveau communique aux différentes parties le principe de l'irritabilité par l'in- termède des nerfs; cette importante fonctiouj cij

D 1 s C 0 U K s

la circulation du fang, commence avec la vie &c ne celfe qu'avec elle, parce que le fang contenant toiues lei humeurs , aiiffitôt qu'il traverfe toutes les parties , il fournit par- tout aux bcfoins, <?>; qu'aufll-tôt qu'il ne cir- cule plus , la fource qui founût aux befoins eft tarie par-tout: ainfi, en traverfant le cer veau , il lui fournit le principe de l'irritabi- lité que le cerveau communique à toutes les parties , & qui efl: la première condition né- celfaire pour la vie; mais aufli-tôt qu'il n'y circule plus, la fource de l'irritabilité eft tarie, & la vie celfe.

Après cet apperçu fur la circulation , exa- minons, 1°. les infectes ont du fang; i'^ . (\ leur fang circule^ 3°. s'il contient différen- tes humeurs qui en font extraites à mefure qu'il circule; 4". enfin, quels (ont les parties qui fervent à la circulation.

î*. Si l'on ne devoir appeller /77/7jC' qu'un fluide coloré en rouge, il s'enfuivroit que les infectes n'ont pas de fangj leurs vaiffeaux aïe contiennent aucun fluide qui leur appar- tienne, qui faite partie de leur conftitution &c qui foie de cette couleur. Cependant il atrive qu'en ccrafant certains infedes, ou certaines parties de quelques-uns, on expri me des parties ccrafées une humeur rouge , &^ quelquefois de véritable fanp : par exem- ple , la tête de la plupart des mouches colore en rouge le plan lur lequel on Técrafe, & il en arrive autant fi c'ell le corps des cou- fiDSp Dans le premier cas , la liqueur colo- rante n'eft pas du fang, mais une humeur qui couvroit la futface interne de la cornée j & qui fervoit à la vifion j dans le fécond cas, c'eft vraiment du fang, mais non pas celui des coudns; il ne leur appartient que comme aliment; c'eft le fang dont ils s'é- loient noutiis , & qu'ils avoient pompé pir leur piquure des vailFeaux de quelque ani- mai.

Ce défaut de fluide coloré en rouge dans les infeftes, n'eft pas une raifon de croire qu'ils n'ont pas de fang, parce que ce n'eft pas de la couleur que dépend la nature de ce fluide , mais de fa circulation du centre

à la circonférence , de fon retour de celle-ci au centre, de fa propriété de fournir dans fon trajet à la fecréciin des différentes hu- meurs, d'en être la fource, de les réunir toutes , de porter la nourriture dans les difté- rentes parties j^' de fubvenir à leurs befoins. On trouve & on fuit dans les infetSles le cours d'un pareil fluide , comme nous allons le prouver plus en détail en traitant des organes de la circulation. Les infeéles ont donc du fang , mais le leur eft limpide &c ordinairement fans couleur.

z°. Le fang des infedes circule - t- il ? 3°. Contient-il différentes humeurs qui en font extraites à mefure qu'il circule ? On n'a pas fait par rapport auxinfecles, & il feroit fort difficile de taire les expériences, qui, ayant eu lieu par rapport aux autres ani- maux , ont prouvé que leur fang circule : mais puifqu'il y a dans les infedes & les autres animaux le même appareil d'organes , de vailTeaux qui fervent à la circulation , ou un appareil correfpoiidant , comme nous Tal- ions voir , il eft infiniment probable que leur fang circule; il ne Teft pas moins, 6c il eft en quelque façon prouvé que leur fang fournit dans ion coûts à la fecrétion de leurs différentes humeurs ; 1°. parce qu'il eft aifc d'en reconnoîtr^ en eux de différentenature, ainfi que dans les autres animaux; i". parce que l'appareil pour les fecrétions fe corref- pondj 3'-'. parce qu'on ne peut afllgner d'au- tre fource de ces humeurs que le fang , Se qu'il ne peut les fournir qu'autant que fa totalité pade à travers les couloirs qui les féparentj & qu'autant par couféquent qu'il circule.

4°. L'organe immédiat & principal de la circulation, eft le caur : c'eft un vifccre muf- culaire, de forme pyramidale, triangulaire, fitué dans la poitrine , unique dan tous les animaux en gcncral , creux, divilé dans le plus grand nombre des animaux en deux cavités qu'on appelle ventricules , u'a)ant dans plufieurs qu'une feule xavité ou un fcul ventricule, doué d'une irritabilité cxquile , ayant, fans iiiteriupcion , depuis le piemici

PRELIMINAIRE.

XX f

jufqu'au derniet moment de la vie j deux moiivemens , l'un de contracflion , qu'on ap- pelle diûfioU, l'autre de dilatation, qu'on uomme fyftole. A la ba'e de ce vifcère font placés j fuivanc le nombre de Tes ventricules , un ou deux appendices , creux , mufculaires, capables de contradiion, nommés d'après leiir forme oreilleiccs. Ce font des réfervjirs dans lefqueis le fang , à Ton retour àss dif- férentes parties, eft reçu un inftanc pendant que le cœur fe contradte , & d'où il pafTe dans Ça cavité à linftanc il fe dilate. Il y a de plus à la hafe du cœur, félon le nom- bre des ventricules & celui des oreillettes , quatre ou deux vailfeaux , dont un ou deux , félon leur nombre, fervent à porter le fang du cœur dans les différentes parties j & l'au- tre ou les deux autres à le rapporter das dit- térentes parties au cœur. On nomme artères les vailTeaux qui remplilfent le premier ufage , & veines ceux qui fervent au fécond. Les artères naillent immédiatement du cœur j & elles s'ouvrent dans fa cavité j les veines au contr.iire aboutilfent au cœur, & elles s'ou- vrent dans la cavité des oreilletres : ces vaif- feaux contiennent à leur intérieur des val- vules ou foupapes qui fe lèvent ou s'abaif- fent , permettent ou refufent au fang lepaf- fage , ftlon qu'il eft ncceflaire pour qu'il circule : ainfi , quand le cœur fe contracte &r darde le fang dans les artères , leurs val- vules fe lèvent & livrent paiï.age au fluide qui eft lancé; mais dans l'inftant fuivant, le cœur fe dilate, & le fang , predé par la ccntracîion des artères , comme nous Texpo- ferons plus bas , pourroit rétrograder , les valvules artérielles s'abaiflent Se s'oppofent au retour du fang; dans le même mitant, au contraire, les oreillettes fe dilatent, l'^s valvules des veines s'abaitîent & ou\ient .paiïage à la colonne du fluide qui eil rap- porté; & dans le moment fuivant, le cœur fe dilate, les valvules artérielles s'aballfent , s'oppofent au retour du fang, les oreillettes fe contractent, verfent le fang dans la cavité du cœur , les valvules des veines s'élèvent, & fufpendent, pour un mo- ment, le cours de la colonne du fliiideciui

revient aux oreillettes. II y a donc une op- pcfition confiante entre la contraélion & l;i dilatation du cœur & des oreillettes, entre l'élévation & rabaiifement des valvules , des artères & des valvu'es des veines; &z cette contrariété de mouvemens pourvoit à tous les befoins de la circulation, en rem- plit toutes les conditions.

Les artères & ks veines font des vaideaux coniques compofés de membranes; celles qui entrent dans la formation des artères, ont plus d'épaiiTeur, d'élaflicité, il y en a une qui eft mufculaire; celle-ci ne fe trouve pas dans les veines ; les artères font des vaif- feaux , à la fois pallîfs & aétifs , capables de dilatation & de contraclion ; les veines font purement paflives; le fang eft datdé dans Ls artères, il circule à travers leur ca- vité, & elles contribuent elies-mèmes à fa circulation; dans le moment le Ç:^^^ eft dardé dans les artères, par la coniraélioii du cauir, elles font dilatées, portées au delà de leur diamètre pat le jet du fang; elles font pailivej; mais elles réagilfenr aulfi-tôt, elles fe contractent, elles prelTent le fang, qui, ne pouvant retourner en arrière à caufe des valvules , eft poulfé en avant. C'eft pour cette raifon que leurs mouvemens font inverfes de ceux du cœur, qu'elles font dilatées quand ilfe contraéte, & qu'elles fecontraélenc au moment de fa dilatation ; ce mouvement alternatif, & jamais interrompu, comme celui du cœur , eft déligné par le nom de pouls. Il indique l'état de la circulation ; & com- me c'elî une des fonétions les plus intéref- fantes pour la vie , on juge , d'après le pouls , de l'état des forces vitales , de leur énergie ou de leur foiblefle , de leur cairne , ou de leur trouble , de Tunitormité ou de l'inéga- lité de leur action.

Les veines ne fe contradtent pas , le fang y eft verfé , & coule à travers fans les dilater. Cette différence vient de ce que des troncs artériels naiirent des branches qui ont moins de diamètre que les troncs, .infi le fang palTe d'un canal plus large dans un plus ctroit , ce qui fuppofe &c ncceflite, pour qu'd trouve place, la dil.uation des branches j

Kxi)

DISCOURS

les troncs vsireTix rérnltent su contraire de r.imcaiix qai fe fcunllfent , le fang p.iÏÏede ciiiaux en canaux dIus larges , 6c ne les dilate pis par cette raiion.

Je n'entrerai pas dans les détails i5c la nefcTiption des branches , & des ramifica- tions qui nailFent des troncs artériels, &c des rameaux dont la réunion forme les troncs veineux; cet objet eft purenisnt-du relTort de ranatomie ; mais j'obTerverai que , pour faire la dcmonftration des artères & des vei- ne? dans l'ordre naturel , il faudroit procéder po.'.r les artères des tror.cs aux ramifications, & pour les veines des plus petits rameaux aux troncs. Je ne m'arrêterai pas non plus à examiner comment les dernières ramifications des artères , qui portent le fang , le tranf- mettent aux premières ramihcanons des vei- nes qui le rapportent ; fi ces deux elpèces de vailleaux s'abouchent, s'ils s'ahoachent par- tout , ou en certaines parties feulement , ou s'il y a toujours entr'eux une iroifième efpèce de vaifiTeaux intermédiaires j plus étroits , & qui admettent fi peu de globules de fang à la fois que ce Buide paroît Hmpide dans ces vailîeaux , qu'on nomme lymphaîiquei , parce qu'ils contiennent im fluide fans coii- ieur j Â' limpide comme l'eau. On découvre &- l'on fuit ces vailfeaux fur beaucoup de par- ties du corpsj font ils toujours intermédiai- res entre les artères & les veines , ou nailfent- i's des unes &■ des autres fans former jonârion entr'elles , mais pour féparer du fang une luimeur particulière ? cette humeur eft-elle l'alimpnt, le reftauraut des différentes parties, ik fournit- elle à leur développement ôc à leur entretien? Enfin, les vailleaux lympha- tiques font- ils eux mêmes artériels & vei- neux ? Tous ces objets font du retTort de l'Aua'omie & de la Phyfiologie, & nous femmes trop peu avancés dans la connoif- faiice de l'organifation des infedes, pour que nous puillions faire la comparaifon de ces mêmes objets entr'eux Se les autres ani- maux. Je ne dois donc pas m'en occuper, mais de la manière dont aginfent les organes <Sc les parties qui fervent à la circulation , parce O'ie c'ed une des fondions do«infetftes

comrrre des autres animaus , ^ jqae cette fonélioii elt exécutée, dans les uns & dans

luife

correipon-

les autres , p.'.r des âge dent.

Nous avons vu que routes les parties ont la fibre pour élément-, que le caradère pro- pre de la fibre animale efl l'irritabilité , c'eft-à-dire, la propriété de fe contracter, de fe racourcir, «u d'entrer en vibration au contacb d'une fubliance étrangère : mais les difièrentes parties fom plus ou moins irrita- bles fins qu'on puiiïe toujours & prccifémenc en déterminer les raifons ; on fait en général que !a fibre mufcivlaire eft très irritable, que les différentes parties le font à proportion , qu'il entre plus de fibres nerveufes dans leur tev;ure , que leurs fibres font plus ferrées, plus tendues , d'un tilfu moins lâche, & ont moins de f 'upleffe. Le cœur eft un vifcère tout mufculeuxj les fibres dont il eft formé, réunifient toutes les conditions nécelfaires pour que le vifcère qui en eft formé , foit de l'irritabilné la plus exquife, ôi il l'eft eti efftt; il ne nous reftc qu'à nous rappeller que c'eft du cerveau &: de fon protonge- ment qu'émane le priiicipe de l'irritabilité , & que ce principe eft communiqué par l'en- tremifedes nerfs. Ces notions étant bien pré- fentes, il ne fera pas difiîcile de concevoir le mécanifme de la circulation.

Dans le mome-nt le cœur eft dilaté, fes fibres font dans le relâchement \ mais dans le même inftanr le contad du fang , vetfé par les oreillettes dans les ventricules , met en adion l'irritabilité de leurs fibres , elles fe contradent , elles fe raccourcifient ,A' , com- me elles font dirigées en tous fens, elles ra- prochent de toutes parts les parois du cœur, dont la cavité dilpiroît pour cet inftant : le fang prelîé de lous côiés , challé avec force^ eft dardé dans les troncs artériels; il palTc; dans un canal qui va en fe rétrccilTant , nous nous en fouvenons; il diftend donc le dia<- mètre de ce canal , i?.: les artères reviennent lur elles-mêmes, fe contradent, fuivant leur diamètre en rai(on de Lur élafticité , fuivant leur longueur en raifon de l'irritabilité de leurs fibres , excitée par le contad du fang

P R E L I M 1 N A I R E.

qui eft dardé j il coiiùinie qop.c à (c uaiivec prellé , Se à êrre poiiiré dans les portions poftérieures des artères , il conciiuie de produire les mêmes efFecs , & d'éprouver la Bîême réaction.

Cependant le fang ayant été d*rdé hors des ventricules par la contradion du cœur , ce vifcère tombe dans le relâchement , (!*f il fe dilate , fes libres reviennent à leur pre- mière extenfion , parce qu'il n'y a plus de caufe qui agilie fur elles & qui excite leur irritabilité j mais cette caufe & its effets le renouvellent dans le moment fui vanr, pour s'interrompre «Se fe renouveller fivcceflive- ment,& lans celle, jusqu'au dernier moment de la vie. Nous venons de voir ce qui con- cerne les mouvemens du cœur j continuons de fuivre cours du fang qu'il a dardé dans les artères. Suppofons que la contraction du cœur a dardé dans les troncs artériels une quantité de fang qui , à caufe de la forme des vailFeaux , y forme une colonne, & fup- pofons cette colonne d'une longueur déter- minée, de trois pouces par exemple j elle agit de trois manières i ". ele frappe la colonne de (ang qui écoit ài]\ dans les artères, & au ddlous de laquelle elle vienr heurter; 1*. ellediftend lediamètre des troncs arccriels dans une longueur de trois pouces ; 3". elle excite l'irntabiliré ou la co.itradion de leurs fibres dans une efpace de même étendue. La colonne de fang, heurtée par celle qui fur- vient en arrière , en reçoit une impulfion qu'elle communique à la colonne de fang qui la précède, & celle ci a une troilième, ainli de fuite; ainfi la première impuifion, produite par la contraction du cœut,fe pro- page, de proche en proche j de la bafe des artères à leur extrémité , en fe communi- quant fucccflivement aux différentes colon- nes dans lefquelles on peut idéalement par- tager tout le fang qui rempli: les artères de leur origine à leurs dernières ramifications ; en même-tems la première colonne, que nous avonsfuppofée de trois pouces, ayant dif- tendu dans une pareille longueur les troncs artériels, ils reviennent fur eux-mêmes dans cette érendue pat l'effet de leur clarticité ,

XX u;

& leurs parois fe raproclicnt autant qu'ils avoient été écartes; la même colonne, erv excitant rirritabilité des filM-es & kur cou- ttadtion , détermine & leur raprochéi-nenc dans le fens tranfverfal , & leur raccourcilîe- ment en longueur , le fang, prellé, challc ds toutes parts , ne pouvanr reveiiir en arrière , d'où procède It mouvemenc, 3c des val- vules s'oppofent à fon retour, elt darde* ch avant; la tolonne qu'il forme eit poulie eu même ii.us. dans les troncs ou dans les ra- mifications qui en naiffenr, & y produit les mêmes effets. Ainfi la circulation fe fait , i". par l'impulfion que le premier jet de fang dardé par le cœur, communique à rou- tes les portions de la colonne, & à l'a co- lonne entière de fang contenu dans les .irtè- resj depuis la ba.fe de leur tronc jufcaa l'extrémuédeleursramiHcations; l'-'.part'effes de l'élalticité des arrères; 5 ". par celai de Jeuï irritabilité. Mais cette dernière caufe parok agir beaucoup moms puillamment que U féconde, qui femble avoir l'aétion laplus.'orte-

Je ne peux me difpenfer de répondre à une objedhon qui fe préfente naturellemenr. Vous fupp..)fez , me dira- ton, que Je fang eil partagé dans les artères en colonnes qui fe touchent , mais il y forme un tout con- tinu \ & fi ion mouvement étoit fucrellif ^ de dilt.ince endiftance, comme vous le fup- pofez , la dilatation des artères ne feroit pas inltantanée, commu le taCi du poul proave qu'elle l'elt.

Je réponds à cette objeétion qu'il en eis: de l'impuilion communiquée à la colonne totale dufang&pirlejetquele cœur a dardé, & par la contraction des artères, comme du choc communiqué à la dernière boule d'une férié; quelque longue qu'elle foit, ce mou- vement pallè néceltairement &c fucceifive- ment de boules en boules pour arriver à la dernière ; celle-ci s'élance cependant aulli- tôc que la première eft frappée, & fans qu'on puiiïe obferver d'intervalle entre ccî deux faits. Les boules ne repréfentent pas mal les portions ou coloiines dont je fup- poie que la iérie forme la colonne totale du fangj de quelque manière qu'on (i '

DISCOURS

repréfente les chofes , il eft de nccellicé que la colonne totale foie compofée de porcions, de moicciiles ou de globules qui ne font que concigus, qui fe couchent : elle ne peut être un feul & même tout-, il faut donc que. le mouvement, communiqué à la bafe de la colonne, le propage par portioii de tems &r de dirtances \ mais cette communication eft rapide, comme dans la férié des boules, que les intervalles dans lefquelselle a lieu , quoi- qu'ils foient de néce/lité abfolue , échappent à nos fens. Ce font donc les trois caufes aflignées qui produifent le mouvement du faiig dans les artères , l'impulllon commu- niquée en arrière, l'élafticité des artères & leur irritabilité.

Le fang, palfé â.QS extrémités artérielles dans les radicules des veines , foit immédia- tement, foit par l'intermède des vailleaux lymphatiques , coule d'un canal plus étroit dans un conduit qui va toujours en s'élar- gillantj il ne dirtend donc pas ce canal, & celui-ci n'a point à agir en raifon de (on élafticité ^ il n'eft ni dilaté ^ ni il ne revient fur lui-même : le fang qui fe trouve tou- jours de plus en plus au large , n'agit que très-foiblement fur les parois de ce fécond genre de canauxj il excite très-foibiement , ou plutôt il n'excite pas leur irritabilité; c'eft donc parce que les veines ne font ni diftendues dans leur diamètre, ni que leur irritabilité n'efl: excitée , qu'elles n'ont point de battement imnis l'impulllon, communi- quée en arrière à la colonne du fang a l'ori- gine de cette colonne qui eft à la bafe du cœur, continue de fe propagera d'agir fur la férié des molécules fanguines parvenues dans les veines ; cette impulfion retardée par rélargilfement fuccellif des canaux , eft fupplée par une caufe feconJaire; c'eft la dilatation des artères le' long &c en contad defquellcs les veines ont leur diredion : car les artères , en fe dilatant, compliment les veines , poulFent le fang qu'elles contiennent, & concourent avec 1 impulfion qu'il reçoit en arrière , à fon mouvement ou fon cours en avant ; ainfi l'impulhon communiquée •gi; fang à la bafe de U colonne , & la dila-

tatioa des artères, font les dnix cal1fe.^ eia- caces &C primordiales du co-urs du (ang dans les veines ; ces deux caufes font dans diffé- rentes parties & en diff'erentes circonliances fécondées par le- mouvement dts mulcles , dont la contradion comprime les veines & accélète la progrelîion du fang.

11 ne nous refte qu'à examiner les organes de la circulation dans les infc-iles , & à les comparer aux mêmes orgai^es dans les autres animaux, l'application des caufes de cette fondion fera aifée,& n'exigera pas que nous revenions , à cet égard , fur ce qui vient d'être dit.

Un long canal ou vailTeaUj partagé par des étranglemens en autant de fegmens qu'il y a d'anneaux dont le corps des infcdes eftcompoféj s'étend de leur tête à l'extré- mité de leur corps : il eft (itué au-delfous de l'enveloppe commune ou du tégument qui couvre tout le corps, fous l'amas de grailFe qu'on découvre fous ce tégument , 6c il s'étend le long de la partie qui répond au dos au-de(Tus des vifcères; les étranglemens qui le rétrécillent font ouverts , & établilTent un conduit ou palfage intérieur de fegmens en fegmens ; ces fegmens fe dilatent & fe contraélent alternativement les uns après les autres : ce mouvement fucceftif de l'un à l'autre commence du côté de la tête , fe pro- page le long du corps, fe termine à fou extrémité, & recommence aulli tôt vers la tête pour continuer , fans interruption, de la même façon.

Le vailTeau que je viens de décrire , a été regardé par Malpighi, Swammerdam , Wal- lifnieri , Réaumur , & , en général , par les plus habiles anatomiftes & naturaliftes, com- me une fuite de cœurs qui ont communi- cation des uns aux autres j ils ont penfé que chaque fegment remplit à la fois les fonc- tions de cœur & d'oreillettes; que quand le fegment le plus près de ia tête eft vuide & relâché , que le fang a palTé dans toutes les parties du corps, il eft rapporté dans ce fegment , qu'il le dilate i!^ que fa ptéfence en excite la contradion j qu'alors le fang palfe dans le fécond fegment qui

eft

PRÉLIMINAIRE.

eft dilaté, &: de celui-ci, par les mêmes caii- fcs, dans le croifième; ainfi fiiccelli/emenc de fcgmens en fe^mens, jiifqa'au dernifr; alors le cours du û.-ig rapporte ce flui.'le au premier fegmenr , ou à celui qui eft le plus près de la tête : il parok donc que la circu- lation eft plus lente dans les infedes que dans les autres animaux , puifque ce n'eit qu'après le palTage {uccelîîf- du fang , de feg- niens en fegmens , à travers toutes les par- ties, qu'il revie.'ît au premier poinr d'où il a éé pouiïe, qu'il fe paffe un interval.e alîez long entre ce retour, au-lieu que le cœur des autres animaux fe contraire & fe relâche de momens en momens fort courts : il pa roît de même que toute la quantité du fang pafTefucceflîvement de fegmens en fegmens , & à travers les différentes parties, qu'il ne forme pas, comme dans les vailfeaux des grands animaux , une colonne continue ; car alors la contraftion du premier fegmeiu communiquero r au fécond une impullion dont l'effet rapide fe feroit fentir à l'extre mité de la colonne, & verferoit le fang dans le premier fegmeiit auliî-tôt après qu'il fe feroit relâché. Aulîî les infedes pa- roilfent ils en général avoir peu de lang & d'humeurs , en avoir moins , même à propor- tion du volumedu corps , que les autres ani- maux ; leur fubftance dans létar de perfedion, qui eft celui dans lequel nous les conhdérons dans ce paragraphe, eft plus sèche; les plaies qu'on leur fait, ne lailîent pas, ou à peine, échapper de férofité. Mais naît-il des feg- mens, ou de chaque cœur, des vailfeaux qui tranfportent le fang; en naît il de cha- cun, ou du dernier feulement? Ces vaif- feaux font-ils artériels & veineux ? Je ne trouve rien dans les auteurs qui me mette à portée de fatisfaire à ces queftions, & la peticeife des ohjers en rendra Toujours la folution très- difficile. Quelques obfervareurs ont re- marqué des hlets qui leur ont paru prendre iiaidance le long du vailfeau qui tient lieu de cœur pis ont jugé que ce font des vaif féaux fanguins : mais doit-on les diftinguer en artériels & veineux , & même en lympha- tiques? L'analogie l'infinae ; l'obfervaîion ne HiJîoÏTe. Naturelle j Infecles, Tome I.

le décide pas. Comment fe fait-iL s'il na't des vailleaux des différens fegmens , que le fang , poulfé dans ceux qui tirent leur otigiue du premier , n'y foit rapporté qu'en même- tems que celui qui coule à travers les vaif- leaux quinaifTent du dernier fegment ? Cette queftion préfente une rrès-grande difficulté : on peut cependant fuppofer le trajet des pre- miers vailïeaux plus long & celui des der- niers plus court; le lieu de leur origine ne fait rien , parce que les vailfeaux _, émanés près de la tête^ peuvent fe porter à l'extré- mité du corps j& ne revenir aboutir près de leur origine , qu'après avoir traverlé les dif- f-'rentes parties ; ceux qui nailfentà l'e' tré- mi é du corps, peuvent regagner diredte- niont , &L par un trajet plus court , le pouic de leur naillance. Mais ce ne f un que >.'ts conjectures, & l'obfervarion feule j la vue des vailfeaux, leur dircélion connue, peuvent réfoudie la difficulté. Quoi qu'il en luit, il eft aifé de taire aux infecfes l'appli- cation de ce qui a été dit pour les autres animaux, & de concevoir que l'iiritabilité & Iclafticité des vailfeaux font dans les uns lV' les autres deux caules de la circulation : mais la troilième , l'impulfion , communiquée à la première colonne de fang à celle qui (e trouve à la bafe des vaiileaux , paroît n'a- voir pas lieu dans les infectes : comme cette caufe a une forte action, c'elt une raifon pour que la circulation foit moins aftive cc plus lente dans les infeéles, comme elle paroît l'être en eftet. Il fuit une autre confc- quence, &c qui fe déduit d'une manière plus sûre, de l'organifationqui vientd'êtreexpoiee. Il y a autant de fegmens que d'anneaux dont le corps eft compofé; chaque fegmenc eft un cœur complet , & en état d'cxercec les fonctions de ce vifcère ; le corps peut donc être divifé tranfverfalement en iutant: de portions qu'il contient d'anneaux ; & à chaque portion il y aura un cœur complet , comme nous avons vu qu'il y a auLri,pac la même dilpofition d'organifation , un cer^ veau complet ; je prie le lecteur de ne pas perdre de vue cette double obfervation à laquelle nous en ajouterons, à la fin d

XXVJ

DISCOURS

l'article fiiivant , une trolfième , qui , jointe aux deux autres, jettera un grand jour fur Torganifation des infedl.s, & rendra évi- dente la caufe d'un des plus finguliers phé- nomènes que préfente leur hiftoire.

De la refpîration , tro'ifdmc & dernière caufe de l'exïjlence actuelle , & des organes qui y fe(venu

La refpiration eft une fondion au moyen de laquelle l'air entre dans la poitrine, & en fort alternativement \ elle con.coutt avec les deux autres fondions qui nous ont occu- pés , l'irritabilité & la circulation , au pro- duit de Texiftence aduellej elle commence au moment de la nailfance, & ne celle qu'au dernier inllant de la vie ; mais elle dilïère des deux autres fonctions en ce que l'exer- cice de celles-ci commence dès l'inftant de la formation , au-lieu que celui de la refpira- tion ne date que du moment de la fortiede l'utérus ou de l'œuf, fuivant que les animaux font vivipares ou ovipares j ou du moment, au moins, l'air eft introduit foit dans la matrice, foit dans l'œuf. L'irritabilité & la circulation ont lieu dans l'embrion qui ne vient que d'être formé , dans le fœtus qui fe développe , & qui prend fon accroilFe- ment^ mais ni l'embrion, ni le fœtus ne refpirent point , &" le fœtus ne commence à refpirer que quand une ouverture , faite aux tégumens qui l'entourent, ou dans la ma- trice , ou dans l'œuf, donne paflage à l'air ^ inftant il eft prêt de naître , &'où l'aébe de de fa nailTance eft commencé.

Les organes de la refpiration font le poulmon qui en eft l'organe immédiat, & des parties qui y concourent fécondairement: ces parties font /a trachée- artère , les bron- ches, le diaphragme , les côtes & les muf- cl s qui fervent leur élévation & à leur abaillement alternatifs.

La trachée artère eft un tuyau cartilagi- neux , compofe d'anneaux , qui du haut de la poitrine aboutit au fond de la bouche , s'y cvafe en un pavi Ion formé de plufieurs castilagesj ciu'on nomme LaryiïK, ficué de-

vant l'œfophage , oi\\e canalpar lequel les alimens defcendenr dans l'eftomac j la tiachée- artère fert au paHage de l'air.

Les bronches font deux canaux qui naif- fent de la bafe de la trachée , 8<. qui ont la même conformation , à l'exception que les anneaux, dont elles font formées, fonz entièrement cartilagineux , au-lieu que les anneaux de la trachée ne le font qu'aux trois quarts j &: qu'à la partie poftérieure ils font membraneux.

Le diaphragme efî un mufcle, d'une irri- tabilité exquile, d'une forme applatie , fitué tranfverfalement au bas de la poitrine dont il fait la (éparation d'avec le bas -ventre \ il fe contraéte dans le moment de l'expiration ou de la fortie de l'air; il eft par fes attach s fixé de façon qu'en fe contractant il s'élève, rentre dans la cavité de la poitrine , en dimi- nue Tampleur & compritne le poulmon ; il tombe dans le relâchement au moment de l'infpiration , il s'affailFe fur les vifcères con- tenues dans le bas ventre , il les refoule par fon poids, ôc la cavité de la poitrine en eft amplifiée.

Les côtes font des os longs , applatisj qui approchent par la forme de celle qu'auroit la lettre S alonge & moins courbe; ils font articulés par leur plus grofle extrémité aux apophifes ou éminences des vertèbres, ou des os qui forment la colonne dorfale; leur arti- culation eft telle qu'ils font fufceptibles d'élé- vation & d'abaillement, d'écartement du centre à la circonférence, & de rapproche- ment de la circanférence au centre.

Les côtes font mues par difFérensmufcIes j mais principalement par deux couches de mufcles iitués entre chaque côte , qui fe croilfenc , dont les fibres ont leur attache dn bord inférieur de la côte fupérieure , au bord fupérieui de la côte qui eft au^deflous : on les nomme mufcles intcrcojîaux.

La poitrine , dont les côtes 6>: les mufcles intercoftaux forment les parois , qui relfem- ble à une hôte lenverfée, eft conformée de façon que , quand les côtes font élevées par la contraéfion d'un des deux plans des muf- cles interc&ftauxj & pat l'aétion des autres

P R É L I M

m ufcles qui fécondent la leur, la cavicc de Ja poicrine eft conhdcrabiemenc aijiplihée; quand, au contraire, les côtes font abaillées par la contradion du plan oppofé des muf- cles intercoltaux , «Se des mufcles qui con- courent à la inêaie adion , la cavité de la poitrine eft relFerrcej c'eft dans linilant de i'infpiration ou de l'entrée de l'air que les côtes s'élèvent, que le diaphragme s'abiilfe, &C c'eft dans le moment oppjlc, celui de l'expiration ou de la fortie de l'air , que les côtes font abail^ées, que le diaphragme s'é- lève j ainfi dans le premier inftant toutes les circonftances fiivorifent l'amplitude de la poi(rine, la dilatation du poulmon & l'enttce de l'air, toutes concourent dans le fécond à ren'etrer la poitrine , à comprimer le poul- mon & à repoulfer l'air au-dehors. Les cau- fes immédiates de fon entrée &: de fa fortie font donc la dilatation de la poitrine ou l'élévation des côtes, & l'abailfement du diaphragme i l'élévation de ce mufcle & l'a- bailiemen: des côtesj mais quelle caufe dé- termine le mouvement altetnatif de ces dif- férentes parties ?

Cette queftion a de tout tems embarratTé les phyfiologiftes , qui n'y ont pas encore ré- pondu de manière à réioudre la difficulté ; l'opinion la plus vraiiemblab!e me paroît être la fuivante.

Dans Finftant le fœtus naît, l'aclion de l'air , qu'il n'avoit pas encore éprouvée, excite néceifairement l'irritabilité de toutes les parties qui y font expofées ; ces parties font en général toute la fuifice du corps, &: fpccialement les «ari.'^ej & la bouche, deux cavités que l'air trouve vuides & dans lef- quelles il entre par l'effet de fon poids & de la tendance à l'équilibre ; l'irritabilité des parties fur lefquels l'air aj^it, fe communi-. que en général , par la liaifon des nerfs , aux puillanres deftinces aux mouvemens ^e la poitrine, & par une connexion plus intime, d'abord à celles qui doivent pro- curer fa dilatation ; lair qui la trouve vuide s'y introduit donc, & la remplit à inefure qu'elle fe. dilate; mais quand l'air a diftendu lespoulmons, ils interceptent par

/' N AIRE. xxvlj

leur comprcPiion fur les nerfs la communi- cation du cerveau aux puillances dont l'ac- tion amphhe la poitrine ; le lelâchement de ces puilfances eft l'etFet de cette inter- tuptionj dans ce moment les puilfances op- polées qui fervent à rétrécir la poitrine , entrent en adion & repouffent l'air ; auÛî- tôt qu'il eft forti , les puilfances qui l'ont expuhé tombent dans le relâchement , parce qu'il n'y a plus de caufe qui excite leur irri- tabilité ; mais dans le troilième inftant ou la poitrine vuide fe retrouve comme au pre- mier, & les deux puillances oppofées dans l'inadion, l'air revient s'introduire p ir fon poids dans les narines & la bouche, déter- miner une nouvelle contraélion des puilfances motricesj qui doit fe renouveller & fe per- pétuer fansceife, jufqu'à la fin de la vie , parce que , jufqu'à cet inftant , les circonftan- ccs (etont toujours les mêmes.

L'hypothèle qui vient d'être expofée fait fans doute honneur au génie de ceux qui l'ont imaginée j mais les preuves en fonc foibles , & la connexion par l'intermède des nerfs , entre les parties fur lefquelles l'air agit immédiatement , & celles fur lefquelles il a une action fécondaire , eft loin d'être fufiîfamment. démontrée. Une autre queftion, non moins importante, & qui a autant em- barralfé les phyhologilles , eft celle qu'on peut faire fur l'ufage de la refpiration. Quel eÛ-il? Avant de répondre quelque chofe à cette queftion difficile , occupons- nous de la ftruclure du poulmon , organe immédiat de la relpiration , que nous ne connoilfons pas encore. Ce n'eft qu'après une connoilfance exaéte de toutes les pièces d'une machine qu'on peut efpérer d'en connoître l'aclion & les effets.

Le poulmon eft un vifcère double , très- ample; il occupe en grande partie la ca- vité de la poittine , qu'il remplit avec le cœur Ci les parties dépendantes de ce vifcère; chaque poulmon eft divifé en deux lobes à peu près triangulaires, de forme pyramidale, concaves en delfous , arrondis fur les côtés, & légèrement déprimés en arrière ; les deux lobes du poulmon forment un cône renverfé, d ij

xxviij D I s t O U R s

êi leur forme a quelque rappor: à celle delà

corne du pied des quadrupèdes à pied fourchu.

Quant à la ftruclure du poulmon, elle eft entièremenu vafculaire; deux fortes de vaif- feaux entrent dans fa compofition ; les uns fervent à la circulation du fang , font arté- riels , veineux & lymphatiques ; les autres donnent palTage à l'air pour fon entrée & fa fortie ; du ventricule droit du cœur fort une artère qui fe porce aux p ulmons , fe partage en plulieurs branches , qui fe fubdivifent en des rameaux qui fe plongent dans les poul- inons, &: qui , par leurs ramifications nom- breufes , font une partie de leur fubdance ; l'extrémité de ces ramificaiions aboutit à des radicules veineufes qui entrent pour beau- coup auffi dans le volume des poulmon^ , elles fe ralTemblent en des rameaux qui , à leur fortie des poulmons , fe réunii'cnt en quatre veines qui rapportent le fang à Toreil- letre gauche qu'on peut regarder , fuivant Winllow , comme le croiic des veines pulmo- naires d'où le fang palfe dans le ventricule du même côté. Ce ventricule darde le fane qui a circulé à travers les poulmons dans toutes les autres parties du corps , ëz celui qui a circulé da s ces parties , rapporté au ventricule dont nait l'artère qui va aux poulmons, ou l'artère pulmonaire , eft poulTé par la contradion de ce veiuri ule-, à travers îes artères des poulmons ; ainfi , d'après la dif- podtion des troncs artériels & veineux , tout le fang palfe alternativement des différentes parties à travers les poulmons , & des poul- mons à travers les différentes parties.

L'extrémité des artères , avant de s'abou- cher ou aux vailleaux lymphatiques , ou aux radicules des veines , torme un plexus , un laifis , qu'on a nommé rae mirjbile Malpi- gki , du nom de cet anatomifte qui en a donné la defcription.

Les vaifleaux qui tranfmettent l'air , font des ramifications des bronches qui en font elles-mêmes de la trachée-artère. Ces vaif- feaux font , comme le» brorichcs , compofés

d'anneaux cartilagineux j ils fe terminent paf des expenfions vcficulaires qui forment des grouppes analogues , pout la forme , à des grappes de raifm ; le retë mirahile , ou le laiiis que les artères forment à leur extrémité*', eft attaché à ces grouppes S< les embialle.

Quand la poitrine eft di'atée, que l'air Se le fang y font portés, les vailTeaux fanguins, le lalîis qui les termine , Us vaiffeaux aériens , les vélîcules qui les bornent , font étendus , é;~anouis,& admettent facilement chacun le fluide qui leur eft propre j mais quand la poi- trine fe contrad-e , que le fang & l'air en font repouflcs , les vaifleaux font forcés à fe re- plier j ils fonr comprimés , leur diamettre eft rétréci, le lalîis des vailleaux fanguins for- me une infinité d'angles , il eft troillé & for- tement comptimé ; les grouppes des vaiffeaux aériens le lonc aufli-: l'air s'cchappe par les canaux qui avoient (ervi à fon introduction ; mais le fang prelTé dans les vaifleaux fermés il a été inttoduitj eft forcé de les traverfer, d'en frapper tous les angles, d'en fuivte les an- fraCluofités, pour échapper à la preflion , & palfer des artères aux radicule-, des veines , de celles ci aux rameaux t]ui en font l'origine y &c enfin des rameaux aux troncs qui le portent à l'oreillette gauche , par laquelle il retourne au cœur.

Cette preflîon du fang , fon paflage forcé à travers des vailTeaux rétrécis , repliés , fon choc aux angles qu'ils forment , foa ftotte- ment augmenté par toutes ces conditions , font caufe qu'il eft fortement atténué , que Ces molécules font agitées j & mêlées intime- ment. Tels font les effets qui fuivent du mé- canifme qui vient d'être décrit. Aufli a-t-oii remarqué de tout tems que le fang qui re- vient des différentes parties du corps j qui eft deftiné à palier à travers les poulmons , a perdu de fa fluidité ; qu'il eft d'un rouge plusobfcur; que ce même fang, après qu'il a traverfé le poulmon , en fort plus fl.ùde qu'il n'y elt entré , d'un rouge plus éclatant j la fluidité du fang, fon coloris plus brillant j font donc des eftets de fon paflage à travers

PRÉLIMINAIRE.

Je noulmon ; mais font-ce des effets mLcani ques , comme on l'avoic peiife ju'qu'à nos jours , ou ces eft'ers fout- ils produits par d'autres caufes ? & ces caufes , outre le colo- ris &i la fluidité du faug , opèrent-elles en- core d luie autre façon fur ce fluide ce com- ment ?

Pour répondre à ces queftions , il efl: nc- celfaire de rapporter un précis du fentiment des anciens & des modernes fur les effets de la refpiration.

Les anciens & même les modernes , juf- qu'à ces derniers rems , ont borné l'effet de la relpiration à la fluidité du fang , au chan gement de fa nuance , qu'ds attnbuoienc à fa plus grande fluidité •, ils regardoieiit cette dernière condition comme la plus impor- tante ; ils penioient que ce n'ecoic que dans le poulmon que le iang recevoit fa dernière éla- boration , en y devenant plus fluide j & qu'il ctoit entièrement converti dans la nature qui lui convient; qu'il dégénéroic , en circulant , à travers les autres parties, & qu'il fe régén.é roit eu traveifant ies poulmons ; ils appel- loient en conféquence ce vifcérë fabrique du fang offiçina-. croyoienc encore que le fang s'échauffe en circulant dans les diver- fes parties , & que rapporté aux pou'mons , il y étoi: rafraîchi par le contaél de l'air j à travers les vailfeaux aériens & languins qui fe fuivenc , fe touchent & font adollés dans leur trajet. Mais l'opinion a bien change à cet égard depuis quelque tems. Loin que le ra- fraîchillemenc du fang foit regardé aujour- d'hui comme un effet de la refpiration , la chaleur animale eft , au contraire, attribuée à cette fonttion ; la refpiraiion ell regardée comme une foite de combuftion , dans la- quelle il y a une certaine quantité de l'air reipiié qui eft changé de nature ; cette opi- nion nouvelle n'eft pas la feule qui prévale dans ce moment. On croit encore que le fang ell déchargé par la refpiration de certaines parties , &. qu'il en reçoit d'autres. C'e!t de- puis la découverte des gaz que ces opinions ont été propofées j elles font fondées fur la

rxix

comparaifon qu'on a faite de Tair avant fon entrée dans le poulmon , & après fa fortie de ce vifcère , fur les changemens qu il a éprou- vés , les diminutions de fcs parties qu'il a foiiffertes , & les acquifuions qu'il a faites. Voici un abrégé des preuves far lefquelles ces afleriions font appuiées.

On a d'abord remarqué que le même air ne peut fervi-r à la refpiration des animaux qu'un certain tems \ qu'il devient incapable d'y fer- vir après quelques infpirations j qu'alors il tue les animaux qu'on y plonge. En exami- nant l'air expiré , on a reconnu c]u'il eft chan- gé de nature, que ce n'eft plus de l'air atmof- phérique compofé , comme il eft dans l'at- mofphère, de 72 parties de gaz azotique ou mofete , & de 28 d'air vital , fur 100 par- ties , mais qu'il contient un gaz particulier , le même que celui qui elt formé pat la coin- buftion du charbû'.î , or , on fait que le char- bon qui brCilc- , forme j en fe combinant avec l'air vital , ou en fe diffclvant dans ce fluiJe élaftique , un acide gazeux , nommé autrefois air fixe j air ou acide méphitique , acide aciien ;, & aujourd'hui par les çhimiftes de l'académie, acide catbonique, en raifon de fa bafe acidihable \ on fait encore , d'après les belles expériences de M. de Lavoifier , qua cet acide ne peut pas être formé fans char- bon , que celui-ci en eft le radical acidihable nécellaire, que fa combinaifon avec l'origine ou le principe acidifiant, qui fait la bafe de l'air vital , conftitue toujours Tacide indiqué, &" enfin, que iorfque czt air vital (e convertie en air fixe ou acid-- carbonique dans quelques circonftai]ces,dans quelque phénomène de la. nature ou de l'arc que ce foit , il n'a pu éprou- ver cette converfion , fubir ce changement , fans avoir diffous du carbone , ou la matière charbonneufe. En appliquant les vérités aulll nouvelles que frappantes de la Chimie mo- derne , à ce qui le paffe dans la relpiration , on voit que l'air expiré, contenant de l'acide catbonique quil ne contenoit pas avant la refpir.ition , il faut néceffairement admettre qu'il s'eft dégagé du pouhnon de la matière charbonneufe j qui s'eft diffoute dans l'air

DISCOURS

vital faifaiit partie de l'air atmofphérique ; on peut donc dire qu'un des ufages de Tair dans la refpiration , eft d'abforber le carbone du fang ; déjà cette découverte fufïiroit pour expliquer le changement de couleur que ce fluide éprouve pendant la refpiration , puif- qu'U eft vraifemblable que la nuance foncée de fang veineux lui eft donnée par l'excès de cette fubftance , comme cela a lieu dans toutes les matières organiques qui deviennent brunes pat l'augmentation de ce principe combuftible. Mais ce n'eft pas- le feul iifage de l'air dans la refpiration , & le feul effet de cette foniStion importante. Il en eft un qui paroît l'emporter beaucoup, & qu'on n'a pu apprécier que depuis quelque tems. Pour le bien concevoir , il faut obferver que le gaz acide carbonique qui refaite de la corn- binaifon de l'air vital atmofphérique , avec le carbone dégagé du fang, a une pefanteur fpécifique bien pUis conlidérable que l'air vital, & qui eft à- peu-près à celle de ce der- nier , comme i f eft à i. Or , la pefanteur d'un fluide élaftique , beaucoup plus grande que celle d'un autre , indique dans le pre- mier une denfué , un rapprochement de mo- lécules plus grand que dans le fécond ; & l'on fait que l'air vital n'eft plus léger que le gaz acide carbonique , que parce qu'il a perdu la quantité de matière de la chaleur ou de calorique , qui en tenoit les molécules trcs-écattées. On peut donc conclure de cette obfervation ,que l'air vital atmofphérique, en fechangtant en acide carbonique, & en dilfol- vant le carbone du fang , a perdu uns partie de fa chaleur latente ou de fon calorique. Cette chaleur dégagée fe porte dans le poul- mon &: eft abforbée par le fang ; celui-ci s'échauffe donc en proportion , & reprend , par l'afte de la refpiration , ce qu'il a perdu dans les routes de la circulation. L'air eft donc le magalin de chaleur les animaux qui le refpirent puifcnt fans cefie y & répa- rent ainfi celle qui fj difiîpe continuellement par leur peau ; le poulmon eft l'organe à qui la nature a confié cette réparation de la cita- leur ; &: le fang, qui paOe tout entier par cet , organe , abfotbe la chaleur qu'il va enfuit?

diftribuer dans tout le corps. Cette théorie eft parfaitement d'accord avec tous les phé- nomènes de la refpiration , & elle en explique même plufieurs que les phyfiologiftes avoient regardés comme entièrement inexplicables. On fait pourquoi la refpiration accélérée pro» duit, fur tout dans le région thorachique , une chaleur confidérahle ; pourquoi les envi- rons du coeur exifte le foyer de cette forte de combuftion vitale , font les parties la. chaleur fe conferve le plus long-tems; pour» quoi dans les fièvres qui ont pour un de leurs fymptômes l'accélération Se la gran- deur de la refpiration , la chaleur animale s'élèi'C fouvent à un dégté très-confidécable; pourquoi , tel homme robufte dont la poi- trine eft large & le poulmon très- ample , a un fang plus chaud &■ plus rutilant qu'un homme foible ou nue femme délicate ; pour- quoi le lang qui revient du poulmon dans la cavité gauche du cœur eft plus fluide , plus rutilant , & plus ptopre , en général , à toutes les fondions vitales ; pourquoi les animaux qui ne refpirent que lentement l'air atmof- phérique , comme les quadrupèdes ovipares & les ferpens , n'ont le fang que très peu au - delkis de b température de ce même air : pourquoi ceux qui ne refpirent point d'air du tout , comme les poiflons , ont le fang froid ou à la température exaéle du liquide ils font plongés. Voilà donc en quelques années , un problème qui avoit occupé , fans fuccès , les favans depuis deux mille ans , réfolu par les découvertes de la Chimie moderne.

Le lefteur , pour apprécier avec plus de connoiiïance le fentiment des modernes , doit lire dans le diélionnaire de Phyfiologie l'article de la refpiration : nous n'avons fait que rapporter ici un précis, (S: nous conti- nuons de traiter notre fujet.

Des organes de la rcjpiraàon diins les infeclcSy & de leur comparai/on avec les mêmes or- ganes dans les uucres animaux.

C'tft par la bouche ou la partit' par la- quelle les animaux en géiÀCial picnnent ce la

P R É L 1 M I N A î R E.

XXXJ

nourrirure , & rendent des fons , que l'air encre dans leur poitrine , & qu'il en fort. Aucun infede ne reçoit , ni ne rend d'air par la partie par laquelle il prend de la nourricnie , ni par celles qui lui fervent à produire des fons \ car ces parties fo;u dif- férentes dans les infetles j cependant ils ref- pirent, ils refpirent lair , & c'eft ce qu'il faut com.mencer par démontrer.

1°. Si on les plonge aii-delfous de la fur- face de Teau , il fe forme fur les côtés de leur corps, à certaines parties dont nous allons parler, par lefquelles ils refpirent, des glo- bules plus légers que l'eau , S< qui viennent gagner fa furface i mais ces globules dimi- nuent en nombre , en volume , à mefure que l'immettlon fe prolonge, & les infeéles finillent par êwe noyés.

z°. Si on cnr^iit d'huile les parties dont nous venons de parler , les infectes péillFent mais fi on ne les en couvre pas toutes , ou (i on en découvre prompiemer.t quelqu'une , les infectes continuent de vivre , ou font rendus à la vie , ce qui ne peut être attribué , dans le premier cas , qu'à l'interruption de l'air ;, dans les deux autres , qu'à la continuité de fon cours , ou à fon rétabliffement.

5". Si l'on enferrne des infedtes fous le ré- cipient de la machine pneumatique , qu'on faife le vuide , ils fouffrent , ils meurent plus lentement que les autres animaux , mais ils tinillent de même par périr ; l'air leur eft donc également nécelTaire ; ils le refpirent donc comme les autres animaux j puifqu'ils fe noyent fous l'eau , qu'ils font fufFoqiiés fous le récipient delà machine pneumatique j ils n'ont pas befoin de refpirer (1 fouvent , ils fe noyent j & ils font fuffoquésplus len- tement , parce que dans l'état naturel , ils font uneprovifiond'air beaucoup plusconlldé- rable à proportion _, que tout leur corps en eft rempli , comme nous allons le voir , Si que cette provifionleurfufiït pour du tems. Mais eft-ce l'air atmofphérique dans/ôn complet , eu contenant toutes les fubft<inces donc il

eft compofé , queksinfedes refpirent comme les autres animaux , ou feulement quelqu'une des fubftances qu'il contient , tk ielquelles ? Je me fuis fouvenr fait cette queftion , fans avoir trouvé moyen de la réfoudre , (?^' je la propofe à la.-fagacité des naturaliftes \ fa fo- lution , fi les infedles ne refpirent que cer- taines parties de l'air atmofphérique , expli- queroit comment refpirant l'air , ils font ce- pendant froids ; coniment certains animaux, comme les quadrupèdes ovipares , les rep- tiles , qui le refpirent aufti , font également privés de chaleur. Ce feroit parce que les uns & les autres ne refpircroient pa^ toutes les parties de l'air atmofphérique , ou /'dir complet , en particulier la portion qui fert à la produdtion de la chaleur dans les autres animaux. Nous favons donc que les infecles refpirent , qu'ils refpirent l'air atmofphérique ou complet, ou feulement quelqu'une des fubftances qu'il contient: comment refpirent-

Le long du corps , de chaque côté , font placées des ouvertures , que leur forme a tait comparer à des fortes de boutonnières, & à ces mouchetures, que àts perfonnages pieux s'infligent dans ditFérens pays fur la fuiface delà peau j on a i'.ommé ces ouver- tures du nom de ces mouchetures fiigmatesj C'eft l'entrée des canaux qui reçoivent l'air , & par lefquels il reifort ; leut nombre varie dans les différentes efpèces ; mais il eft en général à-peu- près double du nombre des anneaux dont le corps eft compofé, y ayant un ftigmate de chaque côté , fur chsque anneau j cependant il y a toujours quelques anneaux fur lefquels il n'y a pas de ftig- mates , ainfi leur nombre n'eft que près du double des anneaux ; au contraire , il y a quelquefois des endroits ou les ftigmates fontdoubles ; cela arrive fouvent, par exemple, fur lecorcelet , qu'il faut envifnger ici com- me un anneau faifant partie de ceux dont tout le corps eft formé.

Les ftigiTiates s'ouvrent chacun à l'entrée d'un canal fort court , formé d'anneaux carci-

XXXI)

lagiiieux ; on nomme ces difFcrens canaux les bronches \ celles ci fe terminent à des vaif- feaux également cartilagineux , compofés de même d'anneaux ; ils s'étendent de chaque cô:é du corps , d'une de fes extrémités à l'autre ; ces vailfeaux font nombreux , for- oient des faifceux confidérables ^ il en naît iies expaniions qui fe dirigent à toutes les parties du corps , on nomme ces vaifleaux , les faifceaux qu'ils forment, leurs expanfions , le tout enfemble , les trachées. Leurs expan- fions pénètrent dans toutes les parties , juf- qu'aux dernières extrémités , &: elles font pat tout fi nombreufes que les trachées font une poftion confidérable de la fubftance' des infedtes. Cependant à chaque côté d'un an- neau , à l'endroit s'ouvrent les bronches , les ttachécs forment un plexus plus marqué, réfultant d'un plus grand enlacement de vailfiiaux que dans la direftion d'un anneau à l'autre : ainfi, ce point peut être regardé comme la trachée proprement , {on prin- cipe, fa bafe , ou fa partie cfTentielle.

Les trachées qui fervent à la rtfpiration des infeâes , le canal qui y conduit l'air (k par lequel il en fort, font des vaiiïeaux car- tilagineux compofés d'anneaux ; les vailfeaux propres du poulmon, ceux qui lui font par- ticuliers & qui conftituent fa nature , le canal par lequel lair y entre &: en efl; expulfé , îbnt auflî des vailfeaux cartilagineux, com- pofés d'anneaux; il y a donc parité de fubf- tance dans l'organe immédiat de la refpira- tion , dans le canal qui y aboutit pour le palfage de l'air, entre les animaux en géné- ral i^ les infeélesj & les organes qu'on nomme trachées pourroient être & feroient aulli-bien nom'cni:i> poulmons ; car c'en (ont réel- lement ; mais les poulmons font circonfcrits à la cavité de la poitiine , ou s'ils s'étendent au-delà dans quelques animaux, comme les oifeaux , ce n'eft que peu & ils font feule- ment plus ou moins amples, ils occupent plus ou moins d'étendue ; mais dans les in- ieélcs ils n'ont pas de limites, rien ne les borne , ils s'étendent dans toutes les parties jufqu'au terme des dernières extcémitcs,

DISCOURS

jufqu'au dernier filet ou globule des aoten- nes j à la dernière nervure des aîles, au dernier crpchet qui termine le pied , & la malfe totale des trachées eftàcelledu corps des infeâies bien au-delTus de ce que la malle des poulmons eft à celle du corps des autres animaux : n'eft- ce pas à la fois une preuve j que les inledles ad.nettent & reçoivent à leur intérieur plus d'air que les autres animaux, & une raifon de prélumerque la refpiration leur eft encore plus néceilaire , qu'elle a fur eux une plus grande adion encore ?

Les vailfeaux qui admettent l'air dans les poulmons , & qui proprement les confti- tuent , font accompagnés dans leur trajet par des vailTcaux languins , comme nous l'avons dit; ces vaifleaux forment des plexus à l'exrrcmité des grouppes qui terminent les vailfeaux aériens &c les effets du palfage de l'air ou de la refpiration que nous rous rap- pelions , font d'atiénuer le fang , de mêler fes molécules j d'en augmenter la chaleur , de lui fournir certains principes ôc d'en extraire d'autres. Y a t-il de même dans les infectes des vaifleaux fanguins qui fuivenc les \ailfeaux aériens ou les trachées dans leur difliibution, & Iss effets delà circula- tion font-ils les mêmes? Je ne fâche pas qu'on ait répondu à ces deux qucftions j & je ne crois pas qu'on puifl"e y répondre dans l'état aétuel de la fcience. La ténuité des vailfeaux rendra toujours difficile, mais peut- être pas impolTible, la découverte des vaifleaux fanguins qui accompagnent probablement les vaifleaux aériens dans les infeéles comme dans les autres animaux. Quant aux effets de la refpirarion , il paroît ou que l'air ne communique pas au fang des iiifeéles , qui font des arimaux froids , le principe qui dans l'adle de la refpiration augmente la chaleur du fang des autres animaux, ou que ce principe eft communiqué aux infedes en fi petite quantité , que fon effet ne nous eft pas fenlible, qu'il nous échappe, & qu'il produit une chaleur fi foible que nous n'en fommes pas affeétés ; peiit-êtte ce principe eft il communique par la refpiration à ce foible

PRÉLIMINAIRE.

foible cîegré, & doivent-ils à ce principe le peu de chaleur qu'ils pofsèdenc , car on fait qu'ils ne font trôids que relativement. Pour les additions defubftances communiquées au fang des infedes par la refpiracion, fa dé- puration d'autres fubftances par ce même ade \ la difficulté de recueillir allez d'air relpiré par les infectes , pour le comparer à l'air atmofphcrique , rendra long tems cet objet incertain. Nous pouvons feulement , au défaut de l'expérience , penfer d'après l'Analogie, qu'un mécanifme pareil doit pro- duire les mêmes effets ; enhn , quant au mélange plus intime des globules du fang , à fa riuidité augmentée par la preflion exer- cée fur fa malle au moment de l'affailTement de la poitrine, il paroît d'abord que cet effet n'a pas lieu dans les infedt-is, parce que c'eft dans les autres animaux la fuite de la dila- lationalternativei&dela comprellîondela poi- trine,ou de fonclévation & de (on alaiffement, (Se qu'on n'obferverieii de ftmblableà ce mou- vement alternatif dans les infecles; cepen- dant ce mouvement peut avoir lieu réchap- per à nos regards; il peut s'exécuter fous le tégument cartilagineux qui couvre le corps , & qui réfille à l'unprellion du mouvement qui a lieu au-deffous, Se nous en dérobe la vue; & en eftet , à la partie du corps qui eft couverte d'un tégument plus fouple , fur le ventre dans les Coléoptères , on dillingue fouvent j & par intervalles, un mouvemeiît de dilatation &c de comprelîion alternatives; ce mouvement eft augmenté , comme celui de- la refpiration , par une agitation plus grande des infedtes en qui on le remarque \, il y a donc au moins prélomprion que ce mouvement exifte dans les infecles comme dans les autres animaux ^^ que la vue nous en eft dérobée par le têt qui les couvre , & que les effets font les mêmes.

Nous favons d'après ce qui vient d'être dit, i''. que les infectes refpirent ; i°. qu'ils refpirent l'air atmofphérique ; 5 ".qu'ils ne refpirent point parla bouche, mais par des ouvertures placées le long du corps de cha- que côté fur les anneaux dont il eft compoféj

Hijïoire Naturelle , infccles. Tome I.

XXX! IJ

4*^. que les infectes ont de véritables ponU mons , puifque les organes qui fervent à leur refpiration ont la même conformation que les poulmons ; 5°. que les 'poulmons ne font point circonicrits & bornés dans les infedes à une partie^ mais qu'ils s'étenden.c dans toutes-, (î°. que le canal qui leur tranfiiîec l'air & par lequel il relfort , eft aulli conformé comme dansles autres animaux; & 7". qu'à chaque anneau ce canal aboutit, les tra- chées forment un plexus qui , à caufe de fon volume, de l'enlalFement des vailTeaux , peu: être regardé comme un pouimon, qui communique cependant par la fuite àss tra- chées avec les autres poulmons placés aulïï deux" à deux fur chaque anneau.

Il y a donc parité entre les infectes & les autres animaux dans la ftrudure & la fubf- tance des poulmons, dans la néctfîité de refpirer^ dans le Huide qui eftrefpiré, &ces objets font ce qu'il y a d'effenticl dans la refpiration de dans fon mécanifme : ainil, nous favons que les organes de la refpira- tion font au fond & ellentiêllement les mê- mes dans les infeéles que dans les autres animaux; qu'ils n'en diffèrent que par des circonftances qui ne changent pas le méca- nifme; qu'on peut par conféquent conclure qu'il eft le même. Quant aux effets de la refpiration, nous foinmes bornés , jufqu'i préfent, à conclure d'après l'analogie , qu'ils font probablement les mêmes dans les in- feéles que dans les autres animaux , puif- qu'ilya parité, en ce qui efteffentieliSc con- iîitutifdans les organes qui fervent à cette fondlion.

Si l'on fépare tranfvcrfalement, les uns d'avec les autres , les anneaux doiit le corps d'un infeéte eft compoféj il l'on a pris garde d'endommager les anneaux & qu'on les ait féparés à leur jondion les uns avec les autres , chacun de ceux fur qui' des ftig- mates font placés, contiendra , après la fec- tion, deux poulmons complets comme au- paravant ; la feule différence qu'il y aura , c'eft que ces poulmons ne communiqueron!: plus avec les autres poulmons , & que leurs

DISCOURS

expanfions feront bornées aux parties que chaque anneau renferme. Qu'on fe rappelle que chaque anneau fcparé du corps con- tient un de ces nœuds ou ganglions dont la f-?rie conftirue le cerveau, & qui font chacun un cerveau complet ; que cliaque anneau contient de même, après lafedion, un de ceb r^nflemens du long vailleau , qui eft le cœur, & donc ciiaque renflement efl un cœi.r complet : on reconnoîtra alors que chaque anneau eft un corps organifé qui contient un cerveau, un cœur, des poul- mons , ou les trois organes dont l'adlion a pour produit l'cxiftence animale adluelle; chaque anneau féparé du corps , peut donc être regardé comme un animal aduellement exirtarc , & c'en eft un en efter, puifque c'eft un corps organique qui a tout ce qui el\ néceftaire pour produire l'irritabilitc , la cir- culation (Se la refpirarion : auftî chaque an- neau continue-t-il d'exifter, de conferver quelque tems la vie après fa fcparation d'avec le corps, & les anneaux fur lefquels fe trouvant des pani^s nécelTaires pour les différeus mouvemens , continuent de les exé- cuter ? Ainfi , les aîles continuent leur battement, les pieds, leurs extenfions & leurs flexions j la trompe ou l'aiguillon , leur alon- gemenc & leur racourcillemenc après la fé- paration des anneaux auxquels ces parties font attachées d'avec le relîe du corps : c'eft donc parce que chaque anneau ou chaque portion da.is lefquels on divife tranfverfalemenc un infecte , contient les organes nécedaires à i'exiftence aduelle , que chaque anneau ou chaque potcion continue réellement d'exifter aiftuellemenc & pour quelque tems après 1a réparation d'avec le corps. Mais cette exif- tence ne fauroic être long-tems fourenue, pari e que les fondions des organes qui la proJuifoiit ufent ces mêmes organes , les conduifent , par épuifement, à la celfation de leurs fondions , s'ils ne reçoivent pas d'ailleurs de nouvelle lubftance qui lei ali- mente & qui les mette en état de continuer leur aélion remarruonsde plus qu'un anneau du ciirps d'un infefte borné aux leuls organes néceftaires à I'exiftence aduelle , ne diftingiie

pas les objets, nedifcerne pasceiixquilui font utiles ou nuifbles ; ne fauroit s'a|^:prccher des uns, les rechercher , s'éloigner des autres & les éviter j il refte donc expofé à tous les accidens étrangers , qui ne peuvent manquer de rendre fa deftruâion prochaine , & fon exiftence ne peut qu'être courte par ces deux raifons : cependant quelques anneaux du corps des infcdes continuent d'exifter plu- fieurs heures, même unt: journée après leur féparation d'avec le corps ; tels font c<ux qui forment le corceler , ceux auxquels Taiguil- lon ou la trompe font attaches: il eft proba- ble que les organes contenus dans ces an- neaux, font ou plus vo.umineux, ou ccnfti- tués plus fortement.

C'eft par une fuire de l'organifation qui produit I'exiftence aétuelle de chaque anneau féparé du corps , que celle des infed-rs en- tiers eft fi difficile à éteindre dans le moment; qu'ils réliftent fi long tems à des plaies fi multipliées , que pour les tuer , il faut, pour ainfi dire , les frapper dans toutes les parties à la fois ; c'eft que chaque portion contient ce qui eft néctllaire pour I'exiftence aétuelle, qu'on ne l'anéantit que dans le point frappé dont on détruit l'organifation , ëi que l'exil- tence de tout le corps fe compole de I'exif- tence particulière de chaque portion dont l'organifation fubfifte encore. Ainfi , l'infede eft aftoibli , rn lis il n'eft pas tué par les plaies multipliées j il n'en faut fouvenc qu'une pour ôter la vie aux autres animaux , parce qu'une plaie faite à un des organes nécellaires à l'exift^-nce , fntfit pour en arrêter l'aètion, & qi e cette adtion n'eft éteinte dans les in- fedes que quand ils ont été bleftés dans tous les points de leur corps, parce que tous ren- terment les trois organes nécellaires à I'exif- tence aduelle.

§. m.

De l'exijlence prolongée , des fonElions qui fervent à l'entretenir , & des organes em- ployts à ces fonclions.

Nous avons vu dans le paragraphe précc- cédent , que I'exiftence aduelle eft le produsE

T R B L 1 M

de trois foriiSïons , tirrhabUité , lu circula- tion , la refpiration ; que crois organes fer- vent à ces fondions , le cerveau , le cœur , les poulmons. Mais la ftrudlure de ces orga- nes eft telle que leur adion doit avoir un terme , & que ce terme eft détermine par leur ailion mcme ; il eft ou éloigné ou prochain. Le terme éloigné eft la cellacion de i'exifteuce ii laquelle fa produtlion & fon entretien conduisent , mais après un laps de tems ; le rerme prochain feroit de même la celfacion de l'exiftence , t\' il arriveroit bientôt , ii les organes qui la produifent , épuifcs par leurs actions mêmes , n'étoient pas réparés & mis en état de b continuer. Ceci demande à être développé.

Lcsofcillationsdela fibre , fes mouvemens en raprochent , en réuniftent lesélémens . les rendent plus compaâs, & la fibre plus fèche, moins fouple il en arrive autant aux mem- branes qui fonc formées par la jonitiondesli- bres,& aux valleaux quiréfnUent duconcours_, de la luperpoluion des membranes \ celles- ci deviennen: plus épriilfes , plus denfes , plus arides j les vailfeaux perdent de leur capacité en acquérant plus d'épallfeur dans leurs parois j ils lonc moins expanfibles , plus lents à fe coiuraél^jr , & leurs ofcillanons moins gran- des ; toutes les parties n'étant qu'un compofé de vailfeaux , perdent de leur molleire j pren- nent une conlirtance plus denfe , font moins fouples j moins flexibles , moins iiritables; leurs mouvemens fonc plus difficiles , moins prompts j moins étendus ; les fluides circu- lent plus lenteaienc, ils lonc moins atténués , leurs molécules font moins intimement mê- lées , ils contradent de la vifcofité j ils tra- verfent plus difficilement les couloirs qui doivent en féparer les différentes humeurs \ elles font ex-raites en moindre quantité , (S^ d'une qualité moins bonne ; toutes les fonc- tions paiticipent à css altérations \ c'eft un cercle qui a fon origine dans la denlité & la rigidité de la fibre augmentées ; alors com- mence le dépétiirement \ il eft lent d'abord & infenfible } il eft enfuite fuccelîif , remar- quable &: gradué } il eft rapide vers la fin.

I N A I R E. XXXV

Il s'annonce au commencement par moii>s de fouplefte , d'embonpoint , de facilité , de promptitude & d'accord dans les dilTérens mouvemens \ il devient plus remarquable en- fuite j par l'augmentation de ces différentes conditions qui finilfenc par être portées à l'extrême ; alors tontes les parties amaigàes, roides , ont peu de fenfib;lité c^ de fl^-xibi- lité ; leurs mouvemens lents &: pénibles ne s'exécutent qu'avec efîort , ^; ils celfent touc- à-fait quand l'inflexibilité de la fibre furpalTe l'adion du principe moteur que les cire nC- tances énoncées ont graduellement affoibli. Cet inftant eft celui de la ceiration de l'exif- tence ou de la mort , terme inévitable que l'auteur de toute exiftence , qui en polfède fcul une fans bornes , & qui n'en a prê:é qu'une palfagère & mécfiaiiique aux animaux , aux corps organifés, leur aimpifcà tous , dont il a fait dériver le principe des caufes mêmes qui produifent d'abord , entretiennenc enlu te quelque tems & finilfenc par arrêter ou dé- truire leur exiftence. Les infeéles font , com- me les autres animaux, fournis à cette loi fans exception _, Se ils fouriùlFent des preu- v s au moins bien fenfibles de la manière dont elle s'accomplit , s'ils n'en fourniffcnc pas de plus marquées. En effet , toutes les p.rties des ditférens animaux ont plus de m 'lleire , font plus Toupies à p'oportion qu'ils font plus jeunes \ ils ont plus de chair &: d'em- bonpoint quand ils font au terme de leur accroilTement, mais qu'ils ne l'ont pas p»flé, ou feulement depuis peu de teins ; 2a delà de ce terme , au contraire, & à mefure que les animaux s'en éloignent , ils perdent de leur embonpoint , de la mollelfe & de la fou- plefte de leurs parties qui finllfent par être amaigries , roides & très peu flexibles \ leur corps eft alors décharné , prefqu;; dur , ou au moins a peu de fouplelfe dans toutes fes parties. De même les fluides font en propor- tion des folides , plus abondans dans k jeu- nelfe , toutes les parties fonc abreuvées de plus de lues , & les fluides ont moins ds vifcofité ; dans la vieilleire ^ au contraire ^ il y a mollis de fluides en proportion des foli- des , les différeiu&s parties font moins humec-

xxxvj DISC

xées , contiennent moins de fucs & les flii'- des Ibnc pins vifqueux. Tous ces change - mens fonc encore plus marqués dans les in- feties que dans les autres animaux -.on fait, en général , qu'ils palfent par differens états ; les premiers répondent à la jeunelTe des autres animaux , & cynftituent la leur ; tout leui corps dans ces premiers états eft fonple , prerque mol ; ils abondent en fcrufité tàc en fucs j leur fubllance n'eft prefque qu'une pulpe délayée par un fluide abondant ; dans leur dernier état, au contraire, qui ell leur vieiileffe , tout leur corps a une confiftance folide &: dure ; toutes leurs parties paroilfent fèches , £c femblent contenir à peine quel- ques fucs qu'on ne trouve , en une certaine abondance , que dans les vifcères , & fpécia- lement dans les organes de la génération ils femblent s'être ralfemblés. La difF^rence de fouplelTe dans les folides , d'abondance dans les fluides dans les differens âges , ell donc plus marquée encore dans les infeftes que dans les autres animaux ; comme cecte diffcr'-'nce eft extrême dans le dernier érar des infeâes , qui eft celui ils cefTent d'exiîler, il s'cnfui: qu'elle eft la caufe de la celTacion de leur exsftence , & qu'elle eft l'effet des caules qui l'avaient produite c'^i entretenue , comme on le reconnoît , en général , à l'é- gatd des autres animaux.

Le ternr: fatal de l'exiftence , fuite de fes caufes , eft donc éloigné dans l'ordre naturel ^ n>ais différences circonftances peuvent le ren- dre prochain ; il le feroit d'abord fi les orga ne:quiproduifent, qui entretiennent (|ue!que tems l'exiftence , épuifcs par leur propre adtion , ne recevoient pas de quoi réparer leurs pertes , fi ils n'étoient pas alimentés & rèftautés : z°. les animaux expofés au choc , à la-chùte des corps , à leurs différentes ac lions fur eux , ayant à remplir , pour exifter , differens befoins, comme celui de chercher, de trouver l\ de prendre des alimens , fe- roient fans ceffe dans le danger imminent de périr , s'ils ne difcernoient pas ce qui leur eft utile ou n'^ifible j s'ils n'avoient pas la faculté de rechercher l'un 6c de s'en ap-

OURS

procher , celle de s'éloigner de l'autre de de l'éviter.

Pour que l'exiftence/oit prolongée, il faut

onc , 1°. que les organes

foient alimentés

& reftaurés j cette première condition eft remplie par la digeftion & fes fuites : t'^. que les animaux diftniguent ce qui leur eft ruifi-

ble ou avantageux : l'exercice &: le raviport des

fens leur en procurant la faculté

: 5 . qi

u'iis

s'approchent de ce qui leur eft utile , & s'en mettent en pofleflion j qu'ils s'éloignent de ce qui peut leur nuire , & l'évitent ; le mou- vement progreflif la faculté de changer totalement de place , de varier la podtion de certaines parties , d'en faifir ou de reponirer les obj.rs par leur moyen , fatisfont à cette troifième condition. Nous allons traiter de chacune féi^arément , après avoir remarqué que de même que l'exiftence aduelle eft le produit de trois fondions, trois caufes la pro- longent 6: l'entretiennent, la nutrition des or- ganes , ledifcernemcnc des objets , la faculté de les poffeder ou de les rcieuer.

De la digeflim , première des trois fonclions qui corxourent à eonferver & prolonger l'ex'ifience.

La digeftion eft une fondion par le moyen de laquelle les organes qui y fervent font fu- bir differens changemeiis aux alimens , i^- en extraient des fucs propres à nourrir les diffé- rentes parties , à réparer les pertes qu'elles ont fouffertes : la digeftion proprement dite , les changemens que fubiffent les alimens (Se l'extraiftion des fucs nourrie iers qu'ils f«ur- niffent , s'exécutent dans l'eftomac & les in- teftins, par leur adion & par elle de diffé- rentes caufes qui concourent u même but , comtiv: nous le verrons ', mais la digeftioii exi^e des conditions qui la précèdent , de elle a des fuites qui en font des effets : elle peut donc être partagée en rrois tems ; con- ditions qui la devancent , digeftion propre- meur dite, fuites de la digeftion \ les con- ditions qui la précèdent font le choix des ali- mens , la manière de s'en mettre en poffef-

PRÉLIMINAIRE.

(îon , de leur paCIage dans l'eftom.ic. La di- certion , pioprement due , confiée dans les changemens que les alimens fubilLmc dans l'eftomac ; fes fuices font l'exrradtion des fucs nourriciers , leur mélange ave: le fang , leur applicacion aux difFcrenies parcies , ou la nu- trition & rexpuifion des parties inutiles dont les fucs ont été extraits.

Du choix des alimens , de la manière de les prendre , de leur p^Uu^c à l'ejîomac , & des parues employées à ces objets.

Les parcies qui fervent à prendre des aU- mciis , à leur faire fubir certaines prépara- tions nécelfaires avant leur pallage dans l'ello- mic , varient autant entre les animaux de diîTérens genres , que la nature des alimens même , en forte qu'il paroic que le choix des alimens , quant A leur nature , eft déterminé par leur convenance avec les parties qui ont aélion fur leur fubftance \ fi l'on fuit cet ob- jet , on trouve auHi des rapports entre les parties internes qui fervent, à la digeftion proprement dite , la nature des alimens t\' les parties qui ag'.dent fur eux avant leur paf- fa^'e dans l'cltomac j tout ceci peut aiiémenc être éclairci par des exemples.

Tous les animaux fe nourrilTent , en gé- néral , iU de chairs '.'ù df végétaux ; les qua drupèdcs qui vivtnt de chairs ont la bouche garnie <^e dents , qui , fuivant leur forme , fervent à couper les chairs , à les déchirer , à les broyer , même à broyer les tendons , les cartilages & les os : leur mâchoire eft forte & mue par des mufcies puilT!\ns en eux-mêmes par la denhté de leur hbre ; la puilfance de ces mufcles eft encore augmen- tée par la longueur du levier par lequel ils agilfent ; ces quadrupèdes réduifenc donc leurs alimens , avant qu'ils pafllnc a l'elto- mac , par Taétion qu'ils fubiffent dans la bouche _, en .un holus ou iine forte de pulpe formée par le mélangj des parties des ali- mens brifés , divifés , réduits en fragmens , pénétres & déiayés par la faUve qui coule en abondance dans la bouche de ces quadru-

XXXVij

pèdes pendant la maftication \ leur eflomac eft membraneux , ils n'en ont qu'un , il eft moins ample , & leurs inteftins iont moins longs que ceux des quadrupèdes tjui vivent de végéta'^x. Ils n'avoient btfoin de viscères ni aulli forts , ni d'un aufti long féjour dans les vifcères pour extraire les fucs nourriciers d'alimens broyés , réduits en pulpe , plus abondans en fucs & plis prêts , mieux diipo- fés à les h)urnir ; tous ces quadrupèdes ont des doigts aux pieds , &: ces doigts font ter- minés par des ongles ou grilTes \ ils fervent à retenir la malle des chairs pendant la maf- tication , par la preliion du pied i5: l'adion des griffes, tandi? que les dents enlèvent, arrachent des lambeaux de la même malle. Mais les quadrupèdes carnivores fe nourrif- fent les uns de chair morte , les autres de proie vivante. Les premiers n'ont beicin , pour enlever des parties de la malfe des chairs qui ne fe dérobe pas à leuradion , que de la fixer par la preilion du pied , leurs doigts font plus giêles , plus courts , moins longs , ils fe plient moins j ils Iont moins torts & termi- nés par des oncles plus courts , moins acé- rés ^ moins rranchans , moins courbes <!' plus foibies en totalité : les antres ont à la fois befoin d'jrrêter , de fixer une proie , fouvenc très- forte , qui tend à s échapper , qui ré,- li!^e , fe débar , oppofe de violens efforts j qu'il faut retenir , affoiblir , & à qui , pour ce dernier but , il faut fiire de larges , pro- fondes & nombreufes blelfures; leur pied eft large , terminé par des doigts longs , épais , qu'ils étendent & plient aifémenr ; les griffes qui les rerminent font fortes , très-arquées , fort longues , tranchanres , 6c finiilent en une pointe bien acérée: les nnifcles qui fer- vent à mouvoir , ces redoutables iiiftpumeiis font plus fournis, d'un riffu plus ferré, plus fort.

Les quadrupèdes qui vivenr de vé.^craux , n'ont ni à faidr dV .i arrêter !.;:r proie , ni à la fixer \ elle tien' dans l'ordre iiaturei au fol , & fait partie d'un roue qui n'a pas de mouvement : elle réf fte par fon" adhérence à ce tout , attaché lui-même au fol , & elle

xxxviîj DISC

en eft plus facile à prendre. Il fuffit de la faifir , & ou de la couper , ou de la rompre j pour la réparer du tout dont elle fait partie ^ de l'écrafer enfuite pour en rapprocher les parties , &c en former une malfe propre à palfer dans l'eftomac. Les lèvres ou la langue portée hors de la bouche , repliée , ou l'un «Se l'autre en même-tems , fervent à faifir , à rapprocher les feuilles , les tiges , les ra- meaux des végétaux , à en former un faif- ceau; il eft féparé du tout auquel il tient, ou par les dents placées fur le devant de la bouche , qui font plates & coupantes , ou il eft arraché par la fecoufte que lui font éprouver les lèvres & la langue , qui l'en- tourent & l'étreignent j & ces deux adions ont communément lieu l'une après l'autre : l'aliment eft enfuite porté par la langue au fond de la bouche , & il y eft ccrafé entre deux rangs de dents , terminées par une large couronne , inégale, couverte d'afpérités, pla- cées des deux côtés. Les plus grands des qua- drupèdes dont nous examinons la manière de prendre leurs alimens , n'ont le pied ter- miné ni par des doigts, ni par des ongles , mais par un fabot d'une feule pièce , ou une cotne fendue } il ne peut être employé pour rien faifir , rien fixer : les petits quadrupèdes qui vivent de la même manière , ont le pied formé par des doigts , terminés par des ongles \ mais les doigts font courts , fort peu flexibles , & les ongles prefque droits , ne font pas acérés à leur pointe , ni tranchans fur les côtés. Ces quadrupèdes peuvent bien fe fervir de leurs pieds pour touir la terre dans laquelle beaucoup fe creufent des re- traites, mais ils ne peuvent ni en rien faifir, ni rien empoigner , ni percer par le moyen de leurs ongles ; fi quelques-uns , comme l'écureuil, tiennent leurs alimens , & lespor- ,ent à leur bouche , c'eft en les comprimant entre les deux furfaces de leurs pieds de devant rapproches j ce qui eft un autre ordre de chofes. Les quadrupèdes qui vivent de végétaux, ont ou plufieurs eftomacs , comme les ruminans , ou leur eftomac eft formé par des membranes plus épailfes ; il eft engincral plus ample , leurs inceftins font plus longs ,

OURS

ôc les alimens ; dont les Aies font moins nourrilfans , donc la féparation eft plus lente, y font un plus long féjour ; enfin les carni- vores prennent à proportion une malle d'a- limens moins forte , parce que leurs ali- mens font plus nourrilfans j & les herbivores une malfe plus grande , parce que leurs ali- mens contiennent moins de fucs.

L'exemple des quadrupèdes, que je viens d'obferver en général , prouve donc qu'il y a rapport entre la nature des alimens , les parties qui fervent à les prendre , à leur faire fubir les préparations nécelfaires dans la bouche j à en faire la digeftiondans l'eftomac, & l'extradion de leurs fucs dans lesinteftins. Le même ordre de chofes fe retrouve parmi lesinfedesj &, pour defcendregraduellemeiK jufqu'à eux , je citerai quelques exem- ples empruntés des oifeaux. Ceux qui fe nourrilfent de chair, vivent comme les qua- drupèdes carnivores , ou d'une proie qu'ils arrêtent, qui fe défend, qu'ils blellent , qu'ils tuent & qu'ils déchirent , ou la chair morte eft leur pâture. Les premiers ontle pied gros, large, les doigts longs, très-flexibles, leurs ferres ou ongles font fortes , longues, tran- chantes fur les côtés, acérées à la pointe, & forment à-peu-près un demi- cercle j leurs jambes font couvertes de mufcles bien four- nis , d'un tilfu denfe j leur fibre eft courte 8c trèî- forte j ils agiifent par de longs tendons très-forts, dont des poulies de renvoi, placées fur les doigts , rendent l'adion direde , la fortifient par la longueur du levier , & fa proximité du doigt & de la ferre ; leur bec eft fort long &: fort gros, d'une fubftance cornée , très-forte; fa partie fupéiieure eft fortement arquée , fa courbure commence dès l'origine, Ôc fon extrémité forme un crochet dont les côtés font tranchans , dont la pointe eft très - aiguë ; fouvent entre ce crochet &c la partie du bec , dont il prend nailfance , il y a de chaque côté une échan- crure & un prolongement en pointe , de la fubftance du bec ; ce font deux crochets de plus , un de chaque côté , qui concourent à l'adion du crochet , qui fait la pointe du.

PRÉLIMINAIRE.

bec; fa partie inférieure ell une forre de ceuilleton crès forr , tranchant ftir les côtés , vers Ion dernier tiers de longueur , & à fa pointe; ainti ce ceuilleron enfoncé dans les chairs , les coupe &: les fépare en deflous , tandis que les crochets de la partie fiipérieure les arrachent. Ces deux formidables portions du bec font miles tn adion par des mufcles plus deii Tes j fournis de fibres pluç courtes, plus jiombreufes, plus ferrées,, plus fortes, que les mufcles moteurs du bec à.t% autres oiieaux; c'ell une des raifons pour lef-^uelles ceux ci ont à proportion la tcie plus grolfe ; tous ces moyens réunis les mettent en état d'ar- rêter leur proie , de rendre f^s efforts vains j de lui taire de nonibreufes &c profondes blef- fures , de déchirer fes chairs, de broyer même les os , & de les réduire, fous la prelîion & le tranchant de leur bec , en morceaux au moins grolîiers ; la ftruclure de leur eftomac répond à la nature de leurs alimens ; il elt membraneux , il contient des mufcles très- forts , mais qui ne le font pas autant que ceux de l'edomac des oifeaux de proie qui vivent de chair morte , qui n'ont pas les mê- mes moyens de la divifer ; les uns &: les autres onr l'eRomac d'un tilfu infiniment moins fort que les oifeaux granivores qui avalent leur aliment fans l'ccrafer. Il entre dans la compofition de Teftomac de ceux ci des muf- cles bien plus forts , d'un titfu plus ferré, & ce vifcère , au lieu d être compolé de mem- branes & de mufcles , comme dans les oi- feaux de proie , paroît entièrement mtifcu- laire , fa membrane interne même paroît apcnévrotique & une cxpanfion des fibres mufcnlaires externes. Mais la comparaifon de l'ertomac nous a détourné de celle des pieds & du bec dans les oifeaux de proie qui vivent de chair morte ; leur pied eft à proportion du volume total du corps , plus court , moins gros ; leur cuitfe ell moins fournie de mufc'es ; leurs doigts font moins flexibles; les ongles qui les terminent font ou droirs ou à peine courbés , ils ne font pas tranchans fut les cotés , &.' ils finilfent par une pointe mouffe ; le bec eft moins e'' i J , d'une fublUnce moins forte ; fa courbure ne

commence que loin de fon origine & fa pointe , ou le ctochet qui le termine , qui eft toujours unique , n'eft ni coupante fur les côtés , ni bien acérée à fa pointe. On peut s'alfurer de toutes ces différences , en compa- rant les Vautours , qui ne fe nourriffent que de chair morte , aux oifeaux de rapine , qin artêtent une pioie vivante.

Je n'entrerai pas , pour ne pas excéder les bornes , dans tous -les détails qui préfentenc (^' prouvent des rapports entre la nature des alimens des différens oifeaux , les parties qui leur fervent à les prendre , & celles qui en opèrent la digeftion proprement dite. Je re- marquerai feulement les faits les plus frap- pans.

Les oifeaux qui vivent de fubftances ani- males, ou d'animaux entiers qu'ils avalent, qui j par la nature de leurs alimens , doivent être placés à la fuite des oifeaux de poie pro- prement dits , ou n'ont point de proie à ar- rêter j ou ils n'attaquent qu'une proie foible, hors d'état de réfifter , mais difficile à /aifir à caufe des retraites qu'elle habite , & oii elle fe retire & fe cache , des lieuK elle vit, quelquefois à caufe de fa forme. On peut remarquer des rapports entre les parties qui fervent ces oifeaux à prendre des alimens, & les circonftances différentes que préfentent ces alimens , iSc entre la nature des alimens ik. la flrudure de l'effùmac des oifeaux qui s'en nourrident. Je commence par lesoileaux de la famille des corbeaux ; il-, vivent éga- lement de chair corrompii-e , de vers , d in- fectes & de différens grains; leur bec eft très- fort, droit , il approche par la pointe de La forme d'un coin ; il eft propre à détacher des lambeaux dune chair que la purréfac- tion ramollir, à pénétrer dans la terre pour y faihr les vers & les infedes , même à la retourner , comme le font ces oifeaux , pour découvrir leur proie. C'eft par cette raifon qu'ils fréquentent en hiver les terres labourées plus meubles , plus faciles à re- tourner, cv' il eft plus aif.- de découv:ir 1 les vers (Se les jufettes. Letu: eftomac appto-

xl

DISCOURS

cïP^de la {Itudare de celui des oifeaiix purement granivores , mais il n'eft pasaufli fore.

Les Pics Se les Grimpereaux qui fe nour- rîdenc les premiers des iiifeâes ent-oncés dans les trous des arbres , que ces mêmes infec- tes ont perces ; les féconds de ceux qui fe cachent entre les gerfures de l'écorcej ont chacun une conformation & des inftrumens qui répondent à leur manière de vivre. Les oifeaux de ces deux genres ont des doigts longs , des ongles crochus , tels qu'il en faut pour gravir le long du tronc & des bran- ches ; tous les Pics 6c plalîeurs Grimpereaux ont une queue dont la courbure a fon extré- mité , la force &: la roideur des parties qui la compofent , favotifent leur fufpenfion aux arbres en fervant de point d'appui j le bec des Grimpereaux qui cherchent les plus pe- tits infedes entre les gerfures les moins écar- tées , ont le bec long , effilé & arqué. Il lie faut pas confondre avec Us Grimpereaux qui vivent Itiidement de la manière énoncés dans 410s climats froids , ils ne trouvent , pendant l'hiver , d'infedes qu'entre les ger- fures , avec ceux qi;i habiïans des pays chauds , ne font que courir fur les bran- ches horizontales , ou peu inclinées , & y trouvent en tout tems une pâture plus abon- dante j moins difficile à ramalfer. Les Pics font leur proie de vçn Se de larves caches dans des trous , fouvent profonds , dont l'ouverture eft très étroite, & qui vont en s'éhirgilfant ; ces dimenfions font fondées fur ce qne l'infeéle , caché au fond du trou dont il remplit la capacité, étoit fort petit quand il a commencé à. l'ouvrir du côté de l'écorce , qu'il a aggrandi ce même trou en profondeur Se en diamètre , à proportion qu'il a lui-même augmenté de volume ; les Pics ont donc detix choies à faire pour tirer lesinfeétes de leur retraite !k s'en nour- rir ; 1°. à pénétrer jufqu'à eux; 1". à agrandir aifez le tron , fuivant toute fa pro- fondeur , pour qu'il lailfe palfer le corps de l'infeéie ; leur bec très- long ^ , formé d'une fubllance cornée, compade, dure, pefante,

terminé en pointe à chaque mandibule , & de chaque côté en bifeau , eft par lui-même une forte de cifeau très- tranchant & de coin très-fort ; il eft propre à couper les fibres du bois j à les rompre , à les écarter ; le poids d'une tête énorme & difproportionnée dans la plupart des Pics , augmente par fa malfe les coups portés pat le bec : la langue eft un muîcle arrondi; elle a la forme d'un ver; elle eft terminée par un cartilage pointu fort folide : l'oifeau peut la retirer toute en- tière à l'intérieur & la darder bien au-delà de fon bec ; il l'enfonce donc dans le trou qu'il a fuffifamment élargi ; il en darde la pointe fur l'infede qui eft caché, il la retire, & avec elle l'infede empalé à fa pointe. Les feuls oifeaux fourniroient une foule d'exem- ples : que n'y auroit-il pas à dire fur la langue, en forme de trompe , des Oifeaux- Mouches ôc des Colibris , & de la fuhilance liquide dont ils fe rourriilent: fur le bechn, droit & pointu des Figuiers , qui vivent de la pulpe des baits & des fruits dont i s n'ont que l'enveloppe, peu folide, apercer ; fur celui des Méfanges , également court iS: pointu, mais gros, conique, d'une fuhftance bien plus folide, qui, !ans être individuel- lement beaucoup plus forts, percent à coups redoublés leboisdes noifettes & des difféten- rentes amandes; fur la force des deux por- tions ou mandibules coniques du bec des oifeaux qui écorcent le grain , de ceux qui le broient avant de l'avaler ; fur la forme du bec femblable à des cifeaux courbes, donc les deux branches feroient dirigées en fens contraire du bec croiié qui cerne &: fépare les écailles ferrées , fortement jointes , des pommes de pins & autres fruits analogues, pour trouver delFous l'amande dont il fe nourrit , ôzc. ? Mais je finis par les traits que me fourniifent lesCanards (Si: les Hérons: les oifeaux de ces deux genres fe nourrillent ou en totalité, ou en partie, de poilfons ; c'eft une proie dont la fuite eft rapide j qui , couverte d'écailles unies j dures , glilfantes, eft difficile à arrêter, è, retenir, qui fe fouf- trait à la prelfion (S; échappe aifément. Le bec large &: applati des Canards agit par une furface

PRELIMINAIRE.

xlj

furface étendue j fa paitie fupérieure eft ter- minée par un ongle: coutbe «Se tranchant , & les côtés des deux mandibules font gar- nis tranfverfalement à l'intérieur d'afpérités, rangées fur des lignes parallèles , femblables aux dents d'une Urne ; elles font inclinées de devant en arrière , & cette direction ell d'autant plus marquée, que les afpériiés plus longues relTemblent davantage, fuivant les efpc'ces , à de véritables dents ; toutes ces con- ditions rendent le bec des oifeaux, du genre du Canard, propre à comprimer fortement, à froilîer &: fdlonner une furface polie , (Si par conféquent à failir la proie qui con- vient à ces animaux , à la retenir & la taire palier, par la dircd;ion des crochets dont leur bec eft armé , vers leur intérieur.

Le Héron a le bec long , très fort ; fes deux portions ont à- peu-près les mêmes di- menfions : elles ne font pas filionnées par àts dents , mais les bords en font tranchans dans route leur longueur , & ils s'appliquent exfiiflement l'un fur l'autre ; il en rcfulte que le Héron qui failît un poilfon , le comprime entre deux pinces très-fortes, qui pénètrent la furface de fes écailles , & le preilent dans une grande étendue j ce moyen eft donc propre pour l'arrêter & s'en emparer ; c'ell ordinairement en travers , par le milieu du corps j que le Héron failit le poiilon ; cette pofition n'eft pas convenable pour l'avaler ; i'oifeau qui fe retire du bord de l'eau en tenant fa proie entre les deux portions de fon bec , la jette d'un cou de tète en Pair ; le poids de la tête du poilfon entraîne le corps qui retombe & détetminefa direction ; le Héron le reçoit dans l'ouverture de ion large bec qu'il tient ouvert; la forme du poilTon , fa furface lilfe , rendent fon paflage aifé vers l'ertomac de I'oifeau ; fi on lui hrit lâcher fa proie au moment il vient de la retirer de l'eau , & qu'on l'examine , on la trouvera coritufe en travers , & l'on diftinguera fur les écailles rimprellloa des bords tranchans des deux mandibules.

Le Canard qui vit depoitTons, de diff:- remes parties des végétaux , & de beaucoup Hcjlouc Naturelle, Infères. Tome I.

de grain, i IVflomac fort & mufclécomma celui des oifeaux granivores ; il lui étoit né- celTIrire de pouvoir à la fois le plus & le moins. Le Héron , qui ne vit que de poilfon , a l'cftomac beaucoup moir.s l'or: , & qui approche plus de la conformation de l'efto- mac des animaux carnivores , que de celle de l'eftomac des oifeaux granivores. Mais j'ai été entraîné par la facilité à multiplier les exemples qui prouveiit le rapport entre la nature des alimens , les parties qui ferveur à les prendre & à en faire la digeftion. je paiïe aux infeéteî , qui font mon objet prin- cipal.

Les infeéles vont nous fournir des preuves plus fortes encore , que les autres animaux , des rapports que nous examinons. On laie que les infecles pafTent la plupart par difté- rens états , ou différentes formes; que beau- coup fe nourrirent d'alimens diflcrens, dans leurs ditférens états ; que ceux qui en fu- bilfent trois, ne prennent pas d'alimens dans le fécond. Les parties qui fervent à en prendre dans le premier état , ne font pas, dans beau, coup d'efpèces, les mêmes qui fervent à en prendre dans le troifième ; &l dans d'autres ef- pèces, il y a des différences très-grandes entre ces parties, qui cependant ont quelques rap- ports dans les deux états pendant lefquels l'in- fecle prend de la nourtiture. Dans l'état mitoyen l'infeéle n'a point de parties qui puillent lui fervir à prendre de la nourriture. Entre le premier &: le dernier , il y a des dirterences très grandes dans les vifcères , à l'intérieur defquels la digeftion s'opère , comme il y en a entre la nature des alimens fort ditférens aulîî dans ces deux états.

Je commence par le Papillon qui fubic crois érats, dont l'exemple eft frappant , iSc peut être appliqué à beaucoup d'autres in- fcdes.

L'état de Chenille eft le premier du Pa- pillon , qu'elle contient à fon intérieur déjà formé , mais non pas développé j comme noji i e>:poferons en traitant de* changeniens

xlij

DISCOURS

ou méramorphofes : dans ce premier état , la Chenille &: le Papillon jour lequel elle vit , pour l'accroiirement & le développement duquel elle fe nourrit & croît , vivent com- munément des feuilles ou des tiges , ë< des boutons tendres des végétaux j quelquefois de leurs fruits , quelquefois auili de leurs femences, ou des libres même du bois j le Papillon entièrement développé , parvenu à tout fon accroiirement, pompe pour fe nourrir dans fon troilième état , le fuc des fleurs _, le miel extrait & dépofé dans les ne6laires. Il a pallé par un état mitoyen , celui de cri- falide dans lequel il n'a pas pris de nouveaux aliniens , il n'avoit pas de moyens pour en prendre, & il a c.é nourri des fucs fournis par les alimens que la Chenille avoir pris , don: la farabondance avoir été réfervée Ik mife en dépôt pour l'état de crifalide. Exa- minons les parties qui fervent à prendre des alimens dans le premier & le troifième état , & les vifcères à l'intérieur de'quels la di- geflion efl: opérée.

La Chenille a deux dents , une de chaque côté , placées horizontalement , ayant leur mouvement dans cette même direûion , d'une lubftance cornée , arquées j tranchantes du côté de la courbure, & finilfant en pointe: ce font deux faulx dont la courbure fe re- garde , qui agilfent horizontalement , dont le tranchant fe rencontre, & qui fe croifent , fuivant qu'elles s'approchent; le bord d'une feuille laid encre ces deux pinces , d'abord écartées , puis rapprochées , eft facilement coupé par leur tranchant , &c entraîné par ladion d'une papille qui répond à la Tangue dans le fond de la bouche ; cependant la flexibilité de la feuille feroit caufe qu'elle pUetoit fouvent ou fous le poids total de la Chenille , ou fous celui de fa tète , ^ dune portion de fon corps , que le bord , en cé- dant, fe fouftrairoit à l'adlion des mâchoires. La chenille a des lèvres écailleufes , elle en pince le bord de la feuille , ralîujertic , l'em- pèi-he de plier \ eile le tient en même-tems entre fes lix pieds antérieurs , trois de chaque côte J qui font écailleux & pointus. Le bord

de la feuille eft donc alfujettî ; au lieu de plier J il réiille par l'aâiun des parties qui le tiennent tendu , & la réliftance eft caufe qu'il eft aifément détaché par le tranchant des mâchoires ; aulTî une Chenille qui veut couper une leuille fuivant toute fa longueur, ne fait-elle qu'en faifir le bord à fon extré- mité , comme je viens de l'expofer , & à melure qu'elle en détache une portion, elle fe porte en arrière , en contenant chaque por- tion du bord quelle veut décacher par le moyen de fes lèvres , de de les lix premiers pieds J parvenue au pédicule de îa feuille , elle s'avance à fon extrémité oppofée , pour recommencer de même ; &c de cette façon , elle prend la quantité d'alimens dont elle a befoin.

Le Papillon ,qui ne fe nourritpasde fubf- tances folides , mais de liquides , n'a point de mâchoires ; il a une trompe qu'il tient roulée dans l'état de repos , qu'il déploie quand il a befoin d'ahmens, qu'il enfonce dans les neftaires des fleurs , fur la furtace du miel qu'il fuce , & que fa trompe attite par une action femblableà celle d'une pompe afpitante , comme nous le démontrerons plus en détail , en traitant en particulier des diftc- tentes trompes. J'^'oyci Trompe.

L'eftomac de la Chenille , &: fes inteftins , font très - amples , remplilfent une grande partie de l'intérieur de fon corps , ik font compofés de membranes d'une épailfeur alfez conlîdérabie ; l'eftomac & les inteftins du Papillon beaucoup plus petits , n'occup- pent que peu de place à l'intérieur du ventre , & font d'un tillli bien moins fort. L'une prend à la fois une grande quantité d'ali- mens y ëc d'alimens dont il faut que les fucs nourriciers foient extraits des parties qui les contiennent , & féparés de ces parties après leurextradion; l'autre fe nourrit de quelques molécules d'un fuc nutiitit , prelque tout préparé , &c qui n'a befoin que de lubir un léger changement.

11 y a donc un rapport bien marqué entre la nature des alimens des Chenilles &: des

V L l M î N A IRE.

Papillons , les parties qui leur fervent à les prendre, & à en faire la digeiîion. Ce triple rapport n'ell pas moins facile à fiiivre dans les différens iiileûes , & félon leurs diffé- rens états; ce qu; le rend encore plus re- marquable que dans les autres animaux. Mais, pour ne pas infîfter trop long rems fur un objet auflî aifé à faifir , & fi démontré , je nie bornerai à des exemples empruntés de diftcrens genres d'infedes.

I-'armi les Coléoptères , la plupart fe nour- riifent de végétaux dans leur premier &: leur dernieréta: \ plufieurs de fubftances animales; & quelques-uns indifféremment de fubftances animales tSc de fubftances végétales. Les uns vivent dans leurs deux états, au-dehors àts. fubftances dont ils fe nourrirent , & d'autres dans l'intérieur de ces mêmes fubftances pendant leur premier état. Le Hanneton eft dans le premier cas ; \t Capricorne dans le isconà ; prenens-les pour exemple des autres jinfedles qui ont la même manière de vivre.

Le Hanneton eft dans fon premier état un ver à lix pieds ; il naît &: vu en terre , il ronge les racines des planres & des arbres. Ce ver a une têtefort greffe , i'c deux mÀchûires conformées comme celles de la Chenille, mais à proportion bien plus gran- des & plus fortes; le Hanneton , dans fon dernier état, vit hors de terre, il ne ronge jii l'écorcc , ni les fibres ligneufes des plan- tes &: des arbres j mais il coupe les feuilles [lour s'en nourrir ; il a deux mâchoires «jc des lèvres qui lui fervent à empoigner ; mais fts mâchoires , bien plus petites & moins fortes que celles du ver , lont proportion- nées à l'aélion qu'elles doivent exercer, à la réfîftance de la fubftance qu'elles doivent Givifer. Quant aux différences entre l'ello- mac de la Larve &z de l'infeéle parfait , ou du Ver (Se dj Hanneton , ce font les mêmes dont j'ai parlé par rapport à la Chenille & au Papilion , & je ne reviendrai plus à ces différences qui font générales ; le ledteur les fuppléeraà chaque article.

Le Capricorne dans fon premier ctar eft auffi un ver à fix pieds, à tète écailleufe ;

l'œuf dont il a forti a été dépofé dans le bois la femelle l'avoir introJuir peu pro- fondément à l'aide d'une tarière; le ver en nailiant a percé le bois plus avant, c'y eft introduit, l'a creufé en poudant fa fouille devant lui, «S: a trouvé à fon intérieur fon afyle &: fa nourriture; il a, cotTitne le ver du Hanneton , deux mâchoires très fortes par la denfité de leur fubftance, mais cour- tes, peu courbées, enfoncées &: en partie cachées fous la tête qui eft fort groffe , & placées prefque tranfverfalement. La tête, qui eft couverre d'un têt dur , écarte par fon volume les fibres du b. is, procure du jeu aux mâchoires; ceiles-ci incifent fur les corés, & percent en avant par leur pointe les fibres du bois, les ramaffent, les approchent vers leur centre , & les rcduifcnt en frag- mens dont le ver fe nourrir; il agrandit donc en même tems fa demeure & il pour- voit à fa nourriture; cependant parvenu au terme de fa grandeur & au io\v\ du trou qu'il a creufé, s'il s'y métamorphofoit , le Capricorne qui doit naître , auroir bien de la peine à en fortir, & ne le pourroic peut-être pas : fes mâchoires plus faïUantes, moins fé- condées par le volume d'une tête plus petite , n'auroient pas de jeu & de prile fur les parois d'un trou proportionné au volume du ver qui l'a creufé, qui, par cette raifon, va en rétréciftant du fond à l'entrée; le ver parvenu au terme fe retourne donc , il re- vient fur fcs pas, il élargit le trou jufqu'à fon orifice qu'il agrandit , & fe retirant un peu en arrière , il s'arrête pour paffer à l'état de Nymphe. Le Capricorne qui naîtra , fe trouvera la tête tournée du côté de Touver- ture du trou, les antennes couchées fur fon dos, les pieds dans une pofition telle que fa marche le portera en avant , & fa fortie s'exé- cutera fans peine, parce que fes parties, encore molles j fe prêteront à la fiexion de fon corps néceffaire pour qu'il puiffe s'avancer le long de la futface du bois à l'extérieur ^ &i k tirer du trou il eft né. Il y a àonc rapport entre les fortes & grandes mâehoires du ver du Hanneton , leur courbure , fa poiiiion & les fubftances dures qu'il entame ; il y en a

xH

DISC

encre 1 s mâchoires moins longues , moins fortes du Hanneron,& les fubftances plus foiiples qu'il incife pour fe nourrir; il y a de même rapport enrre les mâchoires cour- tes, fortes, prefque trflnfverfales &:peu cour- bes du ver du Capricorne, (^ pofition , la fubftance dont il fe nourrit, & les mâchoi- res plus faillnntes du Capricorne & fa (îcua- tion hors du trou il ell ne.

Le Cojfiis eft un très-gros Papillon de nuit dont la Chenille vit , comme le ver du Capricorne , à l'intérieur du bois ; elle fuit la même marche dans la manière de creu- fer d'abord fon trou , de l'agrandir enfuite avant de fe mécamorphofer, dans le choix de l'endroit elle fubit fon changement ; fins ces précautions, la fortie auroitété im- poffible au Papillon , qui n'a point de mâ- choires Se aucun moyen d'ouvrir la pnfon il fcroic demeuré enfermé.

Les infedles du genre des Abeilles , foit qu'ils vivent en fociété , foit qu'ils palFent une vie folitaire, ont dans leur premier état la forme d'un ver mou, pulpeux, à peine capable de mouvement & hors d'état, faute d'inftrimiens , de fatisfaire à aucun befoin , même à celui de prendre des alimens. les Mulets, dans les efpèces de ce genre, qui vivent en fociété, nourrilfent les vers , leur donnent la bccqué à la manière des oife.uix ; les v rs n'ont qu'à ouvrir la bouche & re cevoir la pulpe noutrilTante que les Mulets dé('or"enc en la faifant remonter par leur trompe- Dans lîs efpèces du même genre qui vi vent en folitude , la mère prépare pour cha- que ver qui doit naître j un logement qu'elL- approvifionne ; elle le remplit d'une pâtée liquide , pond un œuf auprès, de cette ponce , que lever trouvera autour de lui en naidanr, & qu'il n'aura qu'à fucer ; e le ferme la loge , & fe retire pour ne plus revenir. La pâtée que les Mulets dégorgent (^ans les premiers jours tft prefque Huide j & proportionnée à k délicateffe du ver i elle a de jour en jour

OURS

plus de confiflance à mefure que le ver fe fortifie : de même la pâtée dont la mère , qui vit folitaire, approvifionne le trou du ver qui doit naître , eft compofée de couches plus épailfes j & de couches plus liquides ; les dernières font les plus proches de l'œuf, ce lont celles que le ver trouvera près de fa bouche j qui lui ferviront de premier ali- ment , &: à mefure qu'il grandira , qu'il con- fommera de nouvelles couches qui fe trou- veront fuccelfivement à fa portée , il prendra un aliment plus foiide. J'ai rapporté ici ce fait , que je n'aurois peut-être pas trouvé occalion de placer ailleurs , à caufe de l'ana- logie qu'il préfente entre les infeétes & les oifeaux qui donnent la becquée à leurs petits. En effet les oifeaux ^ comme les infeétes, ne dégorgent dans les premiers jours qu'une pâtée fi liquide, que, dans ces derniers rems quelques anatomiftes ont penfé , pat rapport aux oifeaux j que c'eft du lait féraré 8c extrait dans leur jabot , la nature a placé les organes nécellaires pour cette lécrérion ; cependant & les jeunes oifeaux & les j unes infeéles , à mefure qu'ils fe fortifient , reçoi- vent où trcuvent près d'eux une pâtée plus confiftante.

Les vers dont je viens de parler fubiiïent leur métamorphofe , ou au fond d'un alvéole dont les mulets ont fermé Tentrée , ou au lond d'une retiaite dont la mère a auffi bou- ché l'ouverrure. L'infeéie qui naît au fond de cet af/le , a deux fortes mâchoires \ le premier ufage qu'il en fait eft de rompre &:de déchirer la fubftance qui bouche l'entrée d'un iieu qui n'eft plus pour lui qu'une prifon ; fiuvonvle Si examinons-le à fa fortie ; nous lui trouvons une trompe , outre les deux nia- choires dont j'ai déjà pailé , & n'ayant égard qu'à la manière de pourvoir à fa nourriture ou à celle de fes petits , nous le voyons bri- fcr avec fcs dents les poullières des étamines des fleurs , s'en fetvir pour les macérer & les pétrir , pour m extraire la cire, en corn- pofer une maffe qui fait une partie de fa nourriture, Si. peut-être aulli une pirtie de celle de fes petits ^ il pompe d'ailleurs a.vec

PRÉLIMINAIRE.

xî^

fa trompe le miel amafl'é dans les nedaiies; il en fait une autre partie de fa uourriture & de celle de fes petits. Ce que je viens de dire appartient à l'hiftoire des abeilles propre- ment dites.

Les Guêpes _, qui , comme les abeilles vi- venr en fociété ou folitaires , ont aulli deux mâchoires & une trompe ; elles entâmeiic les fruits, elles en pompent les fucs , elles en dévorent le parenchime ; elles déchirent la chair morte des grands animaux & elles s"'en nourrillent ; elles pourfuivent les autres infectes & elles les dévorent ^ elles alimen- tent aulîî leurs petits , comme ieî Abeilles , mais ce n'eft pas en dégorgeant, ce qui n'ar- rive aux Mulets des Guêpes que faute d'ali- mens folides , ni en plaçant les vers au mi- lieu d'une pâtée liquide ; ils ont des mâchoi- res 5 ils font nourris de fragme:-S de chair , de portions d'infecles , de la pulpe des fruits que les Mulets leur apportent Se leur diftri- buent à la becquée, comme certains oifeaux apportent à leurs petits des grains , des frag- mens de fruits , des infectes ou entiers ou la partie la plus fucculente de ces animaux j les petits des efpèces qui vivent en folitude, trouvent dans leur cellule , en nallFant , des aHmens folides dont la mère l'a remplie , des parties de chair , des infeiies même vivans & hors d'érar , par la pohtion gênante à la- quelle la mère , qui les a entraînés dans la cellule despetiis, lesareftraints, de bleifer les jeunes vers qui les dévorent les uns après les autres, fans qu'ils piulfent même fe défendre.

Parmi les infeéles à deux aîles nues , un grand nombre , comme la pkiparc des mou- ches , vivent pendant leur premier état , de fubftances animales ou végétales en putréfac- tion , & ils fe nourriflent, dans le dernier état , des fucs dépofés dans les nedaires ou d'aurres liquides qu'ils rencontrent , comme les fucs des fru ts entamés ou gâtés. Us ont pour mâchoires , dans l'état de ver , un cro- chet qui fuffit à détacher les molécules à demi défunics d'une fubftance putride ; ils fe nour- iillent_, dans le dernier état , pat le moyen

d'une trompe. D'autres infeftes, auOî à deuî aîles, font leur pâture du fang de l'homme m&r meou decelui desanimaux; ceux-làont, com- me le coi//?/!, une trompe quieftcompofée,qtii contient des dardb propres à percer , & qui fait à la fois les fondions d'inftrumeju péné- trant & de trompe ou de pompe ; ou ils une en même tems , comme le Taon, deux fer- res mâchoires &: une trompe , mais (nnple , qui n'ell propre qu'à fucer ; ils déchirent les chairs & pompent le fluide qui s'extravafe <\&s vailfeaux ouverts : les premiers attaquent les fujets dont la peau ell moins difficile à pénétrer, comrr>e celle de l'homme , & les féconds alFaille-nt même les animaux dont la peau eft la plus épailfe , & dont les po.'ls qui la couvrent devroient les garantir. Je ne multiplierai pas davantage les exemples \ le leéteur en pourra aifément compléter le nom- bre en parcourant , en détail , l'hirtoire des diîïérens geiires d'infecles, & en remarquant les rapports entre la nature des alimens , les inftrumens qui fervent à les prendre & à en faire la digeliion. Je demande à finir par un dernier trait bien frappant : les petits de certains infedes ne trouvent à vivre qu'à l'intérieur du corps d'autres infedes qui ne font pas de leur efpèce ; c&s inlefles font dertmés à les recevoir à leur intérieur , & à les nourrit de leur propre fubltance qu'ils dévorent : tels font les Ichneumons , les Cymps. Les femelles de ces efpèces ont à l'extrémité du corps un long aiguillon creux, fin , qu'elles introduifent dans les chairs des infeétes dévoués à devenir les viélimes de leurs petits , & à l'aide duquel elles dépofenc leurs œufs fous les tégumens de ces mêmes infedes.

Indépendamment des obiets qui viennent de nous occuper , il (e palFe , tandis que les alimens font dans la bouche , un fait très re- marquable au moins dans les grands animaux; la bouche , pendant la maftication , eft abon- damment abreuvée d'un fluide qui pénètre les alimens , les amollit , rend d'abord la di- vifion de leurs parties, & enfuite leur réunion en un ^a/«J, plus facile j ce fliii4e eft la falive.

xlvj

DISCOURS

La même aclioii a-t-elle lieu dans coii5 le; animaux , même dans les infecies , pendant qu'ils pi-ennenr des alimens ; ou tous les ani- maux , même les infedes , ont-ils de la ia- live ? Le fait efl: trop évi.rlent par rapport aux quadrupèdes , à plulîeurs quadrupèdes ovi- pares &diffcrens reptiles pour s'arrêtera le prouver : il ne paroîc pas que les oifeaux aient de falive , s'il ne faut donner ce nom qu'à un fluide qui humede les alimens dans la bouche ou dans la partie qui y repond ; l'intérieur même du bec des oifeaux ne paroît point humedté par un fluide qu'on puilfe appeller de la falive , ni même com- parer à cette humeur ; mais ces animaux ont un vifcêre intermédiaire entre l'tefophage ,oi\ conduit des alimens de la bouche à l'efto- mac , qu'on ne trouve pas dans les autres animaux; fa forme, fa fubftance membra- neufe, l'ont fait appeller ia poche. Ce vifcêre abonde en une fcrofité qui l'humedre ^ qui découle de fes membranes, qui s'amaifedans fa cavité ; les alimens qui y fejournent s'a- molUlFenc ; il y a lieu de croire que c'eft par l'adtion du fluide qui y abonde , que ce fluide eft analogue à la (alive , qu'il a , fur les ali- mens pendant leur féjour dans la poche , la même atlion que la falive fur la nour- riture dans la bouche pendant la mafti- cation ; il paroît donc que les oifeaux ont réellement de la falive , & qu'ils en ont en aufll grande abondance que les quadru- pèdes.

Les infesfles en ont-ils aulTi ? Piufieurs de ceux qui ont une bouche & des mâchoires, proprement dites , ont fouvent ces parties liumeêlées d'un fluide qui s'amalle iS: tombe en goutte à l'extrémité de la bouche , ceux qui fe nourrilfent par une trompe , en font forcir une liqueur qui fert à délayer les fucs trop épais , qu'ils ne pourroienc afpirer autre- ment. Il y a toute apparence que dans ces deux cas , les liqueurs exprimées par les in- fedes font vraiment de la falive , cxt qu'elles en ont l'ufage &c les propriétés. Lorfqu'on in- quiète certains infectes , ils répandent la li- queur que nous fappafons être leur falive ,

comme plufieurs quadrupèdes lancent la leur en pareil cas contre leur ennemi. C'eft un rapport de plus.

Nous ne nous fomme; encore occupés que du premier cems de la dige.'iion ou du choix des alimens , de la manière de les prendre, de l'adtion qu'^'s fubifTent dans la bouche , des parties qui fervent à ce^ deux objets , des rapports entre ces parties, la nature des ali- mens. Se celle des vifières qui en opèrent la digeftion. Nous allons palfer au fécond tems de cette fondion , au féjour des alimens dans Teftomac & les intefïins , à la compa- raifon de ces vifcères entre les diflérens ani- maux 5z les infedes , & à l examen de leur adion fur les alimens

De la d'igejlion proprement dite.

J'appel'e digeftion proprement dite , les changemens que les alimens fubilTeut dans l'eftomac de les inteftins ; ils palTent de L\ bouche à l'eftomacpar un canal membraneux, qu'on nomme a:fophage , & qu'on j eut re- connoître dans les infedes même ; leur trajec à travers ce canal eft déterminé par la con- tradion de quelques fibres mufculaires qui entrent dans la compohcion.

L'eftomac eft placé dans la capacité du bas- ventre ; il eft membraneux Se fortifié par une couche mufculaire; nous favons déjà qu'il eft plus ample, que fes membranes , la couche mufculaire , font plus fortes , plus épailles dans les animaux frugivores que dans les car- nivores ; que dans ks oifeaux qui font grani- vores , il eft à proportion plus petit que dans les autres animaux , (?j qu'il eft entièrement formé par des couches mufculaires : ajoutons que la membrane interne de l'eftomac eft ia plus mince , qu'elle eft beaucoup plus ample que celles qui l'enveloppent , qu'elle forme des plis nombreux , qu'un lui donne le nom de memhrjne veloutée , &: qu'il en découle , en grande abondance , un fluide qu'on nom- mcfuc gajlrique.

PRÉLIMINAIRE.

xîvlj

Les inteftiiis font un long canal qui , pre- nant fon origine à l'eftomac , fe termine à l'a- nus. Ce canal a la même Itriiélure que l'ello- mac i on le divife idéalement en deux por- tuns , qu'on (ubJivife chacune en trois : on nomme la première les intejhns grêles ^ la fé- conde les gros Intejllns les premiers ont beaucoup plus de longueur & moins de dia- mètre ou de capacité , & c'efl cette difteren ce qui ell exprimée par celle des noms des deux portions ^ l'une &c l'autre forment un grand nombre de circonvolutions , & leur longueur totale furpalfe d'un plus ou moins grand nombre de i-ois celle du corps , félon Jes efpcces ; à l'intérieur de ce canal font placées en difterens endroits des glandes lymphatiques ; ce canal a des pores qui s'ou- vrent dans les vailfeaux lymphatiques , ou ces vailTeaux nailFent de l'intérieur de ce ca- nal ; plulîeurs , fe réunilfant en s'éloignant du canal , forment des vailTeaux plus ou- verts , qu'on nomme raiffeaux laclés , ils aboutilfent tous vers le bas de la colonne épinière , à un rcfervoir membraneux qu'on nomme refervoir de pecquet , de ce rcfeivoir naît un canal afcendanr , qui vient fe termi- ner à la veine fouclavière gauche.

Les inreflins ont un mouvement qui leur cft propre ; il confifte en une forte d'ondula- tion , il réfulce de la coniradlion des fibres mufculaires circulaires qui refierrent le canal , & de celle des fibres longitudinales qui le raccourcilTent ; on le nomme mouvement pc'- r'ijlaiûcue , Si aulfi vermiculaire de la tef- femblance qu'on a cru trouver entre ce mou- vement & celui des vers.

A l'intérieur du canal intefi;ii)al s'ouvrent deux conduits j l'un place peu au-deilous de {i'ii or'gine , & l'autre au-delTous du pre- mier ; l'un verfe dans fon canal la bile qui coule inceflamment du foie , & celle qui , do ce vi-fcère , a palfé en referve dans la véficule du fiel poar i^e couler qu'en un certain jems , & particulièrement pendant la digeftion j par l'autre canal ccnile un Huide qu'on croit ana- logue à !a falive , & qui eft extrait & fourni par an vifccre qu'on no*Ti.ne le pancréas-^ & le

fluide qui en découle, yâcr pancréatique. Tels font,en général, les objets qu'il étoic néceiraire Je remarquer par rapport a l'eftom;;c (^- aux inteilins avant d'examm.r leur adtion 6c d en chercher les caufes ; je ne fuis foint entré dans l'cnumération des fubdivifions du canal inteftinal , parce que ces fubdivifions ne faii- roient être iuivies dans les infedes ; il fuffic de remarquer ici ^ en général , qu'on recon- noîc dans les infectes , comme dans les .autres animaux , un ellomac , un canal inteftyiai _, nous examinerons leurs rapports Se leurs dif- férences avec les mêmes vifcères des autres animaux , après nous être occupés de la ma- nière dont fe fait la digeftion , de l'adion des agens qui l'opèrent fur les alimens.

Les alimens parvenus à Teftoniac fous la forme d'une malfe dont les parties font di- vifées , broyées j pénétrées par un fiuide qui les humecte, & contenues par les feuls pa- rois du viffère ils font reçus , y éprouvenc 1^'. la chaleur du vifccre ; i'\ l'adion du fiaide qui tranfude de fa membrane interne ; 3^'. celle des fibres de fa couche mulculaive dont la préfence Se le contad des alimens excite l'irritabilité 6c détermine la contrac- tion.

L'air contenu dans les alimens eft raré- fie pat la chaleur de l'eftom.ac ; il écarte j en le raréfiant , il fépare & défunit les patties des molécules qui le contenoient , il aug- mente la divihon de la malfe alimentaire.

Le fuc gaftrique ou le fluide qui coule de la membrane interne de refiomac pénètre les alimens, augmente leur dcfunion, & excite dans leur mafle un mouvement intef- tin, une fermentation d'un genre particu- lier (Se encore peu connu. En effet, fi quel- que tems après qu'un animal a pris des ali- mens & pendant qu'ils font encore conte- nus dans l'eftomac, on le tue, on fent à l'ouverture de l'eftomac une odeur ana- Ijgue à celle que répandert les fubftances f:ai commencent à fermenter, &• qui appro- chent de celle du mou ou du vin nouveau

DISCOURS

XlVilJ

en fermentation : cen a été aflTez pour qu'on îiit penfé long tems que la digellion n'étoit qu'une véritable fermentation ; mais le pro- duit eft fort différent de celui des fermen- tations qui s'opèrent hors du corps des ani- maux , de la fermentation acide & de la putride , Se du produit de la fermentation fpiritueufe. De plus , on a vainement tenté ou d'enfermer dans des vaiHeaux qu'on bou- choit, & qu'on expofoit à une chaleur ana- loone à celle de l'eltomac , ou des fubftan- ces alimentaires qu'on humecloit fuftîfam- ment , &: qu'on avoit auparavant divifées , broyées pour imiter la maftication , ou des fubliances qui avoient été même broyées fous les dents , qui avoient fubi la maftica- tion Se avoient été imprégnées de falive. Ces fubftances ou n'ont pas fermenté, ou le ptùduit de leur fermentation n'a pas ref- femblé à celui de la digeftion. Il paroît donc que la digeftion eft une fermentation d'un genre particulier & déterminé par Ufuc gaf- trïque qui en eft le principe. On ne peut douter qu'il le foitj d'après l'expérience fui- vante toujours la même, répétée fouvent & fuffifamment conftatée. Des fragmcns d'ali- nicns ont été enfermés dans des tubes de méral ou de bols ; on a bouché les deux ou- vertures de ces tubes \ leurs parois étoient percés de trous trop petits pour donner paf- lage aux allmens , & qui permetcoient à un fluide d'entrer dans les tubes ^ ils ont été avalés j & quelques heures après, foit qu'on les ait retirés de l'eftomac des animaux, foit que des hommes courageux ( M. Spalanzani) , qui avoient formé le deffein de fervir eux- mêmes à l'expérience , les aient rendus par le vcniiirement, les tubes fe font trouves vuides , les alimens qu'ils contenoient diifous & changés en un produit femblable à celui qui avoit paffé dans l'efto- ués fur les parois

de la digeftion

n-.ac pat les trous pratiqi

des tubes.

Quelques anatomiftes ne confidérant dans l'eftomac, par rapport à la digeftion, que l'câiion de la couche mufculaire , iS: faifant atteiitio 1 que les hbrcs de cette couche cm-

bralfent l'effomac en tout fens , les unes de l'une à l'autre de fes exttémitésj les autres circubirement, fous toutes fortes d'angles, concluteiit que la contraction de cette cou- che ctoit le moyen employé par la nature pour opérer la digeftion; qu'elle fe faifoit par la tricuracion \ que les alimens contenus entte des membranes rapprochées, mues ea tout fens , en fuivoient les mouvemens, étoient broyés, mêlés aux Huides , dllfous, & fe changeoient en une forte de pulpe j ou de liquide qui efl en effet le produit de la digeftion quant à la confiftance des fubf- tances digérées. Cette opinion a long- tems prévalu , & elle a eu des partifans zélés , qui , appliquant mal - à - propos les calculs géométriques i l'économie animale, élevè- rent la force de contraélion des libres mul- culaires de l'eltomac de l'homme à une puif- fatice de pluheurs milliers. Mais ce fenti- ment n'a pu fe foutenir contre l'exemple des tubes que j'ai cités, à l'intérieur def- quels les alimens écliappoient à la force de contradion des fibres mufculaires &: ntn étoient pas moins digérés ; d'ailleurs les tubes auroient être broyés par une force aulii grande que celle qu'on fuppofoit, !k ils ont été ou trouvés , ou rendus entiers j leur furface étoit feulement polie, ou même un peu ufée & applatie dans quelques ani- maux ; c'étoit dans les oifeaux granivores dont l'eftomac , différent des auttes ani- maux ^ n'eft en quelque forte qu'un mufcle très-épais Se très-fort : ces oifeaux avalenc leurs alimens fans les broyer , ils ne font qu'amol'is dans \c jabot ou la poche; l'efto- mac plus tort fupplée , par la contradlion de fes fibres, aux préparations que les alimens n'ont pas éprouvées ; mais la membrane in- terne de l'eftomac de ces oifeaux , eft , com- me la membrane interne de l'eftomac des autres animaux , d'un tiiïii particulier ; elle eft la plus ample, elle forme des plis & il en tranfude un fluide; il paroît donc que dans ces oifeaux la trituration ou la ccn~ tracftion des fibres muftiflaires de l'eftomac, contribue plus a la digeftion que dans les autres aniniauxj qu'elle remplace l'aélion

(les

P R E L I M

des parties qui minquen: aux oifeaux , «Sc fupplée aux préparations que le grain n'a pas éprouvées; mais que dans les animaux en général, & dans les oifeaux granivores même en particulier, la digeftion eft le produit d'une fermentation d'un genre particulier, déterminé par le fuc gaftrique qui en elt le principe ; & comment , fans cela , le grain contenu dans les tubes , fe feroit-il trouvé dilTous & digéré , ainli que les autres ali- mens ? Il n'en faut pas conclure que les fibres mufculaires n'ont pas d'adion relativement à la digeftion ; il eft probable que leurs con tracions , que le mouvement qu'elles com- muniquent aux membranes du vifcère iSj aux alimens qu'il contient , favorifent la dillolu- tion des alimens , leur mêlatige avec les flui- des, & leur converlion en une fubllance pulpeufe ; c'eft un troifième agent, mais ftcondaire, comme la raréfaétion de l'air par la chaleur du leii. L'agent principal eft le fuc gailrique qui excite le mouvement in- teftin des parties alimentaires & la fermen- tation ; celle ci opère un changement dans la mafTe alimentaire, év: c'eft en ce change- ment que la digeftion confilte proprement; Teftet qui en réfulte eft la conveifion des alimens en une fubftance liquide qui palTe dans le canal inteltinal. Si que nous allons fuivre dans (on trajet à travers ce long canal.

Les alimens réduits en une fubftance pul- peufe, après un féjour de quelques heures dans l'eftomac , paflent par ion orifice infé- rieur dans le canal inteftinal qui prend fon origine à cet orifice ; ils font entraînés par leur poids , l'eftomac fe trouvant plus élevé que l'entrée des inteftins,&: ils y font fur- tout poulies par la contraétion de la couche mukulaire de l'eftomac.